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La réforme des retraites et la tectonique des plaques

par Yves Buchsenschutz
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Il ne se passe pratiquement pas d’année, sans que le gouvernement ne tente de réformer le système français de retraite. De la même manière, avec une constance aussi régulière, les syndicats, mais aussi les Français s’élèvent contre cette prétention. Ils seraient aujourd’hui 68 % (source IFOP) contre la dernière réforme envisagée : c’est une vraie majorité, si tant est que le sondage soit juste. Pourtant un rapide et simple tour d’horizon dans le problème et dans les pays voisins similaires devraient interroger l’opinion …

La vie d’un français lambda peut sommairement être divisée en trois parties :

  • Une première partie d’éducation et d’élevage : plus ou moins de la naissance à la majorité. Pendant cette période, l’individu vit en général aux dépens de la collectivité. En fait il est rattaché à des actifs. Pour simplifier la durée peut être estimée à une vingtaine d’années.
  • Une fois formé, le citoyen rentre sur le marché du travail et devient un actif. C’est la période pendant laquelle chacun d’entre nous, va créer, produire et assurer le fonctionnement de l’ensemble du système. Tant que la retraite était fixée à 60 ans (et ou 160 trimestres travaillés), chacun devait en quelque sorte changer de statut et non seulement « gagner sa propre vie » mais de plus financer l’élevage de la génération en formation. Dans les bornes ainsi définies il en avait pour 40 ans !
  • L’usage, l’usure, la lassitude voulait que, au-delà de cet âge le citoyen accède à la retraite, période pour finir assez comparable à celle de l’éducation dans la mesure où l’on cessait en général une activité productrice rémunérée.
  • On se retrouve donc dans un système dans lequel l’individu est en quelque sorte subventionné et assisté aux deux extrémités de l’existence en échange d’un travail plus intense pendant la période centrale de sa vie. Il doit en effet pendant ces années, déployer une suractivité, à savoir : assurer sa propre existence, subventionner l’éducation de la jeunesse et parallèlement la fin de vie des anciens. Accessoirement il peut lui être demandé d’autres efforts sociaux en particulier l’indemnisation du non travail (le chômage) d’un certain nombre de personnes plus ou moins hors circuit, et d’un système de santé concernant d’abord les deux autres catégories.
  • Si l’éducation des enfants a été assurée assez naturellement par les actifs, la prise en charge des personnes âgées ne s’est organisée, en dehors des familles, que beaucoup plus récemment et l’on raconte toujours que Bismarck, qui a fondé le premier système général de retraite en Allemagne, avait fixé l’âge de départ à 70 ans, arguant du fait que les prétendants potentiels seraient morts !
  • Entre les deux systèmes possibles que sont la capitalisation (chacun gère son destin futur en économisant tout au long de la vie pour sa retraite) et la répartition (les personnes en activité cotisent pour la génération précédente déjà en retraite), la France a choisi quasi exclusivement la répartition.

Financement du parcours social

La chenille de vie :
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En définitive, seule la période activité, doit financer, directement ou via les entreprises, l’ensemble des dépenses d’une vie complète, de manière volontaire à l’intérieur de la famille pour l’élevage, par l’intermédiaire de cotisations pour le chômage, la santé et la retraite.

À date, le système fonctionne à peu près mais sous risques importants. Se pose la question de la répartition de la charge et un déficit donc une dette qui devient chronique et dangereuse.

Les jeunes : Deux questions principales : les réussites records au baccalauréat ont ouvert des possibilités de prolongement des études repoussant l’âge d’entrée dans la vie active et donc le démarrage de la cotisation : la frontière se déplace vers la droite. Surtout la natalité française quoiqu’un peu plus solide que celle de ses voisins européens développés s’essouffle néanmoins lentement. La détérioration progressive et lente de la politique nataliste d’après-guerre, ajoutée à l’évolution des modes de vie pose le problème du remplacement des générations et donc influe négativement sur le ratio actif/assisté. Le coût, en partie masqué dans les familles, de l’élevage pourrait bien rejaillir sous la forme d’un manque d’actif dans le futur.

Les vieux : Deux questions également : la principale de loin, est l’augmentation continue de l’espérance de vie moyenne. De 67 ans 1950, elle est aujourd’hui à près de 85 ans pour les femmes et de 78 ans pour les hommes, ensemble environ 82. Or pendant ce temps là le Président Mitterand en 1982 a rabaissé l’âge de la retraite de 65 à 60 ans, accordé une semaine de congés payés supplémentaire suivis par le passage aux 35 heures lequel a diminué la capacité de financement des actifs. Nous sommes passés de 2 ans de vie à la retraite à financer à 22 ! La deuxième est bien entendu le problème de la médicalisation qui augmente inexorablement avec l’âge et les progrès de la médecine.

Nous avons réussi cette gageure : travailler moins de temps, moins d’année pour financer une population âgée croissante et de plus en plus coûteuse à entretenir. Il est vrai que l’augmentation globale de population (+50 % en 70 ans. De 42 à 67 Millions de français) a aidé !

Bilan général : Entre 1950 et 2020, le temps de travail rémunéré a été divisé par 2,5 (de 24 % du temps éveillé à 11 % – il était de 70 % en 1850 [[Oliveau, Microcapitalisme, page 47]]) et le niveau de vie des français a été multiplié par 5.[[Statista Evolution du PIB France, de 1950 à 2019]]

A ce propos il est intéressant de remarquer que la productivité globale ne donne pas seulement, comme on le pense en général, du niveau de vie supplémentaire mais également du temps libre. Je n’ai pas trouvé de règle dans la répartition qui est quelque peu chaotique au cours de l’histoire même récente, mais les deux possibilités sont présentes et les français en ont tous bien profité.

Le drame du financement : contrairement aux affirmations du COR, des syndicats et d’autres, le système est d’ores et déjà lourdement déficitaire. Comme la SNCF, le régime est équilibré après subvention de l’Etat ! (intéressante innovation au demeurant). Il y en a déjà pour 33 Milliards environ par an ![[IEMOLINARI 09/22]] lesquels sont financés par nos impôts et/ou de la dette de l’Etat, laquelle frise désormais 1,5 ans de PIB national.

Pour information le surcoût essentiellement énergétique des 6 derniers mois a coûté à la France 80 Milliards d’euros dont l’Algérie, fournisseur entre autres, a bénéficié à hauteur de 20 Milliards environ!

C’est dans ce contexte général que se pose la question des retraites qui n’est en fait qu’une recherche d’équilibre dans un système à variables multiples.

Préparer l’avenir proche : il est impératif de remettre très rapidement le système à l’équilibre

  • Pas raisonnable d’augmenter les cotisations ni des actifs ni des entreprises ;
  • Maintenir au moins le niveau de vie des actifs et des pensionnés (ces derniers ont déjà été « adaptés » de 1 % par an environ depuis une décennie ;
  • Chômage : continuer l’effort sur la réduction du chômage, surtout via l’industrialisation ; c’est un gain double : cotisations supplémentaires et allocation supprimée ;
  • Fermer progressivement les régimes spéciaux, hypercoûteux. (clause des 6 mois de référence en priorité) ;
  • Santé : aligner au moins nos services administratifs sur les meilleurs disant (France 35 % Allemagne 25 !) Arrêter les cadeaux gadgets types préservatifs ;
  • Augmenter l’âge progressivement (vers 65ans) mais en parallèle la durée de cotisation (vers 43 ans) ;
  • Introduire de vigoureuses incitations pour les entreprises à ne pas se débarrasser des vieux dès avant 60 ans, et donner à ces vieux la formation nécessaire pour faire évoluer leurs compétences avec leur faculté de travail, y compris éventuellement leur temps de travail et leur rémunération, comme en Allemagne ;
  • Pénibilité : encadrer sérieusement cette clause qui devient un échappatoire fourre-tout (quelle définition ? Physique ? Psychique ? …) Au demeurant déjà rémunérée dans les évaluations de poste et coefficients, conventions collectives etc… ;
  • Introduire une clause de révision automatique fonction de l’évolution de la durée de vie.

Préparer l’avenir à moyen terme

  • Natalité : remettre en place une politique volontariste en lien avec l’immigration et l’assimilation ;
  • Introduire progressivement une dose de capitalisation ;
  • Faire fonctionner correctement un système d’évaluation annuel surveillant l’équilibre impératif ;
  • Demander aux syndicats de devenir coconstructifs et pragmatiques et aux Français d’ouvrir les yeux, il y aurait encore le développement durable à réaliser.

 

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1 commenter

Moulin janvier 11, 2023 - 10:03 am

Rendre plus rentables le cumul emploi-retraite et les cotisations personnelles
Deux points manquants : Rendre plus rentables le cumul emploi-retraite et les cotisations personnelles

En retraite l’employé cotise sans que cela améliore sa retraite.
après les prélèvements retraites obligatoires les investissements éventuels dans des compléments par capitalisation se font après impôts, donc relativement défavorisés.

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