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Inégalités et croissance, l’erreur de l’OCDE

par Bernard Zimmern
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Jean Nouailhac, dans LePoint.fr, vient de lancer une bombe sous le titre « un scandale statistique à l’OCDE ? ».

L’article du Point explique l’essentiel : comment en changeant de variable, en passant du revenu national par tête au revenu national [Précisément du PIB/tête au PIB]], la relation entre inégalités et croissance trouvée par l’OCDE (les inégalités réduiraient la croissance) s’inverse et comment un lien, en fait quasi inexistant, est créé par l’OCDE en divisant ce revenu par la population dont l’immigration est devenue un paramètre essentiel.

Mais avant de présenter ces résultats au Point, comme dans tout travail sérieux, nous avions fait d’autres vérifications qui sont présentées en détail sur notre site irdeme.org sous le titre « inégalités et croissance, l’erreur OCDE » et que nous reprenons de façon plus concise ci-après

Le rapport de l’OCDE du 21 mai 2015 ”In It Together : Why Less Inequality Benefits All” est grave car il prétend montrer que les inégalités en augmentation, observées dans les économies, notamment occidentales, réduiraient la croissance.

Explicitement ou implicitement, ce rapport invite à taxer les riches ; alors que ceux qui sont devenus riches sont ceux qui ont créé l’essentiel des emplois dans des pays comme les USA et ont permis à des dizaines de millions de migrants de trouver un travail.

Ceux qui dénoncent ces riches sont irresponsables car nous avons encore plus besoin d’avoir des entrepreneurs qui créent des entreprises et qui financent celles d’autres entrepreneurs. Et ils ne le feront que s’ils ont l’espoir de s’enrichir, pas d’être mis à l’index ou surtaxés.

Le rapport de l’OCDE du 21 mai 2015 ne fait que reprendre un rapport publié en novembre 2014 sous la signature de Frederico Cingano, un membre de la section sociale de l’OCDE.

Ce rapport de quelque soixante-cinq pages démontre, à partir de statistiques très sophistiquées, que Frederico Cingano et son équipe ont pu donner une réponse à une question autour de laquelle s’affrontent les meilleurs économistes mondiaux depuis au moins un demi-siècle : les inégalités de revenus sont-elles bénéfiques ou au contraire néfastes à la croissance d’un pays ?

Dans le préambule de ce rapport, Frederico Cingano rappelle que les premiers économistes à s’être intéressés à cette question auraient trouvé une relation positive entre inégalités et croissance, mais que d’autres ayant repris le même problème seraient parvenus au résultat contraire. Ce développement est appuyé sur une bibliographie, citée en fin de rapport, de 70 références.

À partir de la base statistique de l’OCDE couvrant le PIB et les inégalités dans 31 pays, lui et son équipe auraient réussi à sortir de cette ambiguïté en montrant, par l’utilisation de la méthode des moments généralisés inventée par le prix Nobel Hansen en 1983, qu’il existe un coefficient négatif entre inégalités et croissance du PIB par tête et que ce coefficient présente une solidité statistique quasi indiscutable.

Ce coefficient montrerait que pour toute augmentation des inégalités d’un point (1 %) de l’indice des inégalités de Gini, la croissance annuelle d’une économie se réduirait de 0,13%. Un tableau donnant les pertes de croissance de la plupart des grands pays suggère que si la croissance des économies est devenue si faible, les inégalités en sont responsables.

Cette conclusion a été reprise par les médias et les hommes politiques, et elle est devenue le crédo collectif : il faut réduire les inégalités si les pays de l’Ouest veulent retrouver la croissance.

L’OCDE s’est trompée ou a été trompée par Frederico Cingano et son équipe par un artifice très simple : ils ont pris pour leurs calculs la mauvaise variable.

Nous avons repris leurs mêmes bases et leurs mêmes méthodes de calcul et avons retrouvé grosso modo les mêmes résultats.

Mais en changeant la variable expliquée, le PIB par tête, tout simplement en PIB, nous avons bien trouvé avec les mêmes bases et les mêmes calculs une relation, mais cette fois en sens inverse : l’augmentation des inégalités induit une augmentation de la croissance du PIB de 0 ,12 % par an.

CONFIRMATIONS

1. Nous avons retrouvé une étude de 2002 de Dauphine Paris utilisant des méthodes statistiques déjà très sophistiquées et qui concluait qu’il ne semblait pas y avoir de lien entre inégalités et croissance du PIB.

Compte tenu de la faiblesse, tant du coefficient que nous avons trouvé que de celui trouvé par l’OCDE, il nous semble que, si un lien existe, il est en effet économiquement insignifiant.

2. Mais une liaison statistique forte est créée en utilisant le PIB par tête et non le PIB.
En effet, le PIB par tête est obtenu en divisant le PIB par la population et cette division introduit dans le calcul la variable statistique population dont les fluctuations les plus importantes sont celles provenant de l’immigration.

Par exemple, les États-Unis voient leur croissance avant 2008 tomber de 3 % par an à 2 % si l’on passe du PIB au PIB par tête. Leur population croît en effet de 1 % par an dont un tiers en raison de l’immigration et notamment de l’immigration de latinos pauvres et généralement peu éduqués.

En divisant par la population, Frederico Cingano diminue ainsi la croissance mais il augmente les inégalités car cette immigration vient accroître les populations les plus déshérités des États-Unis, créant ainsi un lien négatif entre croissance et inégalités.

3. Il est intéressant de voir à la page 21 l’auteur déclarer qu’il n’a pas pu montrer que les inégalités jouant sur la croissance provenaient des inégalités du haut, c’est-à-dire de l’enrichissement des plus riches, mais seulement de l’inégalité du bas, c’est-à-dire de l’appauvrissement des plus pauvres. Et il développe avec la méthode des moments généralisés des calculs complémentaires pour montrer que ceci provient d’une variable économique inventée dans les années soixante, le capital humain dont le principal élément est le niveau d’éducation.

C’est donc ce capital humain, notamment la baisse d’éducation des catégories les plus pauvres, qui serait responsable de la réduction de la croissance.

À aucun moment Frederico Cingano ou son équipe ne se demandent si l’immigration ne pourrait être le facteur explicatif de cette chute du niveau d’éducation.

C’est sur ce genre d’exercice statistique que s’appuient la plus grande organisation économique occidentale et son secrétaire général…

4. Il est intéressant de noter qu’une autre étude, non citée par l’OCDE, réalisée en Suède en 2015, montre que les inégalités ont augmenté dans ce pays mais que cette augmentation est due à l’immigration ; sans l’immigration, il n’y a pas de changement des indices d’inégalité.

 

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5 commentaires

HUBIN novembre 30, 2015 - 2:56 pm

les experts sont souvent ignorants ,surtout quand ils le veulent !
vous avez toujours et encore raison
il est invraissemblable que les experts ne comprennent pas que l'introduction dans un pays de populations pauvres et incultes rend impossible l'élévation des ressources moyenne par individu et tire vers la bas la richesse par tete, ils font exprés de ne pas comprendre !
ce n'est quand meme la meme chose d'augmenter le nombre de pauvres en en important que d'accroitre le nombre de pauvres par l'appauvrissement des classes moyennes
ce qui s'est passé c'est l'accroissement de la richesse moyenne de ceux qui étaient présents au début de la période de référence et l'introduction de gens pauvres pendant cette période dont seulement une fraction a été vraiment intégré économiquement
comme vous concluez, il faut ,si on veut pousuivre (mais est ce bien ? j'en doute cf la Suisse ! ) l'importation de pauvres ,encourager les riches présents au début à rester et à continuer à s'enricher donc à creer (des emplois ) et à investir (dans des entreprises ! ) pas à se se réfugier à Londres ,Bruxelles , la suisse ou la retraite paresseuse

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Peyo décembre 20, 2015 - 12:57 am

Ces pelés, ces galeux
Bien sûr, personne n'ignore que tous les maux proviennent de ces immigrés qui viennent manger notre pain, violer nos femmes et corrompre nos valeurs ! J'ignorais qu'en outre ils étaient responsables – indirectement bien sûr – de biais statistiques !
Je crois que c'est Mark Twain qui affirmait qu'il existait trois types de mensonges : le mensonge, le mensonge sacré et le mensonge statistique. Il suffit, sans même corrompre les chiffres, d'en choisir la forme qui correspond le mieux à la démonstration que l'on veut faire pour démontrer que c'est l'autre qui est le menteur.
Choisir le PIB global comme indicateur au lieu du PIB/hab témoigne de l'idéologie qui conduit la pensée de celui qui l'emploie : c'est celle de l'utilitarisme. Elle a sa logique, elle a sa consistance : il s'agit de maximiser le bien-être collectif (ici le revenu global) c-à-d la somme des bien-être individuels. Sans se préoccuper du sort des individus, même nombreux, en état de mal-être dès lors qu'ils n'ont que peu d'impact sur le résultat global. D'un point de vue éthique – et même économique – on il est permis de penser autrement.

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Bernard Zimmern décembre 21, 2015 - 2:03 am

Ces pelés, ces galeux
Impossible d’établir un dialogue si vous affirmez que l’idéologie est ce qui guide ceux qui présentent des démonstrations que vous n’avez même pas lues. Ce que j’ai montré, c’est qu’il n’y avait pas de lien sérieux entre inégalités et croissance, que ce soit PIB/tête ou PIB. Comme montré non seulement par l’inversion de signe de la relation, mais pas le rapport même de l’OCDE si vous allez un peu plus loin que la page 17. Et l’étude DIAL de Dauphine en 2002 ou le rapport de l’université Linnaeus.

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Peyo décembre 27, 2015 - 12:13 am

Ces pelés, ces galeux – suite et fin
Effectivement il est difficile d'établir un dialogue avec quelqu'un qui suspecte autrui de tricher (les auteurs du rapport OCDE) ou de ne pas savoir lire plus de 18 pages d'un écrit qui en contient 370 (l'auteur de ces lignes). Pour dialoguer il faut au moins respecter l'autre. Et je pense avoir été respectueux dans mon message initial en concédant que votre logique ne manquait pas de consistance.
Je passe rapidement sur cette question subalterne, la critique qui m'est faite de taxer votre démarche d'idéologie : il n'y avait pas de connotation négative dans l'emploi de ce terme et je vous invite à (re)lire ce qu'écrivait à ce propos Paul Ricœur lorsqu'il définissait l'idéologie et l'utopie comme "deux expressions de l'imaginaire social". Il reste qu'il est bien évident qu'on ne peut mener une recherche – qu'elle soit économique ou autre – sans poser a priori un certain nombre d'hypothèses qu'il s'agit de confirmer ou d'infirmer.
Sans me prononcer sur le fond, ce qui n'est pas dans mes compétences, j'observe d'abord que l'étude en question, fondée notamment sur la prise en compte de la notion de "capital humain", s'insère parfaitement dans la démarche économiste néoclassique orthodoxe. Elle n'a rien de marxiste (archéo, crypto ou néo) ! Comme toute étude économétrique il est permis de contester le modèle de régression adopté, les variables retenues, etc. D'ailleurs tout le monde sait que le PIB qu'il soit global ou sous forme de ratio, est très discutable. On peut aussi diverger sur l'interprétation des résultats (p. ex. quelle est la cause, quel est l'effet ?). D'ailleurs les auteurs de l'étude laissent honnêtement place au débat en précisant que les études empiriques ne donnaient pas de résultats très significatifs (notamment p. 68 : eh oui je suis arrivé au moins à cette page !). Le débat et la contestation sont de saines disciplines. Mais pas la suspicion d'incompétence ou de manipulation, pas l'injure (par exemple, dans un autre article, évoquer l'escroquerie à propos de Piketty). De là à utiliser d'autres variables ou d'autres formes de variables plus à même de permettre de démontrer ce qu'on veut démontrer…
C'est toute la différence qu'il y a entre science et opinion. Comme l'écrivait Alfred Sauvy la première "part du fait, de l'expérience et va vers l'action ou la décision à prendre, en passant par le raisonnement logique". La seconde "part de la conclusion et remonte aux faits “nécessaires”. Il ne lui reste plus qu'à prouver que les faits sont bien ainsi, ce qui est toujours possible, par une sélection appropriée".
Mais je suis disposé à lire aussi objectivement que possible et plus loin que la page 18, la contre-étude que vous avez produite. Et, malgré le petit différend qui nous oppose, je reconnais que vous avez eu la courtoisie de ne pas écarter mon message.

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Dominique janvier 12, 2016 - 4:37 pm

Ces pelés, ces galeux – suite et fin
Réponse de Bernard Zimmern:

Nous partageons je crois les mêmes préoccupations sur l’éthique de la recherche.
La raison de ce que vous pouvez peut-être considérer comme un parti pris est que le communiqué OCDE repris par les médias ne s’embarrassait pas de considérations: les inégalités réduisent la croissance; conclusion il faut taxer davantage ceux qui s’enrichissent trop (le 1% si l’on suit Stiglitz ou Piketty).
Mais comme j’espère le prouver à travers l’étude du SCF que j’ai commencé à publier, ce 1% est ce qui a fait 60% de l’emploi américain et ont sorti de la misère 30 millions d’immigrants en 30 ans; ce dont nous avons besoin, ce sont des entrepreneurs qui prennent des risques et créent des emplois en devant riches car la richesse n’est pas une fin mais un moyen pour celui qui veut créer les entreprises de demain et s’assurer contre les risque de la conjoncture.
Le message égalitariste invite donc à créer le chômage et est sur ce point une hypocrisie car quoi de plus inégalitaire que de condamner les gens à ne pas avoir d’emplois.
Il nous faut plus de milliardaires et de millionnaires mais enrichis par leurs entreprises en prenant des risques.

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