La France peut-elle être en faillite, comme l’ont été en leur temps la Grèce et l’Argentine ? C’est à dire dans l’incapacité d’assurer une échéance de ses emprunts.
Cette menace est brandie implicitement par nos élus et responsables politiques lorsqu’ils nous disent que notre dette de plus de 3000 milliards, qui ne cesse de croître avec nos déficits publics, n’est plus supportable. Et le message tambouriné à foison semble être enfin passé auprès de la population. Ils ont raison.
Car la charge de la dette, c’est-à-dire les intérêts à payer, est devenue l’un des principaux postes du budget de l’État juste derrière l’Éducation Nationale et la Défense. Elle dépasse les 50 milliards et pourrait atteindre les 70 milliards en 2027. C’est autant qui ne peut être utilisé pour d’autres dépenses plus utiles : la recherche, l’innovation, la transition écologique, etc.
La France, c’est-à-dire nous tous les Français représentés par l’État, continue d’emprunter et de s’endetter davantage chaque année, non pas pour financer ses investissements préparant l’avenir, ce qui serait parfaitement normal, mais pour assurer ses fins de mois, c’est-à-dire payer les fonctionnaires, les loyers des locaux occupés par les administrations, les retraites des fonctionnaires dont le déficit à lui seul est de 30 milliards par an, etc.
Cette situation complètement anormale nous met en porte-à-faux vis-à-vis de tous nos partenaires européens beaucoup plus vertueux, nous décrédibilise, et nous affaiblit dans nos négociations internationales.
Mais malgré tout, les prêteurs nous prêtent encore et toujours de l’argent ! Même si notre note financière est dégradée et si cela nous coûte plus cher. Et ils continueront de le faire ! Pourquoi ?
La préoccupation première de tout prêteur, avant même de savoir si cela va lui rapporter quelque-chose, et donc à quel taux d’intérêt il va prêter, est de savoir s’il va pouvoir récupérer son argent. Qu’en est-il de ceux qui prêtent à la France.
Et là, il faut faire la distinction entre l’État d’une part, et les Français d’autre part.
Les prêteurs ne sont pas dupes, ils savent très bien que l’État français est cigale et qu’il dépense plus que ce qu’il encaisse, ce qui n’est évidemment pas supportable à long terme. Mais ils savent aussi que les Français sont fourmis, et qu’ils épargnent beaucoup.
Le taux d’épargne des Français est l’un des plus élevés d’Europe. Il est supérieur à 17% des revenus en 2024. Il est de 13,1% en Espagne, de 12,9% en Italie, mais de 20,0% en Allemagne.
En 2023, les Français ont épargné 84,9 milliards.
L’encours, c’est-à-dire le montant déposé sur les Livrets A et les Livrets de Développement Durable (LDD) s’élève à 584,4 milliards. Celui sur les Livrets d’Épargne Populaire (LEP) à 77,6 milliards. Le nombre de titulaires de LEP est passé de 9,5 millions en mars 2023 à 11,5 millions en mars 2024. Les Français craignent pour leur avenir et mettent de l’argent de côté.
L’épargne favorite des Français est l’assurance-vie. A fin septembre 2024, l’encours déposé en assurance-vie s’élève à 1.977 milliards, en augmentation de 5,4% sur 1 an.
C’est sur ce matelas des Français que les prêteurs fondent leur confiance. Si l’État était en incapacité de faire face à ses échéances, que ferait-il ? Ou que serait-il contraint de faire par les instances financières internationales : piocher dans l’épargne des Français !
Ô certes, l’État ne va pas nous voler notre argent. La Constitution ne le lui permet pas, et la législation protège les avoirs bancaires et autres. Mais celles-ci ont toutes un corollaire : « sauf en période de crise sévère ».
Et de toute évidence, si l’État devait être en situation de faillite, ce serait bien une crise sévère. Et en ce cas, il dispose de différents moyens pour geler les avoirs et les utiliser à son profit.
Et les prêteurs connaissent la capacité extraordinaire de l’État français à instaurer et mettre en œuvre très efficacement sa fiscalité et autres mesures de prélèvements.
Alors gare ! Que préférez-vous ? Maintenir voire retarder encore un peu l’âge de départ à la retraite ? Ou voir votre épargne gelée et ponctionnée ?
Hélas, aucun homme politique n’a osé poser la question en ces termes. Sans doute la dramaturgie absurde de l’âge de la retraite serait-elle vite dégonflée.
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