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60 milliards d’économies… très vite

par Bernard Zimmern
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C’est sous le titre « 60 milliards d’économies oui, mais tous les ans » qu’Agnès Verdier-Molinié publie chez Albin Michel un essai sur les innombrables gâchis d’argent public qui, de la tête de l’État aux moindres communes, font que les Français sont parmi les contribuables les plus pressurés fiscalement au monde, et que l’emploi s’évapore avec les entreprises qui délocalisent ou ne se créent pas.
Cet essai est remarquable. Pour ne pas être taxé de partialité puisque j’ai travaillé avec Agnès près de 10 ans, justifions cette appréciation : il est difficile de trouver un autre inventaire aussi pénétrant et aussi exhaustif de toutes les magouilles qu’utilisent les administrations publiques pour truquer ou, peut-on même dire, escroquer les Français sur la dépense publique.

Dans cet essai, finalement assez court, écrit avec verve et qui se lit comme un roman, Agnès a condensé une expérience de reporter des multiples combines qui dissimulent la vérité aux Français.
Il est difficile de citer toutes ces histoires dans le détail, il faut les lire. Citons au hasard, à titre d’exemple comment la SNCF refuse de publier ses comptes et peut cacher l’origine d’un trou de 6 milliards sans craindre d’être dénoncée ; comment Luc Chatel, ministre dit « libéral », a refusé de publier des rapports sur l’absentéisme des enseignants et a même coupé le financement de la ville dont il est maire, Chaumont, aux écoles maternelles privées sous contrat ; l’enterrement par l’Élysée de N. Sarkozy d’un accord pour revenir sur la durée légale des 35 heures, signé par Laurence Parisot, François Chérèque et Bernard Thibault ; ou comment l’administration offre à Noël 2011 un jeu vidéo interactif à ses agents.

Ce qui est très remarquable c’est que la plupart de ces histoires ne sont pas, comme c’était le cas dans les premières années de l’iFRAP, une simple synthèse d’articles déjà parus sur le site www.ifrap.org ou dans la revue de l’iFRAP Société Civile, mais des enquêtes inédites et souvent très hautes en couleur que cet essai dévoile pour la première fois.
Et ce ne sont pas que de petites histoires, à la limite amusantes, ridicules ou tragiques, mais aussi une vue synthétique des différentes facettes de la société française où l’on retrouve la formation d’historienne de l’auteur. À la fin, Agnès n’hésite pas à chiffrer où et comment il serait possible de couper pour ramener le déficit public à celui de l’Allemagne, économiser 60 milliards, pas comme le propose l’actuel gouvernement en 5 ans, mais tous les ans.
Avoir osé cette vue d’ensemble fait que cet essai restera, vraisemblablement pour longtemps, une référence sur laquelle vont pouvoir s’appuyer non seulement les médias mais également ceux qui, dans l’exercice du pouvoir, vont être dès maintenant confrontés à la tâche redoutable de ramener le déficit dû à la dépense publique au sein des 3% acceptés par l’Union européenne.
Comment l’auteur a-t-elle fait pour conjuguer sa direction d’une fondation qui publie déjà énormément d’enquêtes approfondies, pas des opinions, avec des centaines d’émissions de radio et de télévision dans l’année, qu’il faut toutes préparer, et une vie de famille à préserver ? C’est un mystère devant lequel on ne peut qu’être admiratif.

Le seul aspect qui manque à cet essai, ou qui est seulement effleuré dans le chapitre 3 est comment en sortir, comment réduire la dépense publique. Agnès note bien que malgré tous les rapports catastrophiques sur le précipice qui nous attend, cette dépense publique ne cesse d’augmenter. Elle note bien que le ministère des finances anglais dispose, pour la même tâche que son homologue français, de la moitié des effectifs. Mais elle ne dit pas que la grande différence est que tous les hauts fonctionnaires de l’administration française et, plus généralement, tous les responsables, à quelque niveau qu’ils soient, n’ont qu’une seule idée en tête, comment contourner les règles budgétaires ou autres qui les empêchent d’accroître leurs services et leurs dépenses. Alors que chez les Britanniques, grâce à une commission du Parlement, le Public Account Committee, s’appuyant sur les travaux d’un organisme équivalent à la Cour des comptes mais rattaché au Parlement, le NAO, chaque haut fonctionnaire est assuré d’avoir à rendre compte devant l’opinion publique de sa gestion, en moyenne tous les 3 ans ; le problème de ces hauts fonctionnaires n’est plus d’accroître leur empire comme en France, mais de montrer qu’il est le mieux géré. Une dynamique qui permet à la fonction publique britannique d’être plus efficace que la française avec la moitié des effectifs. Une méthode qui nous semble irremplaçable.

 

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