Page d'accueil Regards sur l'actualité Les acteurs de la croissance US : supermanagers ou entrepreneurs ?

Les acteurs de la croissance US : supermanagers ou entrepreneurs ?

par Valérie Pascale
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Quand il cherche à expliquer la part croissante prise par le 1% des plus riches dans les revenus totaux des Américains, Thomas Piketty invente littéralement une fiction : les riches qui se sont enrichis davantage que l’ensemble de la population sont des supermanagers, des salariés de haut vol dont les traitements et avantages sociaux ont contribué à leur faire capturer une part beaucoup plus importante de la richesse produite.

Mais comme toutes les fictions inventées par Piketty, c’est une fiction qui tombe sous le bon sens car tout le monde en entend parler : parachutes dorés, distributions gratuites d’actions, traitements annuels qui représentent pour les plus hauts salariés jusqu’à 100 fois ce que gagne le salarié au bas de l’échelle.

Le problème pour Piketty est qu’il existe des statistiques sur ces hauts revenus et que leurs chiffres ne correspondent pas du tout à cette vision. Elles montrent que les hauts revenus ne sont pas ceux de salariés mais ceux d’entrepreneurs.

Dans le haut de l’échelle, il est assez facile de noyer le poisson car des très riches entrepreneurs comme Elon Musk ou Bill Gates ont, pour le principe, continué à figurer sur la liste des employés de leur société, et même si l’essentiel de leurs revenus provient de leur patrimoine en actions, ils continuent de toucher une paie de salarié.

Mais une étude de Bakija, Cole et Heim de 2010 sur le 0,1% des plus hauts revenus à partir des impôts sur le revenu déclarés à l’IRS[[Bakija, J., A. Cole, B.T. Heim, « Jobs and Income Growth of Top Earners and the Causes of Changing Income Inequality : Evidence from US Tax Return Data », US Department of the Treasury, 2010.]], montrait déjà que seulement 20% appartenaient à la catégorie supermanagers, c’est-à-dire des exécutifs salariés.

Cagetti et De Nardi[[Cagetti, M., M. De Nardi, « Entrepreneurship, Frictions, and Wealth », NBER, 2006.]] avaient utilisé les statistiques de la Federal Reserve de 1989 pour montrer que si les propriétaires d’entreprises auto-employés représentaient seulement 8% de la population américaine, ils possédaient un tiers du patrimoine total américain et plus de la moitié du patrimoine du 1% le plus riche.

Tino Sanandaji a publié dans les pages de National Review les principaux résultats d’une étude[[Sanandaji, T., « Piketty’s Missing Entrepreneurs », National Review, 2014.]] qu’il a menée à partir des mêmes bases et il a pu écrire que les entrepreneurs auto-employés possédaient un étonnant 70% de la fortune du 0,1% le plus riche ; et si l’on regarde le revenu de ce 0,1%, la moitié des revenus.

Une autre étude réduit en fumée les affirmations de Piketty car elle montre que les 18 milliards gagnés par 7.000 exécutifs salariés travaillant pour les plus grandes entreprises américaines représentaient à peine la rémunération des 10 gestionnaires de hedge funds les mieux payés ! D’autres études montrent que ces exécutifs salariés ne peuvent représenter plus que 2 à 3% des revenus du 0,1%.

Nous avions déjà montré à partir des statistiques du SCF que les salariés sont certes une part importante des revenus pour les catégories de revenus les plus bas ou moyens, mais deviennent beaucoup moins importants que les revenus d’investissements industriels pour les plus hauts revenus.

Cette vision imaginaire du monde réel est grave car elle ignore l’une des plus importantes sources de richesse : les entrepreneurs qui prennent des risques pour créer des entreprises et des emplois. Suivre Thomas Piketty dans ses fantasmes comme l’ont fait les gouvernants français peut expliquer pourquoi la France est en train de devenir la championne du chômage.

 

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