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Taxes écologiques et taxe d’habitation : le problème des dépenses publiques

par Bertrand Nouel
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Le délégué de l’association de défense des consommateurs CLCV a envoyé ce que d’aucuns qualifient de brûlot à l’adresse du gouvernement en affirmant que clairement, à Matignon ils nous ont dit : « Pour supprimer la taxe d’habitation pour 80% des Français, on a besoin d’augmenter de beaucoup les taxes sur les carburants. Ce sera la seule taxe qu’on va augmenter mais on a besoin de le faire sinon on ne peut pas faire les autres réformes fiscales » …

Matignon et François de Rugy, ministre de la transition écologique, ont immédiatement réagi en traitant cette déclaration de fake news, car il n’y aurait aucun rapport à établir entre les deux taxes, en raison de la règle budgétaire de non affectation des ressources, ce qui serait le cas pour la TICPE.

Ce n’est que partiellement exact. Sur 37,7 milliards de rendement annuel de la TICPE (chiffres 2019, en augmentation de 3,7 milliards sur 2018), 17 milliards seulement, soit 45%, rentreront dans le budget général de l’Etat et serviront à payer l’ensemble de ses dépenses, et pas plus la baisse de la taxe d’habitation que toute autre dépense. Le solde doit être affecté aux collectivités locales, ainsi que, enfin, à hauteur de 7,2 milliards, à la transition écologique). Mais le problème n’est pas là ! Et ce, même si la totalité des taxes n’avaient aucune affectation.

Tout d’abord, ce n’est pas ainsi que les choses ont été présentées aux Français. Les taxes vertes sont censées apporter ce qu’on appelle un « double dividende » : elles servent à augmenter les ressources budgétaires et « en même temps » à inciter à diminuer la consommation de produits à effet de serre. L’existence du second dividende est tout à fait contestable dans la mesure où les Français ont tous (et pas seulement les salariés habitant à plus de 30 km de leur lieu de travail, éligibles, sous condition de ressources, à l’éventuel « chèque carburant ») un besoin impératif d’utiliser leur véhicule : « le signal prix » n’existe en réalité pas, en l’absence d’alternative pour les déplacements. Autrement dit, les prélèvements que les Français sont d’accord pour accepter dans la mesure où la motivation en est vertueuse, ne rencontrent pas la même approbation lorsqu’ils servent à gonfler un magma fiscal global qu’ils trouvent clairement insupportable.

En second lieu, le gouvernement s’est largement donné les verges pour se faire fouetter. Au printemps dernier en effet, la question lui avait été posée de savoir comment il allait financer les 8,5 milliards supplémentaires nécessaires pour la suppression de la taxe d’habitation pour tous (et pas seulement pour les 80% les moins riches, égalité devant l’impôt oblige). En chœur, Gérard Darmanin et Olivier Dussopt avaient répondu : « Le gouvernement a fixé une ligne rouge : il n’y aura pas de création de nouvel impôt (…) ni d’accentuation de la pression fiscale ». Croix de bois croix de fer… ? C’est bien en enfer que les Français paraissent tentés d’envoyer le gouvernement.

De toute façon, aussi vrai que les taxes en question ne sont pas affectées, il n’en reste pas moins que si la taxe d’habitation n’avait pas été supprimée, on aurait pu faire l’économie de la hausse des premières, non ?

Toute cette agitation médiatique aurait peut-être été évitée si les Français n’avaient pas eu l’impression d’être (une fois de plus) bernés, mais pour cela il aurait fallu leur expliquer le pourquoi des choses, autrement dit utiliser beaucoup la pédagogie. Il est en effet exact que l’Etat dépense beaucoup d’argent pour la transition énergétique, et pas seulement au sein du ministère du même nom. Au lieu de cela, on leur a fait croire que les ressources provenant de la TICPE et des augmentations considérables qu’elle doit subir les prochaines années, et ce dès 2019, étaient directement affectées à l’écologie. Ils découvrent maintenant que ces ressources rentrent à hauteur d’environ 30 milliards sur 37 dans le pot commun indifférencié du budget, et cela suffit à attiser leur colère.

On est bien toujours renvoyé au problème des dépenses et des prélèvements globaux. Aussi longtemps qu’il s’agira de faire face à 56% et plus du PIB de dépenses publiques, on jouera au bonneteau avec l’obligation de gager toute baisse fiscale par de nouveaux impôts ou par la hausse des impôts existants. Au gouvernement de l’expliquer honnêtement – ou de changer sa politique.

 

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1 commenter

Picsou 75 novembre 14, 2018 - 9:10 am

affectation ?
Bonjour,
néophyte en finances publiques, je croyais avoir lu quelque part le « principe de la non affectation des ressources » dans le budget de l’état. Qu’en est il exactement ?

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