Comment résoudre le problème de l’industrialisation (ou plutôt de la réindustrialisation) de notre pays ? Il y a aujourd’hui 7,5 millions d’emplois dans l’industrie allemande, contre 2,7 millions dans l’industrie française[[Source : Nicolas Dufourcq (BPI)]], chiffre stagnant pour la France pendant presque 10 ans.
À l’intérieur de notre groupe, lequel, rappelons-le, a vocation à favoriser la création d’entreprises marchandes et d’emplois, de préférence industriels, nous avons longuement hésité devant un éventail de solutions.
À une extrémité, plutôt étatiste, sinon à gauche : les subventions. Claude Sicard par exemple a proposé plusieurs fois de décliner la politique retenue pour l’apprentissage à la création d’emplois. Son argument : un emploi créé remplace très rapidement les coûts du chômage et de la pauvreté par des recettes qui compensent les subventions (voir à ce sujet son analyse « L’Industrie pour relever la France » et notamment paragraphe « Les difficultés à surmonter »).
L’autre possibilité serait l’alignement des charges des entreprises françaises sur leurs concurrentes étrangères. Combat difficile sinon douteux… Mais dans les deux cas, le risque budgétaire est grand, les effets d’aubaine à peu près certains, voire les fraudes, et l’on remplace quelque part l’initiative et l’aventure individuelle par… la BPI. Surtout, des décisions de fonctionnaires-spécialistes se substituent à des entrepreneurs qui vont assumer le risque.
À l’autre extrémité, une autre école à laquelle j’adhèrerais personnellement plus volontiers : l’hypothèse que la création d’entreprises et d’emplois repose en définitive beaucoup plus simplement sur l’envie de le faire, portée par des individus un peu originaux, les entrepreneurs. Bien sûr il y aura des difficultés mais si l’on en a réellement envie, on les vaincra ! En attendant un article plus complet sur le sujet, je voudrais évoquer une expérience et un constat.
Une expérience : la ville de Malaga en Espagne a décidé de montrer – vous ne rêvez pas – de l’affection à tous ceux qui viendraient la voir soit pour investir soit simplement pour y vivre. Et après 10 ans, il est vrai, c’est un énorme succès en Espagne (l’affection consiste essentiellement à écouter les demandes des interlocuteurs et à essayer de les satisfaire).
Par ailleurs, un constat que nous avait expliqué en son temps Jacques Delors : si vous souhaitez dans votre vie vous payer un appartement à Paris, devenez cadre supérieur ; mais si vous voulez faire fortune, il faut tenter l’aventure de l’entreprise et en assumer le risque.
Ceci rejoint les études de notre fondateur, Bernard Zimmern lequel avait observé il y a déjà plus de 10 ans le déficit en emplois marchands de la France et proposait comme solution la création de nouvelles entreprises de taille raisonnable (10 salariés et 1 million de capital à la création).
On observe tout de même en parallèle un certain nombre de structures plus importantes qui se développent en attaquant et créant des nouveaux créneaux et qu’il pourrait être intéressant de stimuler (Amazon, Google, batteries, etc.), ainsi que des entreprises existantes qui arrivent à se développer.
Nous aurons l’occasion d’y revenir. Bernard Zimmern avait également montré qu’aux États-Unis, une forte proportion des « riches » sont avant tout des entrepreneurs et que, d’ailleurs, cette population se renouvelle régulièrement.
La génération des baby-boomers avait plutôt choisi la voie des cadres supérieurs, visant prioritairement des entreprises du CAC 40 ou grandes entreprises étrangères mais la population des jeunes diplômés d’aujourd’hui a, semble-t-il, viré sa cuti : 30 % d’entre eux souhaiteraient créer leur propre entreprise, ce qui serait un terreau extrêmement favorable. Il s’agirait donc, à l’autre extrémité de l’éventail, de favoriser voire de susciter la réalisation effective de projets émergents.
Nous sommes en train d’essayer d’analyser ces deux voies ainsi que, d’une manière plus générale, les paramètres qui seraient à surveiller pour favoriser ces éclosions. À ce sujet, je voudrais vous recommander trois articles qui viennent de paraître :
Une interview de Marc Ferracci dans le journal L’Opinion sur : la future loi sur le plein-emploi
Quel est l’objectif ?
« Il est triple : travailler tous, partout sur le territoire, et mieux. »
Ce projet est-il le cœur de la politique économique du second quinquennat ?
« Le but n’est pas seulement de faire baisser le chômage mais d’atteindre une société du plein-emploi. Une société dans laquelle les relations de travail et les parcours de vie sont profondément transformés, où les parents ont moins peur pour l’avenir de leurs enfants. Ceci peut soutenir la natalité, qui n’a été abordée que de manière étroite dans le débat sur les retraites. »
… « Retraites et partage de la valeur en font bien évidemment partie mais ne doivent pas masquer l’objectif final ! »
Un article de Jean-Pierre Robin dans le journal Le Figaro : « Un million d’emplois créés depuis 2019, mais peu qualifiés et peu productifs»
« Seul hic, travailler plus, c’est bien, encore faut-il que la production suive à proportion. Or c’est loin d’être le cas. Dans le secteur privé, qui constitue 84 % du PIB français (le reste revenant aux administrations publiques), «la croissance de la valeur ajoutée marchande entre 2019 et 2022 a été de 0,6 % et celle des effectifs employés, de 5,1 %», a calculé Denis Ferrand, le directeur de l’institut de conjoncture Rexecode. Voilà qui est salutaire pour le chômage, dont le taux a pu être ramené de 8,2 % de la population active, en 2019, à 7,2 % fin 2022, au plus bas depuis quinze ans. En revanche, ces emplois supplémentaires s’avèrent bien peu productifs et on assiste à un effondrement de la productivité, dont on rappellera la définition de l’Insee: «Le rapport, en volume, entre une production et les ressources mises en œuvre pour l’obtenir.» Selon Rexecode, «en 2022, la productivité apparente du travail est inférieure de près de 7 % à ce qu’elle aurait été si elle avait progressé à son rythme tendanciel passé (0,7 % l’an) depuis 2019». Une telle rupture est historique. »
Un troisième article, enfin, de Patrick Arthus dans Le Monde également sur le thème de la productivité « La clé, c’est la productivité ! ». Ce dernier insiste par ailleurs sur l’innovation et la modernisation des outils de production.
Aides importantes ou volonté d’entreprendre, les deux termes ne sont pas forcément contradictoires mais ce sont probablement les deux axes principaux à explorer sur lesquels nous reviendrons.
Je voudrais également vous demander un service : vous avez sur ce sujet une opinion, des expériences, des réussites, des échecs, aussi, peut-être parfois. Votre opinion nous intéresse et intéressera nos lecteurs, en commentaire ou en nous écrivant. Donnez-nous votre avis et enrichissez nos pistes ; si vous étiez demain ministres de l’Industrie ou des Finances, voire entrepreneur, quelles recommandations avanceriez-vous ? À VOS PLUMES (ou claviers), MERCI !
PS : nous essaierons d’en faire bon usage.
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ROBOTISEZ VOUS OU MOUREZ !
Si vous croyez que 100 ouvriers remplacent un robot plus personne ne peut plus rien pour vous et même avec une « aide » de l’état de 10 millions d’€uros votre fin sera retardée et surtout inéluctable.
Si vous voulez vous battre à poings nus contre les armées de machines automatisées à outrances, c’est que vous êtes un homme politique français et de gauche qui poursuivez un dessin chimérique avec pour résultat de nous enterrer tous ou alors un syndicaliste hurlant et trépignant pour le même résultat.