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L’accord européen sur le plan de relance de 750 milliards d’euros :

par Philippe Baccou
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L’accord conclu le 21 juillet par le Conseil européen sur un plan de relance européen de 750 milliards d’euros (390 milliards de subventions, 360 milliards de prêts) a été immédiatement présenté par Emmanuel Macron comme un succès majeur de la politique européenne de la France.
Qu’en est-il au juste ?

1) 750 milliards d’euros, c’est environ 6 % du PIB annuel des 27 États membres.

Mais ces moyens financiers ne seront pas mis à disposition immédiatement : l’octroi des subventions s’étalera ainsi sur trois ans (2021-2023), avec des paiements pouvant aller jusqu’à fin 2026. L’apport du programme de relance européen serait donc au plus de l’ordre de 2 % du PIB par an de 2021 à 2023.
Ces montants financiers sont à comparer avec ceux déjà annoncés et engagés par la plupart des États membres de l’Union pour contrer les effets économiques de la crise du coronavirus : de l’ordre de 5 à 10 % du PIB par an en 2020-2021, avec pour conséquence une hausse de 15 à 20 points du taux d’endettement public de ces pays.
Les actions nécessaires pour protéger les économies européennes des effets du coronavirus devaient être rapides et massives. Elles ont été d’abord menées par les États et, ensuite, par les banques centrales, y compris la Banque centrale européenne. Il était inutile d’employer pour cela le budget de l’Union européenne, avec un plan de relance tardif et d’ampleur limitée.

2) Sur les 750 milliards d’euros, 360 sont des prêts,

qui seront souscrits par l’Union européenne et remboursés à celle-ci par chaque État bénéficiaire pour la part qu’il aura empruntée.
La France, au lieu d’emprunter directement sur les marchés financiers comme elle le fait habituellement, pourrait ainsi s’approvisionner par l’intermédiaire de la Commission européenne. Mais ce détour serait pour elle parfaitement inutile.
Le seul avantage de cette procédure d’emprunt groupé serait, pour certains pays de l’Union comme la Grèce, d’éviter de payer des intérêts plus élevés si les marchés financiers, à tort ou à raison, considèrent que leur dette est plus risquée que celle d’autres pays. Mais cela ne ferait que reporter ce risque sur l’Union européenne elle-même qui, du coup, emprunterait un peu plus cher. Cela coûtera peut-être moins cher à l’État grec d’emprunter par l’intermédiaire du budget européen que d’emprunter par lui-même, mais cela ne coûtera pas moins cher aux Européens dans leur ensemble.
Le principe de l’emprunt budgétaire européen, tel qu’il a été accepté par l’accord sur le plan de relance de 750 milliards d’euros, c’est de permettre aux États membres déjà très endettés de continuer à emprunter à bon marché sans véritable contrôle. C’est un très mauvais service rendu à toute l’Europe, y compris aux États les plus endettés. Si cela se généralise, cela ne peut que ruiner la confiance des prêteurs et des épargnants vis-à-vis de l’Union européenne elle-même. Au lieu de rester attractive pour les épargnants, l’Europe les fera fuir : au lieu d’être comme une grande Allemagne, comme le rêve Mme Merkel, elle deviendra comme une grosse Grèce.

3) La vraie nouveauté, c’est le reste des 750 milliards :

390 milliards de subventions du budget européen qui viendront s’ajouter, très temporairement, aux subventions actuelles (PAC, fonds structurels, aides à d’autres pays, etc.)
Quel impact pour la France ? Emmanuel Macron veut jouer les illusionnistes : cela va nous rapporter 40 milliards de plus sans que cela ne coûte rien aux Français. Pur mensonge. Voici la réalité :
– Selon les évaluations du Gouvernement français lui-même, la part revenant à la France dans les subventions du plan de relance européen serait de l’ordre de 40 milliards d’euros, soit environ 10 % du total (40 / 390).
– Sauf s’il est décidé de lever de nouvelles ressources spéciales, les dépenses nouvelles du budget européen, d’abord couvertes par l’emprunt, seront financées par les États membres, lors du remboursement de cette dette, au prorata de leur revenu national brut (RNB), grandeur dont la définition est proche de celle du PIB. En 2018, le RNB de la France a représenté environ 18 % du RNB de l’Union européenne à 27 (sans le Royaume-Uni). La France est donc appelée à financer les 390 milliards de subventions nouvelles par une contribution au budget européen (en clair, un impôt supplémentaire) de 390 x 18 % = 70 milliards d’euros.
– Mais ce n’est pas tout. Au cours de la négociation dans laquelle Macron a fait le forcing pour obtenir les 390 milliards de subventions du plan de relance européen, les pays dits « frugaux », pour se laisser convaincre, ont réclamé et obtenu que soient maintenus ou augmentés les rabais sur leurs contributions au budget européen. Cinq pays (Danemark, Allemagne, Pays-Bas, Autriche, Suède) bénéficieront de ces rabais pour un total de l’ordre de 53 milliards d’euros sur la période 2021-2027 du prochain budget européen pluriannuel.

Le financement de ces cadeaux à certains pays membres sera supporté par chaque État membre au prorata de son RNB. Pour la France, cela représente une contribution supplémentaire de 53 x 18 % = environ 9,5 milliards d’euros.

Récapitulons.

Si la France décidait et finançait toute seule un plan de relance supplémentaire de 40 milliards d’euros, cela ne lui coûterait que 40 milliards à emprunter sur les marchés financiers.
Avec le plan européen voulu par Emmanuel Macron, ce même programme de 40 milliards d’euros coûtera potentiellement à la France 70 + 9,5 = près de 80 milliards d’euros, c’est-à-dire deux fois plus.
Pour éviter cette conclusion embarrassante, Macron cherche à noyer le poisson. Il nous explique que tout cela va être financé par de nouveaux impôts européens (taxe plastique, taxe sur les Gafa, taxe carbone aux frontières, etc.) qui ne coûteraient pas un centime aux Français.
L’ennui, c’est que, à l’exception de la taxe plastique, ces fameuses nouvelles taxes restent aujourd’hui purement virtuelles. Rien ne dit qu’elles verront le jour. Et même si elles sont créées, rien ne permet de prétendre que, comme par miracle, elles ne pèseraient pas sur la France et sur les Français, que ce soit directement par l’impôt ou indirectement par le pouvoir d’achat. Pour la taxe plastique, par exemple, c’est le contraire qui est vrai. Comme l’indique clairement le journal Les Échos dans un article bien documenté (23 juillet 2020) : « La nouvelle taxe plastique va coûter cher à la France » qui « devrait être l’un des plus gros contributeurs », sinon « le plus gros contributeur » à raison de « 1,3 à 1,4 milliard d’euros par an ».

Pour le seul plaisir de se faire applaudir par les bureaucrates et les partisans du super-État européen, Emmanuel Macron a ainsi gravement nui à son pays en lui faisant payer 40 milliards de dépenses de relance deux fois plus cher que ce que cela devrait coûter réellement à la France.

 

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