Le manque de business angels en France explique notre retard catastrophique en termes d’investissement dans les jeunes pousses.
Les business angels sont des personnes physiques qui investissent directement leur propre argent pour répondre au besoin de financement d’une start-up à l’occasion d’une levée de capitaux. Or, les investissements par les business angels seraient deux à cinq fois plus importants au Royaume-Uni qu’en France, et dix fois plus aux Etats-Unis.
Au Royaume-Uni, le total investi par les business angels en 2015-2016 était de l’ordre de 1 milliard d’euros. Aux Etats-Unis, les investissements par les business angels représentent de l’ordre de 25 milliards par an, soit environ 4 milliards d’euros à population égale.
En France, il n’existe pas de chiffres officiels, mais on sait que les capitaux recueillis par les réseaux de business angels étaient cette même année (2016) de 43 millions d’euros. En prenant l’hypothèse qu’ils ne représentent que 10 % de l’investissement total (ce qui est par exemple le ratio de répartition au Royaume-Uni), le total serait aujourd’hui de 400 millions d’euros. Mais cela pourrait être bien plus faible.
Une étude du Centre for Strategy and Evaluation Services estime même que la part visible serait de 70 % (et non 10 %), ce qui, si le chiffre est vrai, revient à rendre un diagnostic autrement plus grave. En tout état de cause, les diverses estimations même les plus hautes laissent à penser que nous serions très largement en deçà du milliard d’euros, même avec l’ISF-PME (désormais supprimée) dont une faible partie est investie en direct et avec des montants plafonnés.
La présence de business angels est indispensable pour le dynamisme des start-up. Un rapport de 2013 de la Cour des comptes évoque cette vérité fondamentale que « les sociétés financées par les business angels créent plus d’emplois que la moyenne des sociétés comparables et contribuent davantage à l’investissement et l’innovation ». Surtout, ils sont les seuls à pouvoir aider les entreprises à traverser la vallée de la mort du financement. Il suffit pour s’en convaincre de regarder le diagramme ci-dessous :
– La partie gauche du diagramme (capital informel) représente par tranche moyenne de capitaux les montants totaux du capital social levé à leur création par les entreprises à statut commercial en 2004. Ces chiffres ont été produits par une étude exclusive du PH Group, l’Insee ne produisant malheureusement pas ce type d’étude. Cette étude est la dernière en date.
– La partie droite représente les capitaux investis par les adhérents de l’Afic – association regroupant les principaux fonds de capital-risque – en 2008 (chiffres non perturbés par la crise puisque les effets s’en sont ressentis en France seulement en 2009).
Capital informel levé à la création et capital investissement: entre les deux la « vallée de la mort »
Sources: pH Group, Afic.
Les capitaux recueillis à la création atteignent environ 4 milliards d’euros : ce sont les montants investis en général par les proches, la « love money », mais qui, comme on le voit sur le schéma, dépassent rarement la centaine de milliers d’euros par entreprise. Le capital investi par le capital-risque atteint quant à lui environ 10 milliards d’euros, mais pour des besoins en capitaux très rarement inférieurs au million d’euros par entreprise.
On constate donc que s’il n’y a pas de business angels pour des besoins de financement intermédiaires, cela revient à programmer la mort ou la stagnation des entreprises à fort potentiel de croissance. C’est pourquoi on appelle ce passage difficile entre la « love money » et le capital – risque la « vallée de la mort ».
En abscisse : « montants levés »
En ordonnée : « développement de l’entreprise »