Comme toujours, à l’issu de circonstances exceptionnelles, on fait des bilans. Les historiens établiront des comparaisons conformes aux théories de l’histoire auxquelles ils adhèrent. Les sociologues feront un état de la manière avec laquelle les peuples ont réagi : niveau de peur, acceptation des contraintes, changements d’opinions, modifications des comportements, inégalités sociales face aux risques et aux traitements… Le personnel médical tirera des leçons sur les méthodes de diagnostic, de traitement et d’organisation. Les démographes établiront des bilans du nombre de décès en tenant compte des effets « positifs », diminution des accidents de la route et autres infections qui se propagent par contact. Les chercheurs biologistes seront sous pression pour trouver rapidement LE nouveau vaccin. La presse prendra conscience du recul nécessaire lorsque l’on parle de sujets scientifiques et de statistiques. Les climatologues attendront avec impatience les statistiques de température et de CO2 pour mesurer les éventuelles variations des coefficients de corrélation et de causalité liés à la baisse mondiale du flux de CO2 anthropique. Les écologistes pourront améliorer leurs connaissances des fonctionnements d’une économie et ainsi prendre conscience des impacts provoqués par leurs recommandations. Bien d’autres professions et activités sociales devront prendre des décisions et revoir fondamentalement leur vision des choses et leur stratégie.
Les premières questions concerneront les résultats des décisions prises par le gouvernement : fondements, rapidité, efficacité de la communication, évaluation des résultats. Il faudra effectuer des comparaisons avec d’autres pays et tirer des conclusions pour ce qui concerne l’organisation de nos administrations et particulièrement des services de santé. Dans ce domaine on a pu déplorer la dépendance française concernant la fabrication et la vente des masques et potentiellement de médicaments. Cette situation soulève le problème de la dépendance au niveau macroéconomique.
Une entreprise, quelle que soit sa taille, peut à un moment donné, décider d’acheter ou de faire fabriquer à l’étranger les produits et /ou services dont elle a besoin pour sa production locale. En général ce n’est pas une décision facile à prendre car il faut trancher entre les objectifs de gains de coûts et le niveau de risque, en comparaison avec une production locale. De telles prises de décisions concernent plusieurs fonctions et domaines de l’entreprise : technique, logistique, financière, juridique, organisation administrative, communication interne. Et quand un tel projet fonctionne bien et qu’il se développe, un retour en arrière n’est vraiment pas simple à gérer.
Alors aujourd’hui, certains remettent en cause les développements des échanges internationaux des dernières décennies. C’est un point de vue facile à développer et facile à diffuser. S’y ajoute une méfiance à l’égard du libéralisme qui n’est pas justifiée, car dans une économie de marché libérale, la concurrence, par opposition au monopole, est une règle de base. En toute rigueur une entreprise devrait faire fabriquer ses inputs par plusieurs sociétés réparties dans plusieurs pays afin de minimiser ses risques. Ceci devrait être un objectif (pas forcément facile), notamment pour les entreprises du médicament et pour les très grandes sociétés afin d’éviter un blocage total de l’activité.
La question est alors de savoir si l’Etat doit ou non s’impliquer dans de tels processus. La discussion devrait porter sur le rôle de l’Etat et de son niveau d’intervention dans le privé. C’est un sujet que même les économistes libéraux ont tendance à minimiser lorsqu’il y a des implications législatives très concrètes. D’une manière générale, en France, on devrait relancer le débat sur le rôle de l’Etat envers le privé en l’élargissant à toutes les fonctions étatiques et en se basant sur une profonde réforme des administrations.
La crise économique actuelle a cette spécificité qu’elle ne peut être comparée à aucune autre. Au niveau mondial les économies se portaient plutôt bien, donc pas d’anticipations négatives et soudain on arrête tout. Il est donc difficile de prévoir comment se passera la sortie de crise.
La tradition veut que l’on termine un article par une opinion optimiste. Ce n’est pas ce que nous ferons ici. Suite à l’épidémie actuelle les plus anxieux vont envisager des catastrophes futures en prévision desquelles ils recommanderont des budgets considérables. Débordement de la Seine à Paris, guerre entre les USA et plein de pays d’Asie, tsunami sur Nice suite à un choc sismique sur la ligne Nice-Strasbourg en passant par Fessenheim, chute d’une immense météorite provoquant des milliers d’incendies dans toute la France, inversion de la polarité magnétique de la terre qui déclenche une panne mondiale des télécoms, etc. Et pire encore : juste avant le confinement j’ai personnellement rencontré des extraterrestres près de chez moi. Ils m’ont annoncé qu’ils avaient glissé dans les cerveaux de plusieurs hauts fonctionnaires, sans qu’ils s’en rendent compte, des mini-puces électroniques programmées en Intelligence Artificielle et qui seront opérationnelles en septembre. Quelle angoisse !