Emmanuel Macron vient d’être réélu avec 58 % des voix, et l’on attend, maintenant, pour savoir quelles vont être les axes d’action prioritaires du gouvernement les résultats des prochaines élections législatives. Jean-Luc Mélenchon a créé la surprise en parvenant, ce qui paraissait totalement impossible aux observateurs de notre vie politique, à procéder à son profit à une réunification de la gauche, opération qui pourrait l’imposer comme premier ministre dans la formation du prochain gouvernement. Il est certain que si notre Président se trouvait contraint d’en faire son chef de gouvernement, la situation serait pour lui extrêmement difficile, tant par le programme de ce candidat que par le caractère impétueux du personnage. Les priorités de ces deux hommes politiques ne sont pas les mêmes, ni la façon dont ils comptent gouverner. Dans notre cinquième République, le Président fixe les grandes orientations du pays et conduit la politique extérieure de la France, et le premier ministre est en charge des affaires intérieures et de la politique économique à mener.
Pour éclairer les débats qui vont avoir lieu il nous faut donc rappeler quels sont les enjeux essentiels pour notre avenir. Ils sont au nombre de trois :
1- L’enjeu « destin de notre civilisation »
Le développement de l’islam en France ne peut manquer d’être un sujet de préoccupation majeur pour nos dirigeants, car la montée de l’islam constitue une menace, à terme, pour notre civilisation. On sait en effet, comme nous l’avait rappelé Paul Valery, que les civilisations sont mortelles.
Depuis la fin de la période coloniale on assiste à l’arrivée de très nombreux migrants en provenance des pays africains, des pays qui sont tous musulmans, et ces nouveaux arrivants ne s’assimilent pas : ils ont, en effet, la ferme volonté de conserver leur identité, et les dirigeants de notre pays, nourris par l’idéologie des droits de l’homme, admettent parfaitement qu’ils se comportent ainsi. Il en est même, comme c’est le cas de Jean-Luc Mélenchon, le leader des Insoumis, qui vont jusqu’à se réjouir de cette « créolisation » de la France. Le pays s’est donc fractionné, et l’on assiste à un indéniable « choc de civilisation », un choc entre notre civilisation dont le fondement est judéo-chrétien et la civilisation musulmane fondée, elle, sur l’islam. Un anthropologue comme Claude Levi-Strauss nous avertit dans « Race et Histoire » de ce qu’il advient lorsque deux civilisations se trouvent en concurrence sur un même territoire : soit la disparition de l’une des deux, l’une se trouvant absorbée par l’autre, soit une mutation qui s’opère vers un « pattern nouveau », c’est-à-dire apparition d’une nouvelle civilisation n’ayant rien à voir avec les deux précédentes. C’est d’ailleurs ainsi que meurent les civilisations.
2- L’enjeu « Réindustrialisation de la France »
La France, depuis la fin des Trente glorieuses, n’a pas cessé de se désindustrialiser et elle est devenue le pays européen le plus désindustrialisé aujourd’hui, la Grèce mise à part. Notre secteur industriel ne concourt plus que pour 10 % à la formation du PIB, alors qu’il devrait s’agir d’au moins 18 %, un pays comme l’Allemagne en étant même à 24 %. Il s’en est suivi un appauvrissement régulier du pays que les pouvoirs publics tentent de compenser par des dépenses sociales de plus en plus importantes, au point que la France est devenue le pays de l’OCDE où elles sont à présent, en proportion du PIB, les plus élevées. Il en est résulté, automatiquement, des prélèvements obligatoires extraordinairement importants, et, ceux-ci n’étant jamais suffisants, un recours chaque année à de l’endettement extérieur. Tous les clignotants de l’économie française sont au rouge du fait, précisément, de cette grave désindustrialisation du pays, et, curieusement, ce sujet s’est trouvé très peu traité au cours de la campagne électorale qui vient de se dérouler, la relation existante entre le taux d’industrialisation des pays et le niveau du PIB per capita des habitants étant un phénomène encore mal connu. Il va bien falloir remettre sur pied l’économie française, la dette du pays ne cessant de s’accroitre, et pour cela s’extraire du cercle infernal dans lequel sont pris nos dirigeants qui débouche chaque année sur un peu plus d’endettement. Il n’y a pas d’autre solution pour s’extraire de ce mécanisme que de s’atteler sérieusement au problème de la réindustrialisation du pays, et, pour autant que l’on prenne toutes les mesures pour réussir ce pari, il faudra pour le moins une vingtaine d’années pour que la situation soit rétablie.
3- L’enjeu « Un vaste plan d’aide au développement de l’Afrique »
Le problème des flux migratoires est déterminant pour l’avenir de l’Europe, donc pour le nôtre. Le continent africain va voir sa population croitre d’environ un milliard de personnes d’ici à 2050, et déjà les différents gouvernements de ces pays ne parviennent pas à fournir des emplois à tous leurs ressortissants, ce qui conduit beaucoup d’entre eux à émigrer. L’Europe toute entière est concernée par ces flux migratoires, et elle le sera, demain, de plus en plus. Il va donc falloir ne pas se contenter de mesures dérisoires comme les accords passés avec le dirigeant Turc que l’on paye pour qu’il bloque les migrants dans son pays, ou le renforcement de Frontex pour mieux défendre les frontières de l’Europe, mais s’attaquer au problème à sa racine, c’est-à-dire le développement économique de l’Afrique. Et il va falloir, pour cela, se doter des moyens nécessaires à la fois au plan financier, et, aussi, dans la manière d’opérer.
Il faut donc que l’Europe lance, sans plus attendre, un vaste plan d’aide à l’Afrique qui l’amènerait à focaliser sur ce continent tous les crédits d’aide au développement qu’elle est capable de mobiliser chaque année, et à porter ceux-ci à 0,7 % du PIB des pays membres, ce qui est l’objectif sur lequel tous les pays de l’OCDE se sont engagés devant l’ONU, alors que l’on n’en est actuellement qu’a un peu plus de la moitié seulement. Cela représenterait un budget de 100 milliards d’euros, chaque année. Au plan pratique il faudra que les différents pays membres cessent de procéder, comme c’est le cas aujourd’hui, à des aides bilatérales, afin que tous les moyens financiers soient concentrés dans les mains de la Commission Européenne, de façon à ce que l’Europe ait vraiment du poids vis-à-vis des pays à aider, car des négociations seront en permanence à mener, et elles ne seront pas toujours faciles.
Les crédits d’aide seraient consacrés aux trois objectifs suivants :
-réalisation des infrastructures qui manquent gravement à tous ces pays, ce qui entrave fortement leur développement ;
– alimentation d’un système d’assurance des investissements privés en Afrique, comme la MIGA existant à Washington auprès de la Banque Mondiale ;
-et, aide aux différents pays pour la réinstallation chez eux de tous les migrants que l’Europe ne se trouvera pas en mesure d’accueillir chez elle.
Et les 100 milliards d’euros seraient consacrés exclusivement à ces trois volets.
Un mécanisme d’assurance des investissements privés est en effet à créer au plan européen, car il n’existe pas actuellement. Ainsi les entreprises européennes pourront elles investir en Afrique ce qu’elles ne font pas actuellement en raison des risques politiques existant dans ces pays. Il faut voir que les investissements privés sont indispensables pour le développement de tout pays émergent, et c’est ce que la Chine a fort bien compris avec les résultats que l’on sait. Les acteurs étrangers apportent aux pays qui les accueillent les know-how qu’ils n’ont pas, ils forment sur place la main d’œuvre, et ils permettent aux pays d’exporter, les industriels locaux ne pouvant le faire car ils n’ont pas, eux, accès aux marchés des pays développés. Ce vaste plan de coopération avec l’Afrique est indispensable pour l’avenir tant des pays africains que pour celui des pays européens.
Pour voir la façon dont Emmanuel Macron compte répondre à ces trois défis, il faut plonger dans le programme que son parti a présenté aux électeurs.
Ainsi, dans le livret « Macron avec vous » trouve-t-on les réponses suivantes : pour le premier enjeu, deux chapitres : l’un intitulé « La république des droits et des devoirs », l’autre : « Nos valeurs et nos lois ne sont pas négociables ». Pour le second thème, on a un chapitre très détaillé intitulé : « Une France créative et productive ». Et pour ce qui est du problème du développement de l’Afrique : rien.
Pour ce qui est donc du premier enjeu, « Le destin de notre civilisation », il est dit : « mieux maitriser l’immigration ». Fort bien : mais sans que soit mentionné le comment ? La mesure à prendre pour vraiment maitriser l’immigration serait de procéder à la manière des Canadiens, c’est-à-dire opter pour une immigration choisie, en fonction des besoins. Et, en matière d’assimilation, autre problème délicat à régler, différentes mesures sont prévues, mais le programme de Macron est incomplet : il manque un volet essentiel portant sur la manière de transmettre aux nouveaux arrivants les éléments essentiels de notre culture et de notre histoire. Il faut que les nouveaux arrivants s’approprient notre culture et notre histoire, et en soient fiers. En ce domaine le rôle de l’école est tout à fait déterminant, et il faudrait donc que notre Président prévoie de réformer complètement les programmes scolaires, et que le personnel enseignant soit mieux formé. Et, par ailleurs, que l’on cesse au niveau des pouvoirs publics de faire de la repentance.,
Pour ce qui est du second enjeu, la « Réindustrialisation de la France », la liste des mesures figurant dans le programme d’Emmanuel Macron est pertinente, mais il y manque une mesure essentielle sans quoi rien ne se fera : subventionner la création d’emplois industriels. Il va falloir, en effet, accompagner la création d’emplois industriels par des aides de l’Etat car il y a urgence pour remonter notre secteur industriel à 18% du PIB. Et cela ne pourra pas se faire sans des incitations très importantes de l’Etat. Nous avons montré, dans d’autres articles, qu’il faudrait que la puissance publique lance un plan de 10 ans comportant des subventions de 20.000 euros par emploi créé les 5 premières années, puis 10.000 euros les 5 années suivantes, ceci afin de compenser tous les freins à la création d’entreprises industrielles existant aujourd’hui en France : impôts et cotisations de diverses sortes considérablement plus élevés qu’ailleurs, rigidité du code du travail, réglementations par trop pointilleuses dans différents domaines, niveaux trop bas des rémunérations pour les personnels qualifiés, etc…Ces montants que nous proposons sont considérables, mais il faut bien voir que l’intensité capitalistique dans les industries modernes est extrêmement élevée. L’Etat, dans ce plan, n’interviendrait aucunement dans le choix des investissements, donc pas de dirigisme. Certes, ces mesures seront difficiles à faire admettre aux autorités de Bruxelles :il faudra pour cela faire valoir à la direction de la Concurrence que notre pays est sinistré, avec un taux d’industrialisation tombé à 10 % du PIB, qui est le plus bas de tous les pays européens, la Grèce exceptée. Il en résulte des dépenses sociales hors norme, les plus élevées de tous les pays européens, et des prélèvements obligatoires démesurés qui asphyxient l’économie, plus la nécessité de recourir chaque année à un peu plus d’endettement. Cette situation ne peut donc plus durer.
Pour ce qui est, enfin, du troisième enjeu, l’Afrique : certes, la France ne peut agir seule, mais faudrait-il, encore, qu’elle intervienne vigoureusement auprès de ses partenaires pour que l’Union Européenne se mobilise sans plus tarder pour lancer un vaste plan d’aide au développement de l’Afrique. Ce n’est, en effet, qu’en s’attaquant aux causes du mal que l’on pourra réduire les flux migratoires qui se dirigent vers l’Europe, et ce n’est qu’en négociant avec les pays bénéficiaires de l’aide que l’on pourra obtenir qu’ils cessent de refuser de réintégrer chez eux tous les migrants que l’Europe ne sera pas en mesure d’accueillir.
Nous venons d’indiquer les éléments qui manquent au plan d’action qu’Emmanuel Macron a présenté aux Français. Le point essentiel qui fait défaut est le plan d’accompagnement pour la réindustrialisation du pays : il faut prévoir une aide massive de la puissance publique afin que la France soit particulièrement attractive pour les investissements étrangers, car on ne pourra pas faire sans eux. Et pour ce qui est de la sauvegarde de notre civilisation, bien des mesures complémentaires seraient à prendre, le programme Macron étant, là aussi, à compléter.
Il reste à voir ce que Mélenchon, s’il était en charge, demain, du gouvernement, pourrait faire avec tous ces projets ?