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La crise du logement en France  !

par Jean-François Bauer
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La France est le seul pays européen où la crise du logement est endémique depuis un siècle …et elle vient de s’aggraver fortement !

    I) On ne construit plus assez de logements en France.

  • les interdictions se multiplient : en périphérie des villes, en bordure des forêts et des rivages, autour des monuments, en hauteur en ville et maintenant pour stopper « l’artificialisation des sols » ;
  • les prescriptions contradictoires des différents codes peuvent bloquer un projet, par exemple accès handicapés larges contre ouvertures étroites des monuments historiques ;
  • les permis de construire sont de plus en plus longs à obtenir ;
  • les normes augmentent la surface à construire par logement (accès handicapés…) ;
  • les mesures de protection et les normes techniques augmentent le coût au m2 construit (multiples assurances et garanties, sur-isolation….) ;
  • les taxes sur la construction se multiplient, plus-value sur la vente du terrain, taxe locale d’équipement, redevance d’archéologie, taxe sur les contrats d’assurance, TVA à 20%, obligation d’un % de logements sociaux vendus en dessous du prix de revient dans les programmes de construction privés ;
  • la « servitude de mixité sociale » instaurée par la loi SRU permet d’imposer jusqu’à 100% de logements sociaux sur une parcelle privée à l’occasion d’une rénovation importante ou d’un changement de destination ; la ville de Paris a ainsi « pastillé » 615 parcelles dans le PLU 2024. Cela  équivaut à une expropriation partielle ou totale  sans indemnité : ces parcelles seront en fait figées dans leur état actuel ;

Ainsi les prix de vente du m2 de construction neuve augmentent plus vite que le revenu moyen.

   II)   Les rapports locatifs sont déséquilibrés au détriment des bailleurs privés :

  • par des obligations à charge du bailleur avant location sous peine de sanctions (diagnostics, normes…) ;
  • par le blocage des loyers qui, amenuise la rentabilité du fait de la hausse des charges et taxes ;
  • par les blocages à la vente qui transfèrent une partie de la valeur du local au locataire (droit de préemption, allongement des baux de la loi ALUR …) ;
  • par la mise en place progressive du « permis de louer », dont les bailleurs publics sont exemptés et maintenant par des interdictions de louer liées au DPE!
  • par des taxes plus élevées ou spécifiques aux bailleurs privés, TVA à 20% sur le neuf, IFI, taxe sur les logements vacants… ;

III) La France est une nation de propriétaires ; l’étude INSEE/SDES de 2017 indique que sur 28,6 Millions de résidences principales :

  • propriétaires occupants, 16,5 millions, soit 58% contre 11,2 millions et 54% en 1987 ;
  • parc locatif privé, 6,5 millions, soit 23% contre 5 millions et 24% en 1987 ;
  • parc locatif social, 4,9 millions, soit 17% contre 3,2 millions et 15,4% en 1987 ;

Soit de 1987 à 2017 une hausse de 30% du parc privé et de 53% du parc social (+1,4%/an).

Si la croissance du parc locatif privé est bloquée, le parc « administré » sera bientôt majoritaire.

La France est le pays le plus dirigiste en matière de logement, aussi bien pour la construction que pour l’utilisation des logements et aussi le pays dans lequel le pourcentage de logements publics est le plus élevé ; le dirigisme serait-il la principale cause de la crise du logement ?

Cela fait des années que les professionnels du logement tentent de faire comprendre aux pouvoirs publics et à l’administration que face à l’instauration simultanée d’un blocage des recettes, de nouvelles contraintes techniques assorties d’un futur « permis de louer » et d’une augmentation des charges et des impôts, l’investisseur de bon sens comprend qu’il doit d’abord cesser d’investir dans le logement locatif et, dans la mesure du possible, se dégager de ses investissements antérieurs.

Comme toujours les pouvoirs publics, certains de mieux savoir que tout autre ce dont le pays à besoin, n’ont tenu aucun compte des avertissements des professionnels. Maintenant que la crise est là, il parait qu’elle aurait été causée par la hausse des coûts de l’énergie, l’inflation et la hausse des taux d’intérêt résultant de la guerre en Ukraine ! C’est en partie vrai pour la construction neuve mais ce n’est pas à cause de la guerre que 40% des propriétaires bailleurs privés ne remettent pas en location les logements devenus libres après le départ des locataires.

Un récent rapport sénatorial a mis en évidence la responsabilité de la réglementation dans la baisse brutale de l’offre de logements à louer dans les métropoles. L’administration a commencé à réagir, mais sans se désavouer : pour corriger l’effet néfaste d’une réglementation, il ne s’agit pas de l’annuler mais, soit de la suspendre temporairement (par exemple pour ma primrenov du 15 mai au 31 décembre 2024), soit de la perfectionner par un supplément de réglementation (par exemple pour le DPE des petites surfaces), soit en étendant le domaine d’action du secteur public pour remplacer le secteur privé qui a été paralysé (par exemple le développement annoncé du « logement intermédiaire » destiné à une clientèle ayant un niveau de revenu qui lui permettrait de louer à un  bailleur privé).

Face à cette nationalisation rampante du logement, il y a peu d’espoir que les mesures « libérales » que nous proposons depuis 2015 voient le jour ; en voici à nouveau la liste :

Pour sortir du cercle vicieux de l’étatisation du logement il faudrait  :

  • abroger les mesures de blocage de la loi ELAN, les 25% de logements sociaux et la servitude de mixité sociale de la loi SRU 
  • rééquilibrer les rapports bailleurs-locataires ;
  • libérer la constructibilité en revenant à des règles de volume, de prospect et de viabilité raisonnables ;
  • confier la délivrance des permis de construire aux intercommunalités et généraliser effectivement les délais limite de réponse ;
  • baisser le coût de la construction par l’allègement des normes et des taxes ;
  • égaliser la fiscalité entre la construction privée et le secteur social ;
  • supprimer l’aide à la pierre dans la construction neuve ;
  • regrouper les offices d’HLM et financer la construction de nouveaux logements par la vente des anciens aux occupants ;
  • appliquer les surloyers et les fins de bail pour libérer des logements sociaux ;
  • réserver les logements sociaux disponibles à ceux que l’aide à la personne ne suffit pas à solvabiliser, (il n’y a plus de raison aujourd’hui de réserver en priorité des HLM pour les fonctionnaires) ;  
  • alléger l’imposition des loyers d’habitation sur le modèle Belge pour permettre la mobilité géographique des propriétaires ;
  • pour la rénovation des logements existants laisser faire les choix techniques par les professionnels et les propriétaires au lieu de leur imposer une coûteuse rénovation globale surveillée par un « accompagnateur rénov », afin que la décision de rénover résulte d’un intérêt économique et pas d’une contrainte administrative.

Conséquences sur l’emploi :

  • 100.000 logements neufs de plus par an représenteraient 150 à 200.000 emplois (possible en 3 ans) ;
  • chaque rénovation supplémentaire de logement ancien crée environ un emploi-an par logement ;
  • faciliter la mobilité géographique des propriétaires permettrait la diminution des emplois non pourvus pour cause d’éloignement du domicile ;

Conséquences budgétaires

Si les administrations cessaient d’empêcher les investisseurs privés de s’intéresser au logement, d’empêcher les architectes de construire, d’empêcher les propriétaires de louer, et prenaient l’engagement de le faire durablement, elles économiseraient une grande part des 45 milliards annuels de dépense publique pour le logement et bénéficieraient de la relance d’un secteur économique créateur d’emplois peu délocalisables.

Petit lexique pour les non initiés :

DPE=diagnostic de performance énergétique qui conditionne des interdictions de location programmées dans les années à venir ; devenu « opposable » il l’emporte sur la consommation réelle constatée !

PLU=Plan Local d’Urbanisme, rassemble les contraintes d’urbanisme et les autres servitudes imposées sur le territoire de la commune.

Loi SRU = loi du 13/12/2000 « solidarité et renouvellement urbain »qui a augmenté à 20% le % minimum de logement sociaux, complétée par la loi ENL du 13/07/06 (Engagement National pour le Logement) qui a institué la servitude de mixité sociale ; le % mini de logements sociaux a été ensuite porté à 25%.

Loi ALUR du 24/03/14 (portant Accès au Logement et un Urbanisme Rénové) qui a instauré l’encadrement des loyers, ensuite rétabli par la loi ELAN (Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) du 23/11/18 et accru le droit de préemption des communes sur les ventes immobilières.

Sur les 45 Milliards d’aide au logement, il faudrait à priori conserver l’Aide Personnalisée au Logement (APL) environ 15 Milliards et supprimer le reste, l’aide à la pierre qui fait doublon.

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