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La loi Macron accélère-t-elle la création d’entreprises et d’emplois ?

par Dominique Mercier
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On a beaucoup parlé, à propos de la loi Macron, du travail du dimanche ainsi que de la libéralisation de certaines professions règlementées. Qu’en est-il en ce qui concerne la véritable création d’emplois? Trouve-t-on dans la loi des mesures de nature à relancer la « croissance et l’activité » ?

Comme nous l’avons plusieurs fois démontré sur ce blog, ce sont bien d’une part une minorité d’entreprises qui ont un potentiel de création d’emplois, mais d’autre part cette création n’est possible qu’à la condition que ces entreprises puissent recueillir des financements appropriés:

– Une étude de l’INSEE (la plus récente sur le sujet) montre que sur la période 1993-2003, 5% des entreprises françaises ont été à l’origine de 50% des créations brutes d’emplois[[Direction des Études et Synthèses Économiques, Les gazelles en France, Claude PICART, février 2006. http://www.insee.fr/fr/publications-et-services/docs_doc_travail/g2006-02.pdf]]. Les études faites à l’étranger semblent confirmer l’universalité du phénomène puisque ce chiffre est quasiment le même au Royaume-Uni où 6% des entreprises sont à l’origine de 50% des créations brutes d’emplois (étude Nesta[[The vital 6 per cent, How high-growth innovative businesses generate prosperity and jobs, Nesta, octobre 2009 : http://www.nesta.org.uk/sites/default/files/vital-six-per-cent.pdf]]) et aux États-Unis où 1% des entreprises sont responsables de 40% des créations (étude Kauffman[[Kauffman Foundation Research Series: Firm Formation and Economic Growth High-Growth Firms and the Future of the American Economy, Dane Stangler, mars 2010.]]). On nomme ces entreprises les high growth firms ou entreprises à forte croissance.

– Clé de l’explication du chômage français, une étude Irdeme montre que nous possédons justement deux fois moins de jeunes entreprises à forte croissance que le Royaume-Uni et qu’elles créent quatre fois moins d’emplois. Ces études montrent également une corrélation directe entre la création d’emplois et le montant des capitaux levés par ces entreprises à forte croissance, qui sont ainsi trois fois moins importants en France qu’au Royaume-Uni.

Au vu de ces chiffres, il est donc assez étonnant de constater que ni dans le projet initial de la loi Macron ni dans l’examen des amendements en commission spéciale n’aient été retenues des mesures en faveur de l’investissement dans les startups. Le quasi-seul dispositif de cette nature existant actuellement est celui de l’ISF-TEPA, qui permet à un individu d’investir jusqu’à 45 000 euros dans une PME et d’obtenir une déduction d’ISF de 50% du montant investi. Mais ce plafond est ridicule si on le compare à l’investissement maximal britannique équivalent de 1 million de livres. Il est donc saisissant qu’ait été refusée la proposition du député Jean-Christophe Fromantin[[Information rapportée par le site toutsurlisf.com : http://www.toutsurlisf.com/isf-pme-assoupli-le-oui-mais-d-emmanuel-macron.html]] de doubler ce plafond, ce qui ne nous aurait même pas amenés au dixième du plafond britannique.

Quand on sait que les dispositifs incitatifs de cette nature augmentent d’environ 50% les montants investis dans les entreprises et qu’il y a par ailleurs une corrélation directe entre l’emploi et l’investissement, on ne peut donc qu’être très affligé des propos du ministre Emmanuel Macron: « Je comprends votre volonté de vouloir améliorer le dispositif ISF-PME existant. [Mais] il est clair qu’elles ont un coût »[[Ibid.]]. Ainsi que nous l’expliquons dans l’autre article de ce dimanche une telle affirmation revient à méconnaitre l’effet positif de l’augmentation d’investissement sur les recettes fiscales.

Seuls certains délais de détention pour bénéficier de déductions d’impôt ont été assouplis. Un premier amendement permettra de raccourcir de 5 ans à 3 ans[[http://www.agefi.fr/fiche-actualite-eclairages/la-finance-pleinement-concernee-par-la-loi-macron-300.html]] le délai requis de détention des titres pour bénéficier des dispositifs ISF-PME et IR-PME. Un deuxième amendement permettra aux business angels investissant à partir d’une société d’investissement de revendre leur part au bout de sept ans au lieu de dix[[Durée nécessaire pour bénéficier d’une réduction d’ISF]]. Afin également d’ « améliorer le financement » des entreprises (cf. intitulé de la section dans le texte de loi), le gouvernement a très légèrement facilité l’attribution des BSPCE[[Les BSPCE donne le droit au manager bénéficiaire de souscrire, au cours d’une période déterminée, à des actions de son entreprise dont le prix est fixé lors de l’attribution. Désormais ce mécanisme sera possible pour les salariés des filiales détenues à au moins 75% du capital ou des droits de vote.]] (bons de souscriptions pour les créateurs d’entreprises) et accorder un régime fiscal plus avantageux pour l’attribution gratuite d’actions[[En cas d’attribution gratuite d’action la loi Macron prévoit par exemple une diminution de 30 à 20% des contributions patronales et une suppression de la contribution salariale, jusqu’à présent de 10%.]]. Si ces deux mesures vont dans le bon sens, on remarquera néanmoins qu’en fait de « financement », il ne s’agit nullement pour l’entreprise de voir le moindre argent frais augmenter son capital !

Les hommes politiques ont en permanence le mot « innovation » à la bouche mais ils semblent donc oublier que l’innovation n’est créatrice d’emplois que si l’investissement massif, rapide et avisé est possible. Dans un marché mondialisé, les innovateurs ont souvent des idées similaires à des intervalles de temps rapprochés. La réactivité et l’abondance des investissements sont donc devenues une condition nécessaire pour ne pas se faire prendre de vitesse par les concurrents, perdre des parts de marché et donc … renoncer à créer de l’emploi.

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