Le nouveau Premier ministre d’Australie, Malcolm Turnbull, qui a été élu le 15 septembre à la tête des Libéraux (la droite) à la place de Tony Abbott, solide mais mauvais communicant, n’a pas attendu longtemps pour mettre sa marque sur la politique du gouvernement australien.
Il a sorti le 6 décembre un grand programme avec vingt-quatre mesures destinées à stimuler l’innovation en Australie. « Pas de grands programmes de dépenses, [puisque le total du budget sur 4 ans est seulement de 1,1 milliard de dollars, NDLR] mais changer la culture de notre économie » a expliqué le ministre de l’industrie, de l’innovation et de la science, Christopher Pyne.
Le Premier ministre a justifié ces mesures en rappelant que « les entrepreneurs créent des emplois, c’est pourquoi nous entreprenons autant pour encourager la création de nouvelles entreprises ».
Pour un Français, la mesure la plus symbolique, la dernière du programme, est la copie du programme britannique EIS (Enterprise Investment Scheme), dont nous avons à de multiples reprises comparé l’efficacité avec l’inefficacité de sa mauvaise copie française, l’avantage Madelin.
Comme les Britanniques, les Australiens viennent d’introduire une déduction fiscale de l’impôt sur le revenu de 20% de l’investissement dans une start-up, avec suppression de l’impôt sur les plus-values pour les titres conservés plus de trois ans. (Les Australiens savent que l’impôt sur les plus-values est le plus grand ennemi des start-up et de ceux qui les financent).
Nous ne savons pas quels sont les plafonds de déduction possibles mais le coût budgétaire étant prévu de 106 millions de dollars, on peut penser que le plafond sera de même volume que pour l’EIS britannique, quelque part entre 200.000 et 1 million de dollars, puisque l’EIS coûte en année pleine environ 250 millions de livres.
Il est également créé une déduction fiscale de 10% des fonds investis dans un fonds de capital-risque investissant dans les débuts d’une start-up.
À noter que le taux de déduction n’est pas le même pour un investissement direct du type EIS (20%) et l’investissement dans un fonds (10%), moins risqué du fait qu’il intervient beaucoup plus tard dans le développement d’une entreprise et qu’il existe aussi une compensation des risques du fait de la multiplication des investissements, ce qui n’est pas le cas de l’investissement par les Business Angels que vise l’EIS. Beaucoup de pragmatisme, à l’inverse de la France.
Un nouveau visa d’immigration pour entrepreneurs, le délai d’interdiction de créer une entreprise après un dépôt de bilan réduit de 3 à 1 an, réévaluation de l’incitation à la recherche et au développement qui coûte 2,9 milliards sur les 9,7 milliards dépensés annuellement en R & D en Australie, 200 millions de dollars attribués à CSIRO (Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation, une organisation gouvernementale centenaire qui rappelle notre CNRS, avec plus de 6.000 personnes et pas mal de découvertes ayant donné lieu à redevances ou succès industriels) pour le financement des start-up créées par des chercheurs de laboratoires du CSIRO et des universités australiennes.
Ce sont les principales mesures de ce programme qui a été salué positivement de toute part.
Il est intéressant de souligner que ce programme d’innovation est officiellement « business-based ».
Il s’agit de mettre l’innovation au service de la création d’emplois et non pas de découvertes fondamentales au service de la seule connaissance.
C’est peut-être la chance de l’Australie d’avoir su trouver comme Premier ministre un homme qui connaît le pilier de la richesse d’une économie, l’entreprise, pour avoir fait fortune lui-même en partant de zéro.
Il n’est pas milliardaire mais est évalué à près de 200 millions de dollars.
Fils d’une mère qui l’a abandonné très tôt pour un 3e mariage, il a fait des études de droit mais est entré très tôt au parti libéral et a su, par son intelligence et son énergie, recevoir une bourse Rhodes comme tant de personnalités illustres (Bill Clinton, Edwin Hubble, William Fullbright, Robert Reich, Tony Abbott prédécesseur de Turnbull) qui lui a permis de compléter ses études à Oxford où il a rencontré sa femme plus tard devenue maire de Sydney.
Il a lui-même créé un cabinet d’avocats, et a été directeur de Goldman Sachs en Australie.
Très charismatique, beaucoup plus que Tony Abbott, il a toutes les chances de remporter les prochaines élections australiennes à l’automne 2016 ; et l’Australie aura à sa tête pour 3 années de plus un homme qui sait que les entreprises sont au cœur de la création d’emplois et de richesse.