Page d'accueil Études et analyses Débat : faut-il réindustrialiser la France ? – Partie 2

Débat : faut-il réindustrialiser la France ? – Partie 2

par Bernard Zimmern
182 vues
arton778.jpg

Il existe un vrai problème, celui du manque de création d’entreprise en France. Mais pour Bernard Zimmern, vouloir réindustrialiser la France, c’est créer une problématique inutile alors qu’il y en a bien d’autres qui nécessitent notre attention.

Pour lire le début du débat, cliquer ici

Pourquoi vouloir réindustrialiser la France est-ce créer une problématique inutile ?

1. Parce qu’il n’y a de problème que s’il y a une solution. Or, si l’on sait ce qu’il manque pour permettre à la France de créer plus d’entreprises, personne n’a encore sorti une solution viable pour faire que ces entreprises soient des entreprises de fabrication et pas de service. L’échec de l’État avec ses plans machine-outil, ses plans calculs, etc., a montré que ces interventions étaient pires que le mal.

2. La seconde raison est qu’avant d’espérer une réindustrialisation, il faut deux conditions qui ne seront pas remplies avant des années et au-dessus desquelles les avocats d’une ré-industrialisation sautent à pieds joints. La première condition est que la mère de toute fabrication est le secteur de la machine-outil, et celui-ci a pratiquement disparu en France. Cela a été parfaitement documenté dans les dossiers de l’iFRAP. La seconde condition est qu’il n’y a pas de fabrication sans une main-d’œuvre de techniciens extrêmement bien formés. Par exemple, pour faire une machine-outil, il faut faire des surfaces planes et ces surfaces doivent être finies au grattoir dans le centième de millimètre ; il faut 10 ans pour former un bon gratteur. Dans l’état de décomposition où se trouve l’apprentissage en France, il n’y aura pas d’apprentis formés tant que leur formation ne sera pas reprise en main par les industries et enlevée à l’Éducation nationale. Nous en sommes à des années-lumière.

3. La désindustrialisation est aussi un faux problème car elle s’appuie sur des chiffres qui ont perdu une grande partie de leur signification. À l’heure actuelle, des cuisiniers sont des professionnels qui, de plus en plus, nécessitent une haute qualification et qui sont comptés dans les services alors qu’ils fabriquent littéralement la nourriture ; et l’on peut multiplier ces exemples. On peut en sens inverse noter que les industries de fabrication d’automobiles sont de plus en plus des spécialistes derrière un ordinateur utilisant des programmes de dessin comme ceux conçus par Dassault Systèmes et que la main-d’œuvre de fabrication est partie dans des pays en voie de développement. En face des exportations d’automobiles ou d’avions, il faudrait mettre les milliards de composants importés des pays étrangers.

4. Quant à la balance des comptes, il existe d’autres explications qu’un déficit d’exportations de produits manufacturés. La plupart des pays en déficit sont aussi ceux qui importent ou importaient la plus grande partie de leurs hydrocarbures. Le gaz de schiste est d’ailleurs en train de modifier la balance des comptes américaine. Et l’on peut aussi se demander comment ont été classés tous ceux qui travaillent à réaliser des forages, services ou fabrications.

Un débat sur la ré-industrialisation n’est cependant pas totalement inutile s’il permet d’abord de comprendre pourquoi nous en sommes là, pourquoi en particulier, la mère de tout produit manufacturé, l’industrie de la machine-outil, a virtuellement disparu. La série d’articles dont celui sur le rôle de l’Etat jette un peu de lumière sur les causes d’échec de nos politiques industrielles.

On pourrait la compléter en rappelant que l’un des organismes qui a le plus contribué à la désindustrialisation est l’ANVAR – et maintenant la BPI qui est son prolongement – car l’ANVAR nous a fait croire pendant des années que l’innovation était ce qui est couvert par un brevet, que l’innovation est d’origine technologique, alors que, comme les entreprises allemandes l’ont bien montré, l’innovation est d’abord du marketing, quoi développer et fabriquer qui rende un service accru à l’utilisateur.

Mais pour commencer, comment peut-on espérer voir se développer des fabrications et l’innovation dans un pays dont le Parlement et l’administration croient encore que l’innovation peut être financée par un organisme public dont le personnel a un quasi statut de fonctionnaire ?

 

arton778.jpg

Tu pourrais aussi aimer

3 commentaires

Léopold Sax octobre 30, 2016 - 9:41 pm

Colbert a enfin trouvé son Maitre
Bravo Bernard … Mais les mythes ont encore la vie dure!!

Répondre
Picsou 75 octobre 31, 2016 - 11:24 am

Faire que l'initative privée supplante l'initiative publique !
La seule vraie réponse, pour l'industrie comme pour le reste, est de faire en sorte que l'initiative privée se développe. Actuellement, c'est de moins en moins intéressant d'investir, de prendre des risques. La fameuse balance risque/rentabilité est cassée ! Je suis patron de pme depuis 1985, et j'ai vu cette évolution inexorable , pour arriver aujourd'hui à un niveau où on n'investit plus (malgré les taux bas) et pour certains comme moi, on arrête ! Quand les bureaucrates qui nous gouvernent auront compris cela, on verra, mais ça n'en prend pas le chemin !

Répondre
lisette mwika décembre 24, 2016 - 8:32 am

Débat : faut-il réindustrialiser la France ? – Partie 2
Oui pour moi il le faut vraiment. C’est capitale pour les français et les expatriés.

Répondre

Laissez un commentaire

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d’accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accepter En savoir plus

Privacy & Cookies Policy