Pour arrêter la France, il faudrait qu’elle soit en mouvement. Or celle-ci s’est arrêtée il y a déjà de nombreuses années en concrétisant le partage du travail dans la loi des 35 heures et ses diverses séquelles. Le passage de Monsieur Mitterand au pouvoir à joyeusement inauguré une sorte de distribution générale des récompenses anticipées par l’abaissement de la retraite de 65 à 60 ans et l’attribution d’une cinquième semaine de congés payés. Complété par les efforts de Lionel Jospin qui lui institua les 35 heures pour tout le monde ainsi que les fameux RTT (ie bien souvent plus d’une semaine de congés payés supplémentaires d’un coup !) la France s’est retrouvée tout à coup dans une inflation incontrôlée de ses coûts salariaux alors que par comparaison l’Allemagne et l’Angleterre maîtrisaient mieux leurs charges pour lutter contre la mondialisation qui allait provoquer la création de l’usine du monde : la Chine. À noter que pendant cette période personne ne s’est réellement soucié de l’évolution de la productivité qui aurait seule pu justifier économiquement ces cadeaux.
Pour faire bonne mesure et par malchance, la crise de la COVID a parachevé les conséquences de ces décisions en immobilisant, la France comme les autres pays du monde, pendant presque deux ans. Cette période révolue, les Français ont tout de même pris conscience que l’on ne pouvait pas dépendre des autres indéfiniment et pour tout, que la désorganisation mondiale en particulier énergétique produisait une inflation incontrôlée et qu’il fallait s’atteler à réparer les dégâts. Ils se sont donc mis quelque peu au travail et la fin de l’année 2022 se présentait comme plutôt favorable.
Las, en faisant les comptes, d’aucuns se sont aperçus que le financement des retraites, devenues progressivement un énorme budget, en permanence sous perfusion de l’État, nécessitait un certain nombre de réformes. C’est alors que la NUPES, accompagnée par l’ensemble des syndicats décide, non seulement de contrer globalement ce dossier mais en plus délibérément, d’arrêter la France.
C’est certainement au moment où l’inflation finit tout de même par exploser qu’il faut s’arrêter au bord de la route et bloquer un système qui l’est déjà ! On jette les pelles aux orties au moment où il faudrait se retrousser les manches.
Et pourtant, nous avons sous les yeux un exemple vivant de ce genre de politique : la médecine. Ce poste de dépenses, comme celui des retraites, suit l’évolution de la démographie. Le marché de la médecine, c’est la jeunesse et la vieillesse essentiellement. Le nombre de jeunes baisse un peu, mais celui des personnes âgées augmente lui très vite. En parallèle la complexité des soins augmente. Au total les dépenses de santé explosent et quelqu’un ayant remarqué que d’aucuns abusaient de l’usage de la médecine inventa la limitation des coûts par la limitation de l’offre : ce fut la fameuse invention du numerus clausus en 1980. (La formation du nombre de médecins a été quasiment divisée par deux entre 1987 et 2004). Comme il faut environ une dizaine d’années pour former un médecin nous sommes en train de payer ces années creuses de recrutement. Dans les années 2005 cette politique été quelque peu adaptée mais pas forcément suffisamment semble-t-il. Ceci a été complété par un durcissement de la tarification des soins et a donc entraîné en parallèle une moindre attractivité de la profession par les jeunes ainsi qu’un moindre engagement (disponibilité, visites, urgences etc …) Résultat général : les déserts médicaux et l’explosion des délais.
Examinons maintenant quelque peu le problème des retraites.
Évacuons a priori la question des réserves : nous n’en avons pas ou très peu. Considérons par ailleurs que la fiscalisation rampante et progressive des déficits ne peut pas être la bonne solution. Ce n’est pas au moment où l’on essaye de redonner un peu d’attractivité à l’économie française et d’oxygène aux entreprises en particulier industrielles que l’on va de nouveau réaugmenter les charges que l’on a un peu allégées au prix d’énormes efforts.
Ayons le courage de regarder l’avenir, c’est-à-dire démographie de la France, en face :
Les naissances de l’année dernière ont été inférieures à 700 000 alors que la France oscillait plutôt entre 800 et 900 000. De plus cette fois-ci la tendance semble continue. Encore trois ans et nous serons à 600 000 ! Ce qui signifie inexorablement (sauf à combler l’écart par l’immigration laquelle pose on ne sait d’autres questions) que dans une vingtaine d’années des générations de 800 000 actifs partiront à la retraite en n’étant remplacé que par 600 000 personnes entrant sur le marché du travail et dans la catégorie des actifs. On se trouvera donc en pénurie d’actifs (exactement comme aujourd’hui dans le cas de médecins ) mais d’une manière généralisée. (A Ceci s’ajoutera qu’il n’y aura que 600 000 parents potentiels susceptibles d’engendrer les actifs du futur, cette décroissance engendrant elle-même la suivante.
Une autre manière d’examiner le problème revient au tableau ci-dessous :
- en 1990 nous étions 58 millions de Français, 28 millions de moins de 20 ans, 53 millions d’actifs et 19 millions de retraités = 2,8 cotisants pour 1 retraité ;
- en 2020 nous étions 69 millions de Français, 24 millions de moins de 20 ans, 49 millions d’actifs et 26 millions de retraités = 1,8 cotisants pour 1 retraité ;
- en 2070 nous serions 76 millions de Français, 21 millions de moins de 20 ans, et 44 millions d’actifs pour un départ à 60 ans et 35 millions de retraités = 1,2 ;
- ou bien 76 millions de Français, 21 millions de moins de 20 ans, et 50 millions d’actifs pour un départ à 64 ans et 29 millions de retraités = 1,7 cotisants pour 1 retraité.
L’aménagement contesté proposé ne permet aujourd’hui tout au plus que de maintenir le système sans le sécuriser et demandera régulièrement un examen attentif et d’éventuelles mesures de rééquilibrage, fonction des évolutions constatées de la démographie. (natalité, espérance de vie etc …) Ceci sans parer le risque global de manque général de main d’oeuvre. Nous avons largement appris et maîtrisé la gestion des populations en croissance dans les années passées, il nous reste à découvrir la gestion de la décroissance ce que nos précurseurs japonais, pourtant performants et imaginatifs, ne semble pas avoir complètement maîtrisé. Plutôt que de se bloquer sur un déni de réalité, l’ensemble de la classe politique et les syndicats devraient se pencher sérieusement sur l’ensemble de ces équilibres et en particulier sur les politiques de natalités, largement détricotées au fil du temps par les gouvernements successifs pour des raisons d’économie. Il pourrait d’ailleurs en parallèle examiner la situation générale des entreprises en particulier industrielles qui ne recréeront pas d’emploi et de niveau de vie si le terreau France n’est pas suffisamment attractif par rapport à ses compétiteurs. Le plus surprenant est l’adhésion assez large des jeunes à la NUPES, alors que c’est leurs retraites qui seront les premières menacées et le plus gravement.
3 commentaires
Couler la France : le grand mensonge de la NUPES et des syndicats
Pourquoi les Français désapprouvent-ils à 68% la réforme des retraites et soutiennent-ils les mouvements de grèves. Parce qu’on leur fait peur immédiatement en leur annonçant qu’ils devront travailler plus et qu’hélas la peur engendre le repli sur soi. Alors qu’ils devraient s’inquiéter sérieusement du futur, mais cela n’intéresse ni les politiques ni les syndicalistes qui ne voient que leur réélection et leur maintien aux manettes, c’est à dire l’immédiat.
La fable de la Cigale et la Fourmi a encore de beaux jours devant elle. Alors relisons La Fontaine !
Couler la France : Mitterrand le précurseur
Mitterrand a commencé son mandat par une démonstration « géniale » le désarmement des avions au salon international de l’aéronautique et de l’espace en date du 10 juin 1981. Coût de cette décision : annulation de la quasi totalité des commandes (= 96%) en cours c’est à dire 80 milliards de francs, pas de commandes pour les années qui suivirent, pertes de tous nos contacts y compris diplomatiques et services secrets, confiance détruite, dissémination de Creusot-Loire (pour qu’il n’y ait pas de faillite déclarée) nombreuses faillites des sous-traitants et commerçants liés à ces bassins d’emploi, les clients de cette industrie se sont employés à copier les armements qu’ils nous achetaient auparavant en nombre. Les petites mains des partis de gauche se sont employées à faire disparaitre le plus de traces possible de cette affaire.
Le cumul de cette décision bien au delà de la stupidité dépasse les 15 000 milliards d’€uros (valeur d’actualisation 2023)
Couler la France : le grand mensonge de la NUPES et des syndicats
C’est une vision partielle et partisanne déconnectée de la réalité.
– le chômage est une variable d’ajustement économique, permettant de limiter l’envolée des salaires. Les 35 heures auraient dû entraîner une meilleure répartition du travail. Hors les entreprises n’ont pas joué le jeu. La conclusion est que les entreprises n’ont pas créé d’emploi et ont augmentées leur productivité en augmentant la pression aux salariés (cf. PIB / actif des différents pays évolutions dans le temps)
– pour le financement des services publics, ils ne dépendent que de choix politiques et de jeux d’affectation comptable. L’état est capable d’affecter 40 milliards de plus pour l’armée sur 4 ans. De faire des cadeaux fiscaux de presque 100 milliards sans aucune contre partie. De supprimer l’impôt sur les fortunes alors que les grandes fortunes ont augmentés de 450% leurs avoirs en 10 ans. Dans le cadre du COVID on a pu trouver 200 milliards, alors que les confinements ont totalement mis le pays a l’arrêt. Si l’on rajoute a cela la fraude fiscale des grandes entreprises on arrive au bas mot a plus de 500 milliards de pertes/dettes sans aucune contre partie…
– les prix de l’énergie sont biaisés par des accords européens ainsi que des marchés spéculatifs qui vont a l’encontre des usagers.
– on observe une financiarisation des choix politiques pour faire des « profits » a l’encontre des citoyens, augmentant les écarts de classes sociales. Augmentation des pauvres : plus de 12 millions, contre 8 millions il y a 10 ans. Un pays n’est pas une entreprise !
– une entreprise publique est un bien commun et aucunement un bien privé dont l’objectif est le plus de profits pour les actionnaires. Depuis 30 ans on voit des vautours venir privatiser les profits des entreprises publiques (Vinci, Total, etc..) et sociabiliser les pertes. La vente de fleuron technologique a l’étranger (USA, Allemagne, fuite technique en chine)
– les priorités sont a la réindustrialisation du pays. arrêter les privatisations et renationaliser les entreprises structurantes : télécommunications, énergie, SNCF, …
– l’inflation n’est pas due aux salaires… C’est du au politiques folles de la planche a billets (le quantitative easing et le quoi qu’il en coûte) et ensuite aux sanction contre la Russie qui se sont avérés être des sanctions contre l’Europe plus que contre la Russie (voir l’évolution du PIB russe et le taux de change de la rouble)
– en conclusion : article a côté de la plaque.