TRUMP ou TROMPE ?

par Yves Buchsenschutz
208 vues

Monsieur Donald Trump, lequel avait beaucoup promis, tient enfin l’une de ses promesses : il vient de sortir une rafale de droits de douane comme on n’en avait pas vu depuis 1930. Il faut dire qu’en ce qui concerne l’arrêt des hostilités mondiales « dans la journée » pour le moment cela a ajouté le Yémen aux pays d’intervention des États-Unis sans compter Taïwan ni résoudre l’Ukraine ou les otages israéliens.

L’argument de base est directement issu du programme MAGA, lequel cherche à faire passer les États-Unis pour une victime, consentante d’ailleurs, du reste du monde. Par curiosité nous avons voulu vérifie cette assertion. Elle se révèle en fait être une parfaite « FAKE NEWS ».

1.LA SITUATION À DATE :

    • Facialement il est parfaitement exact que les États-Unis ont une balance commerciale de produits déficitaire avec le reste du monde. Elle a commencé à se dégrader dans les années 1970, tournant aux  environs de 700 milliards de dollars par an pour s’aggraver récemment en 2024 et 25. Pour toute l’année 2024, le déficit a augmenté de 17 % par rapport à 2023 pour atteindre 918,4 milliards de dollars. Les exportations ont augmenté de 3,9 % à 3 191,6 milliards de dollars et les importations ont augmenté de 6,6 % à 4 110 milliards de dollars. Peut-on se permettre au passage de signaler que ce dépassement est financé en dollars US, monnaie émise en excédent par rapport au PIB, donc cause assez indolore du déficit, tant que la confiance règne. L’équilibre commercial ou budgétaire n’est pas un sujet chaud aux États-Unis, contrairement aux impôts.
    • L’évolution du Commerce mondial a été fulgurante depuis la fin de la deuxième guerre mondiale  (Source OMC)
    • Durant cette période, les États-Unis sont devenus et restés la première puissance économique du Monde avec un taux quasi stable de 25 % du PIB mondial même si la Chine émergeait cependant que l’Europe se rétractait. Au demeurant les États-Unis produisent 25 % du PIB mondial avec 5 % de la population (370 M/ 7500 M de terriens)1
    • Simultanément, le Taux de Pauvreté Mondial s’est effondré. Le graphique ci-après montre la baisse de la proportion de la population vivant sous le seuil international de pauvreté dans le monde entre 1990 et 2015. Jusqu’à Trump, le taux de pauvreté dans le monde n’a cessé de diminuer : de presque 36 % en 1990, il est descendu à 8,9 % en 2021. Sous Trump il pourrait remonter au dessus de 9 %.
    Par Max Roser — https://ourworldindata.org/extreme-poverty, CC BY 4.0,
    • IL EST DÈS LORS DIFFICILE DE PRÉTENDRE QUE L’EUROPE A SPOLIÉ LES ÉTATS-UNIS ! ou que le développement des échanges (organisé en son temps par le plan Marshall puis le GATT puis l’OMC a été défavorable aux USA).
    • Ceci d’autant plus qu’à court terme la croissance du PIB US a été bien plus favorable que la faible croissance des pays UE :
    • Ci-dessous l’évolution comparée des PIB US et de la France et l’Allemagne en PPA2 depuis 1990 ! Les USA croissent sans discontinuer quand la « vieille » Europe est à la peine, y compris depuis la crise COVID.

    EVOLUTION DES PIB (en PPA) comparés : USA, France,Allemagne

    PIB/ pays en PPA

    199020202023Multiple
    USA5,96 Mds21 Mds 27,72 Billions x5
    GERMANY1,55 Mds5,75 Billionsx4
    France1,02 Mds3,97 Billionsx3

    2.ET POURTANT LES AMÉRICAINS CROIENT QUE MONSIEUR TRUMP DIT LA VÉRITÉ : ILS SE SENTENT APPAUVRIS ET ONT VOTE EN MASSE POUR LE PROGRAMME MAGA ! quant à Monsieur Vance il accuse délibérément les Européens de vol !

    • Ci-dessous l’évolution du PIB/hab de quelques grands pays
    USA80 000 $/AN
    Allemagne51 400 $/AN
    Royaume-Uni46 400 $/AN
    France44 400 $/AN

    On est assez loin du compte, particulièrement depuis une dizaine d’années. Les États-Unis ont été particulièrement performants et ont été capables de s’approprier et de conserver une part prépondérante de la production mondiale.

    3.LES EXPLICATIONS POSSIBLES :

    • L’inflation : cela fait presque quatre ans que les États-Unis subissent une inflation de l’ordre de 4% et celle-ci est encore à 3 %. La population ne voit pas le bout du tunnel surtout dans un pays où les salaires sont peu corrélés à cette dernière et où inflation signifie quasi immédiatement perte de pouvoir d’achat !
    • L’indice de GINI : (mesure des inégalités) Là où la France est à 0,29, stable, les USA frisent 0,50, plutôt en hausse. La réussite aux USA semble favoriser les  riches ! et les classes moyennes finiront bien par s’en apercevoir.

    4. LA SPOLIATION DES ÉTATS-UNIS PAR L’EUROPE (ET LE RESTE DU MONDE) est une belle légende politique mais sans aucun fondement économique chiffré. Ceci irait d’ailleurs contre toute probabilité ( « La raison du plus fort est toujours la meilleure … »).

    La réintroduction à marche forcée du protectionnisme, élevé au rang de Saint-Sacrement, devrait, a minima, accélérer l’inflation et désorganiser les chaînes d’approvisionnement mondiales péniblement construites depuis 50 ans, détériorant au passage la productivité du système en particulier celui des transports.

    Le comportement des bourses mondiales du 3 Avril 2025 pourrait bien être un signe avant-coureur que des oppositions puissantes vont émerger. (par exemple, les gestionnaires de fonds d’investissements ?).

    Surtout, en isolant les États-Unis du reste du monde, Trump risque de couper les grandes entreprises mondialisées de leurs marchés et ainsi de pénaliser l’économie américaine.

    1. 15% QUASI STABLE EN PPA DEPUIS 2015 ↩︎
    2. PPA parité de pouvoir d’achat ↩︎

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

    Tu pourrais aussi aimer

    4 commentaires

    François HENIMANN avril 5, 2025 - 7:06 am

    Très intéressant, merci Yves.
    Serait-il possible d’avoir un lien pour partage de l’article sur linkedin (plus efficace que Facebook dans un univers professionnel pour élargir l’audience)

    Répondre
    GLORIEUX REGIS avril 5, 2025 - 9:34 am

    C’est tout à fait exact !
    Il faut ajouter que les Etats-Unis ont financé leur niveau de vie entièrement « à crédit » et non par une production propre, ceci grâce à la monnaie $ qui leur permet de faire financer leur déficit par tous les pays du monde qui y réinjectent leurs excédents de $. Une part importante des exportations américaines de biens (à distinguer des services tels la tech) est en réalité composée de biens primaires : pétrole, gaz, produits agricoles., et non de biens industriels.
    La puissance économique des USA est « factice », c’est un colosse au pied d’argile. Une grande part du déficit financier des Etats-Unis est constituée par les intérêts versés sur leurs dettes (comme la France !). Que se passerait-il si, demain, Trump, dont on peut tout attendre, décidait unilatéralement de ne plus honorer les intérêts de sa dette, c’est à dire de se mettre de facto en banqueroute ? Là ce serait un tsunami mondial ! Bien pire que le séisme actuel, qui fera sans doute long feu.

    Répondre
    moulin avril 5, 2025 - 3:07 pm

    Conclusion : TROMPE se trumpe ou ment. Les grandes entreprises mondialisées vont elles l’arrêter ou déménager ? À suivre.

    Répondre
    moulin avril 6, 2025 - 12:53 pm

    Compléments d’analyse : Avec leurs grandes entreprises mondialisées, les USA ont eu une croissance plus rapide que les autres pays développés et notamment que la France. En fait, Trump ne parle peut être que de ses électeurs, qui ne sont pas tout les USA?
    Quels droits de douane pour permettre aux classes moyennes de redevenir compétitives pour produire aux USA les biens d’excellences mondiales, qu’achètent les américains, notamment les riches et exigeants ?
    Quels délais en années ?
    Quels surcoûts et baisses du niveau de vie moyen des classes moyennes ?
    Pour baisser les importations, le plus efficace serait de baisser les déficits budgétaires et les émissions de dollars…
    Keynes ne marche pas plus aux USA qu’ailleurs.

    Répondre

    Laissez un commentaire

    Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d’accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accepter En savoir plus

    Privacy & Cookies Policy