Dans un des chapitres de son livre « Guérir notre monde »[[Titre original du livre « Healing our world », voir chapitre 11 : « Springing the poverty trap », édition 1993 et 2003.]], l’auteur libertarienne Mary Ruwart montre par des exemples concrets que la philanthropie est plus efficace que l’État providence pour lever les freins à l’insertion dans l’emploi. Ces exemples sont aussi confirmés par les études macroéconomiques sur le sujet.
Les exemples relatés par Mary Ruwart montrent clairement que c’est la générosité et l’implication individuelle -et non pas les sommes dépensées- qui permettent la réussite des programmes sociaux quels qu’ils soient. L’auteur raconte ainsi l’histoire d’un salarié du département de la Santé américain, qui, indigné de tant de contradictions dans son travail, démissionna et créa une association qu’il nomma « Let’s get off of welfare ». Ce programme avait pour vocation d’aider les femmes à s’affranchir des aides sociales et à trouver un emploi. Six mois après sa création, le programme avait déjà aidé 500 femmes à intégrer le marché du travail et après un an, 88% d’entre elles étaient toujours en emploi. Le programme de suivi coûta moins de 700 dollars par femme alors que les programmes étatiques comparables coûtaient de 3.000 à 15.000 dollars par personne.
C’est en 1973 que fut lancé le dispositif CETA (Comprehensive Employment and Training Act), programme étatique destiné à former et placer les personnes défavorisées et sans emploi. Il fut mis en œuvre pendant dix ans et coûta au total 53 milliards de dollars, pour une dépense moyenne de 3.800 dollars par personne. Cependant, il ne réussit à placer que 15% de son public dans des emplois non aidés. Par comparaison, le programme d’initiative privée Strive, s’adressant à un public souvent plus défavorisé d’ex-délinquants ou drogués, parvint à remettre 60% de son public sur le marché du travail, pour un coût de seulement 1.500 dollars par personne. Dans le cas des toxicomanes, les autres initiatives privées furent également extrêmement performantes. À titre d’exemple, Teen Challenges -fondation pentecôtiste- obtenait dans les années 1990 un taux de réinsertion de 67 à 85%, contre un taux d’environ 10% pour les organismes publics.
Ces exemples ne sont pas exceptionnels mais sont au contraire représentatifs de la meilleure performance de l’initiative privée sur les programmes publics. D’après les estimations d’un chercheur américain[[Robert L. Woodson, Voir par exemple le début de cette étude : http://mises.org/journals/jls/21_2/21_2_1.pdf]], les frais généraux[[Salaires, achats, équipements, immobilier, etc.]] des agences publiques s’occupant de distribuer les aides sociales (en espèces ou en nature) représentent en moyenne 70% de la dépense, contre seulement 10 à 30% dans le privé. Ces pourcentages sont issus respectivement des données gouvernementales et de Charity Navigator, organisation qui évalue les performances des organisations philanthropiques.
Ces performances s’expliquent d’une part par le bénévolat dans les organisations philanthropiques, qui fait fortement baisser les charges salariales. Mais elles s’expliquent aussi par le caractère volontaire des dons effectués. Qu’ils soient en temps ou en argent, ils sont le fruit d’un arbitrage du bénévole ou du donateur entre les différentes organisations, ce qui les pousse à la performance pour continuer à recueillir ces dons.
Comme le notait récemment l’IREF, il semblerait qu’il y ait une corrélation inverse entre la générosité individuelle et l’importance de l’État providence. Sur 135 pays, la France est le 77ème en termes de générosité privée (argent et bénévolat) alors que tous les pays anglo-saxons sont dans le top 10. La dépense publique française, qui représente 57% du PIB, ne se transformera pas intégralement ni du jour au lendemain en dépense privée trois fois plus performante. Toutes les pistes (fiscales, juridiques, éducatives…) devraient cependant être explorées pour libérer la philanthropie en France.