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Études sur les revenus et leur mobilité

par admin
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Il est insuffisant de se livrer à l’étude des inégalités des revenus sans s’intéresser également à leur mobilité, c’est-à-dire aux changements de niveau de revenus ou de fortunes. La mobilité est même plus importante car les inégalité ont existé de tout temps, mais ce qui compte dans une société, c’est l’espoir de pouvoir changer de niveau, de catégorie sociale, de s’élever, de réussir ; c’est l’égalité des chances, plus importante que l’égalité des conditions.

Scientifiquement, traiter seulement des inégalités, c’est traiter du stock, sans traiter du flux.

Joseph Schumpeter avait comparé le phénomène des inégalités à un hôtel, où toutes les chambres sont toujours occupées mais pas forcément par les mêmes personnes. Les habitants des chambres les plus simples ont toujours la possibilité d’aménager dans les chambres plus confortables, ainsi que les chambres luxueuses ne sont pas toujours détenues par les mêmes personnes. Dans ce sens, la mobilité signifie le taux de renouvellement des habitants des chambres dans cet hôtel. Concernant les inégalités des revenus, dans la société les pauvres ne sont pas toujours les mêmes pauvres et les riches ne sont pas toujours les mêmes riches, car il existe une certaine mobilité entre les déciles et les quantiles, ce qui est complètement ignoré par la statistique française. Il est inacceptable de parler de l’accroissement des inégalités sans avoir regardé la mobilité des revenus, ou l’égalité des chances, qui permet à chacun d’améliorer sa situation financière, ou bien au contraire, perdre sa fortune tout à coup.

L’INSEE ne fournit régulièrement que des chiffres bruts issus d’une coupe statique sans s’intéresser à la dynamique des revenus ni à l’effet de la redistribution, ce qui rend la vision des inégalités en France complètement biaisée.

En revanche, le Treasury américain s’intéresse constamment à la mobilité des revenus aux États-Unis. En 2008, ils ont publié un rapport qui analysait la mobilité des revenus sur la période 1996-2005 en suivant la situation des mêmes personnes sur dix ans. Ils ont trouvé que la mobilité était très importante, car sur cette période plus de la moitié des personnes avaient changé de quantile, ce qui était également le cas pour le quantile des revenus les plus bas. Dans le quantile des revenus les plus hauts, si on regarde le 1% des personnes les plus riches, seulement 40% d’entre eux s’y sont retrouvés dix ans plus tard. Ces résultats sont confirmés par les études antérieures du Treasury, le rapport précédent publié en 1992, portant sur la mobilité des revenus sur la période 1979-1988.

Les études du Treasury sont réalisées à partir des données de déclarations fiscales (IRS Statistics of Income Individual Tax) de près de 100.000 personnes. D’autres études se basent généralement sur une base longitudinale des revenus des ménages (Panel Study of Income Dynamics) de près de 5.000 familles américaines qui existe depuis 1968, et confirment l’importance de la mobilité des revenus mis en évidence par le Treasury.

Pour la Grande-Bretagne, l’ONS a également élaboré une base longitudinale des ménages (British Household Panel Survey) de plus de 5.000 familles britanniques, qui existe depuis 1991. Cette base, étant représentative de la population, permet d’étudier la mobilité des revenus d’une manière très détaillée. Un professeur du London School of Economics, Stephen Jenkings, a publié en 2011 un livre intitulé « Changing Fortunes : Income Mobility and Poverty Dynamics in Britain » qui souligne l’importance extrême de l’analyse de la mobilité des revenus dans un pays réalisée à partir des bases statistiques nationales disponibles.

Contrairement à ses collègues américains et britanniques, l’INSEE ne met à disposition des Français que des études sur la mobilité intergénérationnelle du patrimoine [[Jérôme Bourdieu, Gilles Postel-Vinay et Akiko Suwa-Eisenmann. « Mobilité intergénérationnelle du patrimoine en France aux XIXe et XXe siècles ». Économie et Statistique. Juin 2009 – n°417-418.]] ou bien sur l’éducation et la mobilité sociale[[Camille Peugny. « Éducation et mobilité sociale : la situation paradoxale des générations nées dans les années 1960 ». Économie et Statistique. Août 2008 – n°410.]], qui se basent uniquement sur les enquêtes Emploi. Il ne tient aucune base longitudinale qui permettrait d’analyser la mobilité de revenus, d’évaluer quelle est l’égalité des chances en France ou de mettre en question l’accroissement des inégalités en France qui est peut-être un mythe.

 

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2 commentaires

Yves Montenay décembre 15, 2012 - 5:13 am

Études sur les revenus et leur mobilité
C’est évident, mais extrêmement difficile à expliquer à ceux qui sont chargés du traitement des données, ou à ceux, notamment les enseignants, qui pourraient en répandre l’idée, car en tant que fonctionnaires, ils voient la société à leur image, c’est-à-dire comme une série de « chambres » (je reprends l’exemple de l’hôtel) dont on ne bouge jamais.
Et puis il y a ceux qui pensent que si l’on nuance la question des inégalités, on sera moins déterminé à les réduire, or leur idéologie donne priorité à cette réduction quelles qu’en soient les conséquences.

Bon courage ! Continue !

Yves

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