On a coutume de voir les Etats-Unis comme le pays où la générosité est l’une des plus importantes au monde et où les dons des individus à de fondations non lucratives, les fameuses 501©(3) atteignent des sommets inégalés.
Il est en effet courant que les dons atteignent annuellement 300 milliards de dollars et sur ce total, les dons d’entreprises représentent seulement 4%, les dons de particuliers représentant plus des trois quarts, le solde étant distribué par les fondations donneuses, les « granting foundations ».
Par comparaison, Edith Archambault du CNRS considérait que le total des dons de particuliers en France atteignait 4,5 milliards d’euros (alors que les subventions aux associations dépassent allègrement les 30 milliards).
Mais l’importance des fondations caritatives se révèle beaucoup plus grande que ces chiffres ne peuvent l’indiquer.
Les services de ces fondations caritatives, tant en matière d’éducation (écoles, universités) que de santé (cliniques ou hôpitaux comme la Cleveland clinic, l’université Harvard, etc.), la culture, l’aide aux familles et la religion, représentaient en 2013 un total de dépenses de 1,63 trillions de dollars (1 trillion = 1 milliard de milliards).
Pour comprendre l’importance de ce chiffre, il faut lui comparer les services que fournit l’État et qui sont comparables.
En 2014, le total du budget fédéral était de 3,5 trillions de dollars mais sur ce total 24%, soit 845 milliards étaient le versement de retraites (Social Security), 24% étaient dépensés pour les programmes qui financent les dépenses de santé d’individus comme Medicare (pour les plus de 65 ans) ou Medicaid (pour les familles en dessous d’un seuil de revenu) et 17%, soit 596 milliards dépensés pour la défense.
À souligner que dans les dépenses Medicare ou Medicaid ne figurent que les remboursements et non pas les services qui sont assurés par des hôpitaux ou organisations privées publiques ou lucratives.
Ceci montre que seulement un tiers du budget fédéral américain, soit de l’ordre du trillion de dollars est consacré aux services qu’assure directement l’État fédéral.
Ceci veut dire qu’avec 1,6 trillion de dollars de chiffre d’affaires, le secteur caritatif américain privé est plus important que le secteur étatique.
En d’autres termes, un Américain est plus susceptible de se voir enseigné ou d’être traité médicalement par une organisation caritative privée que par l’État.
Il faut bien sûr ajouter les budgets consacrés par les états ou même les villes à ces services mais leur importance est seulement de l’ordre de 10% du budget fédéral et ne changerait pas la conclusion. Un Américain ne voit pas le ciel venir à son secours sous forme d’un État centralisé tout-puissant et infiniment protecteur, mais le plus souvent sous la forme d’une assistance caritative qui représente l’autre forme de l’initiative et de l’innovation individuelle de la société américaine, assistance caritative issue des succès industriels de cette société.
Ceci garantit aussi que dans le domaine caritatif comme dans le secteur lucratif, il existe une forte concurrence, condition du progrès et de l’efficience. Il n’est pour s’en convaincre que de consulter le journal format le Figaro publié tous les 15 jours et faisant 100 à 150 pages, intitulé « Chronicle of Philanthropy ». En dehors des articles de fond sur la philanthropie qui passent en revue les divers aspects de ce monde qui a lui seul représente 9% du PIB américain, il liste sur plusieurs pages les postes offerts dans les fondations caritatives et les donations de particuliers (ou des « granting foundations ») dont beaucoup dépassent les 10 millions de dollars.