Avec la nomination des ministres du gouvernement Valls, nous avons une fois de plus assisté à l’absurdité des nominations à la française, absurdité qui explique en grande partie pourquoi les gouvernements sont incapables de redresser le pays dans presque tous les domaines.
Les ministres ou secrétaires d’État n’ont pas été nommés en fonction de leur compétence ou de leur connaissance des dossiers mais d’ « équilibres »politiques dont les composants sont seulement connus du président de la République et de son Premier ministre. Comme Harlem Désir, nommé au secrétariat des Affaires Européennes.
C’est généralement la valse, en se servant des députés de l’Assemblée nationale et parfois du Sénat comme d’une réserve d’où l’on tire un lapin en dernière minute pour le grand bonheur de l’intéressé.
Ces ministres ou secrétaires d’État nommés dans ces conditions ont-ils un programme ? Savent-ils ce qu’il faut faire dans l’intérêt du pays pour prendre des décisions mûrement réfléchies ? Quelle probabilité a-t-on que ce ne soient pas seulement les décisions qui sont préparées par l’administration qui vont prévaloir ?
Jusqu’à il y a quelques années, on pouvait croire que ces décisions préparées par l’Administration étaient dictées par l’intérêt général. Mais l’on sait depuis plus d’une trentaine d’années, notamment par des travaux de prix Nobel, que l’Administration est un acteur comme les autres qui a ses propres intérêts et les fait passer devant ce fameux intérêt général dont on la gratifie.
Dans ce contexte volatil, les chances de la Société dite Civile de faire passer des mesures sont à peu près nulles.
Il est d’ailleurs connu dans les ministères que dès qu’un ministre arrive, il faut le noyer par un emploi du temps qui l’empêche de réfléchir et que ceci permet de lui faire signer les mesures que les précédents ministres ont laissées dans les tiroirs et auxquelles tient l’Administration.
Ce processus d’auto-promotion est renforcé par le fait que les chargés de mission placés auprès du ministre sont presque tous des fonctionnaires qui sont peu susceptibles de contrer leurs collègues. En effet, dans le budget d’un ministre, un fonctionnaire, pris comme chargé de mission, ne pèse que par sa prime de cabinet ; il reste à la charge, pour traitement et retraite, de son administration qui le met à disposition. Alors que pour un chargé de mission issu du privé, le ministre doit payer l’entièreté des salaires, charges sociales, et, bien sûr, prime de cabinet.
Quel contraste avec le système britannique du « shadow cabinet » où les futurs ministres non seulement sont plongés des années à l’avance dans les dossiers de leur futur ministère mais sont tenus au courant de ces dossiers au fur et à mesure.
Ceci permet entre autres aux acteurs de la société civile de convaincre à l’avance ces futurs ministres de leurs thèses, d’apporter des preuves, de préparer des textes.
Il ne faut donc pas être surpris de constater qu’il y a au Royaume-Uni entre deux et trois fois moins de fonctionnaires dans les services du Treasury que dans les services équivalents de la DGFIP de Bercy, pour ne pas parler des plus de 10.000 fonctionnaires de la Banque de France à comparer aux moins de 3.000 de la Banque d’Angleterre pour à peu près les mêmes fonctions.
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Le jeu absurde des nominations ministérielles
Votre idée de faire du « benchmarking » est excellente, surtout avec l’un des meilleurs de la classe.
Cela pourrait accélérer la mise en oeuvre des réformes si indispensables.
Continuez avec d’autres exemples.