Le débat entre le Président et Sophie Binet de la CGT a été l’occasion de redonner vie à divers serpents de mer dont la taxe Zucman, consistant à taxer chaque année à 2 % le capital, dont l’outil de travail, des personnes, évaluées à 1.800, dont la fortune excède 100 millions. C’est censé rapporter autour de 20 milliards par an. Injustice, mensonge et hypocrisie.
En premier lieu, cette taxe conduirait à imposer la valeur des holdings percevant les dividendes des entreprises indirectement détenues par les personnes concernées, mais non distribués à ces personnes et restant dans leurs holdings. Il s’agit donc de revenus virtuels aussi longtemps qu’ils ne sont pas distribués, alors qu’ils peuvent être réinvestis ou simplement disparaître entre temps. Bien entendu, la distribution de ces revenus, si et quand elle interviendrait, donnerait lieu à l’imposition normale des dividendes.
D’autre part, en taxant le capital comme s’il n’était que du revenu, on l’imposerait chaque année alors que le revenu distribué n’est imposé qu’une seule fois au moment de sa distribution.
En second lieu, le paiement annuel de 2% de la valeur de l’outil de travail peut se révéler impossible lorsque, situation très fréquente, les entreprises concernées ont une valeur -encore une fois virtuelle- très élevée mais, soit qu’elles ne fassent pas de bénéfices, soit que leur propriétaire les investit et ne se distribue pas de dividendes ou insuffisamment. Ce dernier se trouvera donc dans la nécessité de vendre son capital, en pratique à des étrangers. Même Bernard Arnault, No 1 français, et actuel No 5 mondial, des milliardaires avec une fortune – extrêmement variable – tournant autour de 180 milliards, ne pourrait pas dégager 2 milliards par an sans avoir à réorganiser durement son patrimoine. Notons que le chiffre de 2% n’est nullement négligeable : il conduit à une expropriation de moitié après 25 ans et totale après 50 ans…(On peut imaginer que Bernard Arnault a déjà pris ses précautions pour le cas où…)
En troisième lieu, l’argument des partisans de la taxe consistant à minimiser l’effet de départ à l’étranger des « riches » en affirmant que cet effet n’a pas été constaté de façon substantielle, est non seulement erroné (parce qu’il est fondé sur le nombre de départs et non sur la valeur des patrimoines concernés), mais surtout par ce que cette référence à l’expérience passée n’est en rien significative lorsqu’il s’agit d’évaluer les risques de la taxation de l’outil de travail, qui n’a jamais existé depuis la création de l’ISF ! Or il s’agit à l’évidence d’une innovation extrêmement importante de nature à bouleverser totalement le comportement des investisseurs et à pénaliser définitivement l’investissement des Français en France. Les partisans de la taxe ne peuvent pas l’ignorer sans une extrême mauvaise foi.
Enfin l’hypocrisie : Il y a deux motivations entendues à cette taxe, l’une officielle, l’autre réelle et non reconnue. La première peut se résumer ainsi : les super-riches peuvent bien payer tellement ils ont d’argent, et puis ils sont tellement peu nombreux et minoritaires qu’ils ne représentent quasiment rien collectivement. On vient de rendre justice à cet argument erroné et haïssable. On se rappelle le dérapage d’André Laignel s’adressant à Jean Foyer au Parlement en 1981: « Vous avez juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaire ».
La véritable motivation, c’est tout bonnement la volonté d’éradiquer les riches. Cela ne nécessite aucun raisonnement économique ni aucune justification morale. On la trouve dans les déclarations d’Oxfam par exemple : « tuer les riches ». On la trouve aussi chez Thomas Piketty, économiste contraint quand même de reconnaître dans une interview que ce n’est pas avec une telle mesure que l’on résoudra la crise financière.
Les partisans de la taxe refusent de tenir compte des avantages pour une collectivité, des fruits retirés des efforts pour s’enrichir et des gains apportés par ceux qui sont capables des croissances les plus rapides, qui ne sont possibles qu’à l’échelle mondiale. Affaiblir la dynamique d’enrichissement en France serait un élément supplémentaire pour le déclin de la France. Enfin, cette taxe n’aurait aucun effet sur le capitalisme de connivence, autre faiblesse française.
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