Le Conseil constitutionnel n’a pas validé la première proposition de RIP, au motif qu’elle…ne proposait pas de réforme, comme cela est exigé. En effet, « le Conseil constitutionnel a constaté que l’article unique de la proposition de loi qui lui était soumise dispose que l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite… ne peut être fixé au-delà de soixante-deux ans », ce qui était déjà l’état de la loi au moment de l’émission de cette proposition, qui n’évoque donc aucune réforme. Ses auteurs, s’étant aperçus de la faille juridique, ont au dernier moment introduit une nouvelle demande, consistant à proposer en outre une mesure de financement de la retraite, tendant à augmenter de 2% le prélèvement forfaitaire unique pour en passer la partie sociale de 17,2% à 19,2%. Le député Patrick Kanner commente en parlant d’assurer ainsi « ceinture et bretelles » à la validation du RIP. Malheureusement pour lui, il y a peu de chance que cela permette d’éviter au pantalon de tomber ! il y a plusieurs raisons à cela, sans compter que les recettes à attendre d’une telle mesure sont parfaitement négligeables au regard des ressources qui seraient nécessaires pour combler le déficit des retraites.
Le Conseil se prononcera le 3 mai sur cette seconde proposition de loi référendaire.
Augmenter le taux d’un impôt n’est pas une « réforme relative à la politique économique de la nation »
Le Conseil constitutionnel rappelle que déjà le 25 octobre 2022 il avait eu l’occasion de se prononcer sur la validité d’une proposition tendant à augmenter l’imposition de la fraction des bénéfices des sociétés supérieure à 1,25 fois la moyenne des résultats imposables au titre des exercices 2017 à 2019 lorsqu’ils sont supérieurs à 750 millions d’euros. Cette proposition « a ainsi pour seul effet d’abonder le budget de l’État par l’instauration jusqu’au 31 décembre 2025 d’une mesure qui se borne à augmenter le niveau de l’imposition existante des bénéfices de certaines sociétés. Elle ne porte donc pas, au sens de l’article 11 de la Constitution, sur une réforme relative à la politique économique de la nation »[[En revanche, la proposition d’ériger en service public national l’exploitation d’Aéroports de Paris a été jugée recevable par le Conseil en 2019, mais n’avait pas obtenue le nombre de signatures de citoyens nécessaire pour engager la procédure de vote.]].
Pourquoi en serait-il différemment cette fois-ci ? Les exigences de la loi reposent sur le fait que le vote du budget ne peut être que de la compétence exclusive du Parlement, au risque de contradictions insolubles. Au niveau mondial, le référendum financier n’existe quasiment pas, et en Suisse, pays le plus engagé dans la démocratie directe, il est interdit au niveau fédéral.
Que se passerait-il si par extraordinaire le Conseil constitutionnel validait la proposition ?
Ce second référendum comporte deux propositions, la première identique à celle de la première demande, jugée illégale, et la mesure financière ci-dessus. Comment le Conseil pourrait-il valider la première proposition qu’il vient donc de juger illégale ? Il ne pourrait que valider la seule mesure financière (et pourrait-il d’ailleurs tronquer la demande ?).
Dans ce cas, il ne subsisterait que la mesure financière, dont l’objet n’est que d’augmenter de 2% le PLU (au taux de 30%), lequel n’a rapporté (en 2019) que 3,5 milliards d’euros. Le résultat en serait donc une augmentation des recettes de l’Etat de…233 millions !! Rappelons que l’Etat attend 17 milliards de recettes de l’augmentation de l’âge de la retraite, augmentation à peine suffisante et seulement temporaire pour combler le déficit du régime.
Il est évident que la proposition en question n’est là que pour tenter de valider artificiellement un référendum dont l’objet n’est que de bloquer l’augmentation de l’âge de la retraite. Elle n’a pas de chance d’être retenue.