Si l’on se réfère à sa population, la France compte 158.000 fonctionnaires de trop, hors contrats aidés. Le plus inquiétant reste cependant le taux fonctionnarisation des agents.
Note : Dans cette rubrique « Libres propos », les Entrepreneurs pour la France expriment leurs opinions de manière complètement libre. Le point de vue avancé dans cet article ne donne donc que l’avis particulier d’un des membres d’Entrepreneurs pour la France. Il est néanmoins un apport intéressant dans le débat sur le nombre et le statut des fonctionnaires.
La France a trop de fonctionnaires, nous dit la rumeur publique, et cette affirmation est reçue comme un fait avéré. Aussi, dans le cadre des réformes qu’il entreprend de réaliser, le gouvernement aborde-t-il maintenant le difficile problème de la réduction du nombre des fonctionnaires. Emmanuel Macron avait annoncé le chiffre de 120.000 dans sa campagne électorale et François Fillon avait prévu un chiffre bien plus ambitieux, puisqu’il s’agissait de 500.000 postes à supprimer durant son quinquennat.
Comment évaluer le nombre véritable d’agents publics que la France a, ou aurait, en excès, et qui donc d’Emmanuel Macron ou de François Fillon a vu le plus juste ? Les économistes jugent toujours de l’importance des effectifs employés dans les services publics d’un pays en s’en rapportant à la population des actifs : ils nous disent qu’en France une personne sur cinq travaille dans le secteur public, contre une sur neuf en Allemagne, par exemple. La moyenne des pays de l’OCDE se situe à une personne sur six.
Population active ou population totale ?
Le rapport annuel de 2017 sur l’état de la fonction publique en France nous indique que les effectifs s’élèvent à 5.450.000 personnes, dont 2.398.000 dans la fonction publique d’État et 1.889.000 dans la fonction publique territoriale. Avec les bénéficiaires d’un contrat aidé, on en est à 5.640.000 personnes.
On commet une grave erreur en voulant rapporter le chiffre des agents publics à ce que les statisticiens de l’Insee appellent la « population active ». Notre pays a, en effet, cette particularité curieuse d’avoir un taux de population active très inférieur à ce qu’il est dans les autres pays : 43,1 % seulement d’actifs, par rapport à la population totale du pays, contre 51,7 % pour l’Allemagne, 52,5 % pour les Pays Bas, ou encore 53,1 % pour la Suède. La moyenne des pays de l’Union européenne se situe à 47,7 %.
Le taux français est une anomalie rare : prendre la population active comme référence, n’est donc pas la bonne méthode. Ce qu’il convient de faire, c’est de se référer à la population totale de ces pays, puisque les agents des services publics travaillent pour l’ensemble des habitants, et pas seulement pour la population dite « active ».
On découvre alors que la densité d’agents publics, comptée pour 1.000 habitants, varie considérablement d’un pays à l’autre. Les chiffres vont de 6 personnes pour 1.000 habitants en Bulgarie, 58 en Espagne, 95 en Israël, 117 en Suède, à 168 en Norvège ! Avec 84 agents dans les services publics pour 1.000 habitants, la France est au milieu du peloton : son chiffre est inférieur à celui de l’État d’Israël, un pays réputé pour son sens de l’efficacité.
Tendre vers 80 fonctionnaires pour 1.000 habitants
Ces écarts tiennent essentiellement au niveau de développement économique des pays, et c’est, là, une variable que l’on ne fait jamais intervenir : plus un pays est riche, plus il a la possibilité de dédier un nombre important d’agents à des tâches qu’il considère comme étant d’intérêt général. On s’aperçoit, en effet, qu’il existe une assez bonne corrélation entre le PIB per capita des différents pays et le nombre de personnes employées dans la fonction publique pour 1.000 habitants.
Cette corrélation, en prenant le PIB/tête comme variable explicative, fait apparaître que la France se situe sensiblement au-dessus de la droite de régression. Selon cette corrélation, la France devrait en être à 79 emplois publics pour 1.000 habitants. Ce ratio conduit, pour une population s’élevant à 66,9 millions d’habitants fin 2016, à un effectif « normal », en matière d’emplois publics, de 5.292.000 personnes.
L’excédent, ainsi évalué, serait donc de 348.000 personnes. En ne tenant pas compte des contrats aidés qui, normalement, devraient être supprimés, cet excédent ne serait plus que de 158.000 agents. Emmanuel Macron se trouve, avec son estimation de 120.000 agents, légèrement en dessous de ce qu’il conviendrait de faire, pour autant qu’il supprime rapidement ces contrats aidés qui relèvent de l’aide sociale.
Quant aux 500.000 postes à supprimer qui figuraient dans la campagne électorale de François Fillon, on voit que le candidat de la droite manifestait la volonté de faire bien mieux que la moyenne des pays, s’alignant sur l’exemple de l’Allemagne ou des Pays-Bas, des pays particulièrement économes des deniers publics.
Notons que si l’on optait pour la méthode habituelle consistant à se référer aux effectifs de la population active des pays, il faudrait alors viser l’objectif de 4.766.000 personnes dans la fonction publique pour se situer dans la moyenne OCDE.
Recourir aux contractuels de droit privé
L’anomalie française, et il y en a effectivement une, se situe dans le taux extrêmement élevé de fonctionnarisation des agents de la fonction publique. On a, en effet, les chiffres suivants : France (81 %), Allemagne (30 %), Italie (15 %) et Suède (10 %).
Le taux français est exorbitant, et il frise l’absurde. Au Royaume-Uni, seuls quelques centaines de hauts fonctionnaires bénéficient d’un emploi à vie. En Suède, un effort considérable a été fait pour que la plus grande partie des agents de la fonction publique soit employée, à présent, selon des contrats semblables à ceux du secteur privé. Quant à la Suisse, elle se caractérise par le fait qu’en 2002, par référendum, le statut de fonctionnaire a, tout simplement, été aboli.
La réforme principale à laquelle il faut procéder, en France, consiste donc à réduire considérablement le nombre des agents bénéficiant d’un statut leur assurant un emploi à vie. Cela donnera aux responsables des services publics de la souplesse dans la gestion de leurs effectifs, et sera de nature à accroître très sensiblement la productivité de ces personnels. Il va donc s’agir de ne pas se tromper sur la nature des réformes à accomplir.
Claude Sicard, économiste et consultant international
Article paru sur Le Cercle/Point de vue des Echos sous le titre « Fonctionnaires : combien de postes faut-il supprimer ? »
7 commentaires
158.000 en trop : n’est-ce pas plutôt 1 580 000 ?
1979 = 2 100 000 fonctionnaires, 2015 = 6 500 000 (INSEE) réduit à 4 500 000 par des mathématiques miraculeuses en 2017 toujours INSEE.
L’état s’occupe de TOUT mal voire très mal au lieu de de rétrécir le périmètre de ses charges et intervention,pour les effectuer MIEUX voire bien.
Mis à part les services régaliens de terrain, sauf une purge magistrale des « bureaux », les autres activités de l’état sont une concurrence parfaitement déloyale à la société civile qui,elle, agit dans un cadre concurrentiel qui l’oblige à innover et réduire les factures à ses clients.
Le secteur de l’exception culturelle par exemple est une excellente planque pour nombre de fonctionnaires et autres entreprises parasites.
Eclairage intéressant qui amène des solutions !
L’état dépense chaque année pour son budget, et ce depuis des années voire des dizaines d’années, 25% de plus que ce qu’il encaisse. Ce qui conduit l’endettement de la France à ne jamais diminuer ni à se stabiliser. Nous allons vers les plus de 100% de dettes par rapport au PIB. Alors comment faire ? Si on exclut d’achever d’étouffer les « vaches à lait » entreprises ou d’imposer toujours plus les particuliers travailleurs et talentueux,il reste deux grandes solutions.
L’une consiste à réduire, de manière aveugle, considérablement le nombre de fonctionnaires et la redistribution sociale actuelle massive, injuste et exagérée. cette solution baissera les dépenses mais prise seule, ne résout pas le long terme. L’autre est suscitée par votre analyse.
En fait on constate, d’après votre analyse, que le rapport nombre fonctionnaire / nombre de travailleurs créant des richesses est élevé alors que le rapport nombre de fonctionnaires / nombre de français est moyennement élevé. La meilleure solution, triviale !, est dans le fait de mettre au travail un plus grand nombre de français pour améliorer le premier ratio. Cela passe, compte tenu de notre endettement, par de vrais mesures qui libéreraient les entreprises pour qu’elles puissent embaucher (smic abaissé dans les régions, abaissé pour les jeunes et les non qualifiés, baisse importante des charges patronales sur tous les salaires, baisse des impôts sur les sociétés, baisse des impôts sur le revenu, augmentation des seuils sociaux, CDD reconductible autant que nécessaire jusqu’à une durée totale de 3 ans, CDIC avec une prime de licenciement réduite à un an, sécurisation des propriétaires bailleurs privés,…).
Il est vrai que pour plus de justice et une meilleure efficacité de cette dernière solution, une diminution de plusieurs dizaines de milliers du nombre de fonctionnaire reste nécessaire. Tout simplement pour arriver à dégager du budget pour baisser les cotisations patronales et les impôts. De nombreux fonctionnaires osent parler et dire qu’il existe des gisements importants de productivité dans la fonction publique d’état, la fonction publique territoriales et les entreprises du paritarisme. Il faut aussi supprimer, dans la fonction publique, l’égalitarisme et l’avancement à l’ancienneté, qui se révèlent très injuste et qui mènent actuellement à un nivellement vers le moins faisant et le moins compétent. Les témoignages abondent en ce sens.
Correction
En fait le CDIC (contrat à durée indéterminé de chantier) doit avoir au maximum un préavis de licenciement de un mois (en Espagne c’est 15 jours).
Zelectron pose le problème du périmètre de l’état. Effectivement, il y a lieu de le cantonner au régalien. Il faut aussi ajouter que les syndicats de fonctionnaires français ont trop de capacités de nuisance. Le statut interdit dans de nombreux états le droit grève aux fonctionnaires. il faut aussi poser la question à qui doit on attribuer le statut de fonctionnaires. A ce sujet il est contradictoire avec l’esprit original du statut de l’accorder, par exemple à des jardiniers ou à des techniciens de surface, …
Tout se résume par la formulation suivante
« Les seuls travailleurs, travailleuses qui apportent la vraie richesse sont ceux, en tout premier lieu, de l’agri-agroalimentaire puis de l’industrie, les autres que ça leur plaise ou non dépendent de ces manufacturiers. »
A titre d’exemple limité, hormis leurs bureaux de tutelle respectifs, les gens de terrain de l’enseignement, la force publique, l’hôpital publique, des finances sont non seulement utiles mais surtout nécessaires,
Au fond, L’ÉTAT DOIT SE TRANSFORMER EN ARBITRE ET NE PLUS JAMAIS SE MÊLER DE LA PARTIE
La dette….2000 milliards et alors
Le chiffre est tel que personne ne réalise ce que çà veut dire… eh bien faisons simple 26 millions d actifs fonctionnaires compris 70000 €par actif 100000 par actif du secteur marchand. … faite l expérience posez la question autour de vous …moi je ai obtenu 2000 ou 3000 €. Pourquoi donc ne pas traiter du sujet de façon compréhensible ? ?????
Source ?
Bonjour,
« Quant à la Suisse, elle se caractérise par le fait qu’en 2002, par référendum, le statut de fonctionnaire a, tout simplement, été aboli. »
Auriez-vous une source à l’appui de cette affirmation ? Je n’ai rien trouvé. Merci !
Faire
Qu’il y est une inflation galopante de fonctionnaires est une évidence. Je parle notamment de la fonction territorial.
Alors supprimer*des fonctionnaires ? oui
Mais il y a des freins, et l’énarchie en tout premier lieu; l’ENA Ecole Nationale ADMINISTRATION qui est la principale ‘génitrice’ de réglementations, de normes, et par conséquent de hauts et petits fonctionnaires => c’est quasiment corrélé. Ils ne vont démonter les ‘usines à gaz’ qu’ils ont érigés non mais… Le CNEN Conseil National d’Evaluations des Normes l’explique bien dans le journal ‘Le Point’ du 24/01/2019.
Tant que cette école sera en place il n’y a rien a attendre. Elle est, elle même, en déficit notamment à cause d’une inflation de fonctionnaires dans l’école… à pleurer.
Je suis en Région et j’ai constaté, lors des fusions, que l’addition de nos anciennes régions ne générait même pas d’économie d’échelle, qui sont pourtant EVIDENTES. Le plus grave, certains d’entre vous le savent, les effectifs ont augmenté dans la plupart des nouvelles régions.
Pour étayer mon propos: Dans ma carrière professionnelle, j’ai eu l’occasion (dans une grande entreprise industrielle française) de participer activement à une fusion de 2 grandes directions.
Sans rentrer dans les détails, je peux vous affirmer que les économies d’échelle et celles liées à la redimensionnement des postes ont générés pratiquement 10% d’économie. Il est vrai que l’animation était pilotée par un X Pont. Ils savent compter…eux.
C’est aussi possible dans la fonction publique. Il faut museler l’énarchie et faire…
* Les effectifs grossissent encore