Il est toujours utile de rappeler une définition de base. L’inflation consiste en une augmentation du niveau général des prix sur le long terme. La notion de prix doit comprendre les prix des biens et services offerts, aussi bien que ceux du travail et du capital. Il s’agit des prix d’un pays en tant qu’il est associé à une monnaie, mais en Europe, on continue à privilégier les niveaux de prix de chaque pays dans la mesure où les politiques économiques divergent.
Pourquoi est-ce important ?
C’est important parce que le prix de l’immobilier constitue une part importante des dépenses des ménages, et de la valeur ajoutée dans le PIB (BTP, bureaux, services) et parce qu’ils sont particulièrement dépendants de l’activité économique globale. De plus l’immobilier est représenté par un ministère chargé de veiller à son équilibre. Et de ce point de vue on s’attache à suivre l’évolution du prix de l’immobilier et des loyers.
Peut-on être plus précis ?
Pour les ménages propriétaires, l’immobilier peut prendre plusieurs orientations :
– lorsqu’il l’occupe sur le long terme, c’est un bien de « consommation » avec un prix d’achat, un prix de revente, des frais d’entretien, de la fiscalité, des remboursements… Aux Etats-Unis, dans la mesure où une construction a une durée de vie d’environ trente ans on considère que le placement se fait plus dans le terrain que dans l’immeuble. En France, la résidence principale est rarement démolie. Il convient donc de bien nuancer l’orientation économique d’un bien immobilier.
– Le ménage qui achète un bien immobilier pour le louer constitue un « investissement » comprenant un revenu avant impôts, des coûts d’amortissements d’emprunts, des charges et des travaux. Quand il achète, il anticipe sur le long terme des loyers réguliers lui garantissant une rentabilité calculée par le rapport entre le revenu annuel net, c’est-à-dire les loyers, et le prix d’achat.
– Le ménage qui achète un bien sans le louer, ni l’occuper, fait des anticipations de fortes hausses de prix permettant une plus-value à la revente. Il s’agit alors d’un placement spéculatif. Bien entendu, la réalité se compose souvent de combinaisons de ces trois scénarios. Puis la vie de l’investissement peut prendre des orientations différentes. Dans le cas d’une baisse des prix du mètre carré dans une ville peu dynamique, le taux de rentabilité peut devenir très élevé car l’évolution des loyers reste stable.
La crise économique provoquée par le choc des mesures sanitaires contre la Covid-19, conduit à se reposer la question de l’inflation et des prix de l’immobilier. A partir des trente glorieuses, les prix de l’immobilier ont connu, globalement, et régulièrement, des hausses de prix supérieures à celles des autres prix de consommation courante et des salaires. Et cela au profit des ménages qui ont revendu leurs biens.
En 2021, en France, peut-on anticiper une hausse des prix de l’immobilier continue et supérieure à celle de l’inflation globale ?
Se poser une telle question impose d’abord de faire le point sur la situation de l’immobilier en France. Les professionnels de l’immobilier ont toujours dit que ce qui explique la valeur d’un bien, c’est 1 : sa localisation, 2 : sa localisation, 3 : sa localisation. Il semblerait que ce soit toujours vrai avec un marché qui ne connait plus que des spécificités. Affaissement des prix dans les zones touchées par la désindustrialisation et le chômage, dans les villes peu dynamiques, ou dans les quartiers qui n’ont pas bonne réputation.
Il y a aussi des cas particuliers comme par exemple dans certaines stations de ski, des grands immeubles construits dans les années 70 qui subissent une gestion déplorable avec absence de travaux, impayés, etc. Dans certaines villes, on a pu constater des stocks importants de nouveaux immeubles invendus qui s’expliquent par des erreurs de prévision ou de gestion faites par des investisseurs privés (habitations ou bureaux) ou par l’administration des HLM à cause des zonages des aides et des prix plafond des HLM. On peut également citer, des offres excédentaires de maisons individuelles dans certaines grandes banlieues en raison de l’accroissement du coût des transports quotidiens (cf. les gilets jaunes).
A l’autre extrémité, les centres des belles villes se portent plutôt bien grâce, entre autres, à la mondialisation et aux « très riches ». Pour plusieurs raisons il devient de plus en plus difficile de construire du nouveau dans nos grandes villes (choix politiques, normes, préférence pour les bureaux, gestion des surfaces publiques, …) et ce malgré l’émigration vers les villes moyennes. Mais dans les banlieues des villes dynamiques bien desservies par les transports publics, en termes de durée et non pas de distance, il y a toujours une demande supérieure à l’offre avec de plus en plus de grands projets qui finiront par se traduire par un équilibre sur la base de prix de vente fonction de la distance et de la durée de transport entre le site et le centre-ville.
Dans les villes où la demande est forte, on constate depuis plusieurs années, une hausse des prix dans des quartiers que l’on qualifiait de « populaires », grâce à des relookages complets des immeubles, à l’intérieur et à l’extérieur, avec pour cibles les jeunes générations bien positionnées sur le marché du travail. Il s’agit là de phénomène d’embourgeoisement et on pourrait s’attendre à d’autres évolutions de ce type comme sur le marché du tourisme. Il y a également des stocks de bureaux transformables en appartements.
Et pour conclure ?
Il s’agit donc de changements importants de l’environnement du marché. Sur le long terme on pourrait retenir :
-l’évolution de la démographie ;
-l’organisation de la famille ;
– les mouvements vers les villes moyennes ;
– les évolutions des goûts liées à la mode ;
– les nouvelles conditions de travail à distance avec l’esprit start-up ;
– l’impact des normes techniques et des politiques du logement…
Aujourd’hui, le marché de l’immobilier est complètement segmenté. On ne peut donc plus parler du prix mais des prix de l’immobilier. Une augmentation de prix dans certains segments de l’immobilier restera un signe d’une offre insuffisante. A ce sujet, les promoteurs immobiliers hésitent souvent à se lancer dans de nouveaux projets privés car les investisseurs potentiels estiment que la rentabilité d’un bien immobilier en location devrait être supérieure à 2,5 %. En toute rigueur une politique de développement s’impose. « Malheureusement, La recherche d’une « récupération » des plus-values que l’administration pense causée par les investissements publics (alors qu’elle résulte surtout de la rareté due aux pesanteurs administratives) et le blocage des loyers entrave le marché en en excluant les jeunes … d’où la nécessité de leur construire des HLM supplémentaires » (Jean-François Bauer. Voir également l’article sur la règlementation immobilière).
Alors le débat entre l’efficacité du marché et une gestion de plus en plus présente par l’administration risque de repartir d’autant plus que la relance souhaitable (400 000 nouvelles constructions par an) d’après crise sanitaire risque d’être difficile car on constate depuis quelques mois de fortes augmentations des prix du ciment, de l’acier, des ferrailles, causées par des exportations vers la Chine et vers les Etats-Unis où le bâtiment se porte plutôt bien. La nationalisation rampante à la française est donc soumise aux conditions du marché mondial, ce qui ne simplifie pas la tâche de nos gouvernants !