Avec le succès que le parti melanchoniste vient de remporter aux élections législatives, le gouvernement va être mis sous pression pour accroitre le pouvoir d’achat des Français. Le thème du pouvoir d’achat a, en effet, été un sujet central dans les campagnes électorales qui viennent de se dérouler et la NUPES s’est fait le parti de l’amélioration du pouvoir d’achat des Français, avec un SMIC qui serait porté à 1500 euros, le dégel du point d’indice des fonctionnaires et le blocage des prix sur les produits de première nécessité.
Il faut donc examiner comment se situe le pouvoir d’achat des Français par rapport aux autres pays européens, et de nombreuses études existent en ce domaine. Mais une précaution essentielle est à prendre, dans ces comparaisons internationales : il faut tenir compte avant tout du niveau de richesse des pays, ce que l’on omet généralement de faire, faute de quoi on aboutirait à des conclusions totalement irréalistes.
Les économistes raisonnent d’une part sur le salaire moyen des habitants et de l’autre sur le salaire minimum, et les comparaisons se font soit en monnaie ordinaire soit en PPA, c’est-à-dire en « Parité de Pouvoir d’Achat ».Avec un même salaire nominal, le pouvoir d’achat n’est en effet pas le même, selon les pays.
Le salaire moyen, selon les pays
Nous nous référerons aux données fournies par l’OCDE :
Hongrie | 25.409 | OCDE | 49.165 |
Chili | 26.729 | Allemagne | 53.745 |
Portugal | 28.410 | Norvège | 55.780 |
France | 45.581 | Pays- Bas | 58.828 |
Suède | 47.020 | Suisse | 64.824 |
En tenant compte des PIB/tâte des pays, l’indice qui est utilisé par les économistes pour exprimer la richesse des pays, on a la corrélation suivante :
On voit sur ce graphique que la France se situe au dessus de la droite de régression. L’équation qui lie le niveau de richesse des pays aux salaires moyens indique que notre pays, compte tenu de son niveau de richesse en est à un salaire moyen se situant à 10,5 % au dessus de ce qu’il devrait être. Les français auraient donc ainsi un niveau de rémunération sensiblement supérieur à ce que permettrait normalement la richesse du pays.
On notera qu’il s’agit, ici, des salaires bruts, et il faut donc, pour en arriver aux salaires nets déduire les cotisations salariales. Cela ne change pas la conclusion car la France est, à cet égard, dans la moyenne de ce qui se pratique ailleurs : 8,3 % sur le salaire brut contre 8,21 % pour la moyenne des pays de l’ OCDE.
Le salaire minimum, selon les pays
Dans un certain nombre de pays la puissance publique a fixé un salaire minimum légal. Nous nous en référerons, ici, aux données fournies par Eurostat :
Hongrie | 624 | France | 1.603 |
Pologne | 635 | Allemagne | 1.621 |
Tcheq. | 646 | Pays-Bas | 1.725 |
Espagne | 1.126 | Lux. | 2.257 |
Comme précédemment, nous ramènerons ces données aux PIB/tête des pays, et c’est ce que montre le graphique suivant :
On voit sur ce graphique que la France se situe très au dessus de la droite de corrélation, l’équation qui lie les niveaux de salaires minimums aux PIB/tâte indiquant que nous nous situons à 30 % au-dessus de la norme.
Le niveau du salaire minimum a donc été fixé à un niveau extrêmement élevé dans notre pays, ceci traduisant le fort souci d’égalité qui est celui de notre république comme cela est indiqué dans sa devise « Liberté, égalité, fraternité ». Cela a pour conséquence de resserrer l’écart entre le salaire minimum dans le pays et le salaire moyen : on est en France au coefficient 2, alors que partout ailleurs on a un rapport de 2,5.
Le salaire moyen, en PPA
Il s’agit, là, d’apprécier le niveau de vie réel de la population, en tenant compte du coût de la vie dans les différents pays. Nous nous référerons pour cela à une étude INSEE intitulée « Salaires, niveaux de vie et pauvreté », parue en décembre 2020 :
Bulgarie | 9.336 | France | 23.097 |
Roumanie | 7.311 | GB | 22.009 |
Grèce | 10.621 | Pays-Bas | 24.067 |
Espagne | 18.363 | Suède | 22.143 |
UE | 19.517 | Lux. | 38.234 |
Source : INSEE |
En tenant compte des niveaux de richesse des pays, on est conduit à la corrélation suivante :
On voit sur ce graphique que la France est nettement au dessus de la droite de corrélation, ce qui signifie que les ménages ont en moyenne un niveau de vie supérieur à ce qu’autorise normalement le niveau de richesse du pays. L’équation de la courbe indique qu’avec le PIB/tâte qui est le notre on devrait se situer à seulement 19.187 euros annuels, soit un niveau de vie supérieur de 20% à ce qui qu’autorise le niveau de richesse du pays.
Les enseignements à tirer de cette approche
On dégage de l’approche que nous proposons les enseignements suivants :
1- En premier, un salaire moyen des français supérieur de 10,5 % à ce qui serait attendu normalement du niveau de richesse du pays ;
2- Il s’en suit un niveau de vie supérieur de 20 % à ce qu’autorise le degré de développement du pays, ceci résultant des prix des produits en France. Les Français vivent donc au dessus de leurs moyens, bénéficiant par ailleurs d’une prise en charge de leurs dépenses de santé presque totale, c’est-à-dire avec des « reste à charge » plus faibles que partout ailleurs, et une quasi gratuité de l’enseignement aux différents niveaux. Il en résulte, pour la nation, un recours chaque année à de l’endettement, avec une dette qui dépasse maintenant le PIB, et qui ne cesse de croitre.
3- Un salaire minimum fixé extrêmement haut afin de favoriser les personnes se situant tout en bas de l’échelle sociale, ce qui s’exprime par un indice de gini relativement proche de celui des pays du Nord : 29,3 pour la France, contre 26,3 pour la Suède, par exemple, et 27,7 pour le Danemark. Des pays beaucoup plus inégalitaires sont à des niveaux bien plus haut : 41,5 pour les Etats-Unis, et 44,8 pour le Venezuela, par exemple.
4- Le fait d’avoir un salaire minimum se situant très haut a pour effet de resserrer beaucoup l’échelle des rémunérations : on est ainsi en France à un coefficient de 2 entre salaire minimum et salaire moyen, alors que partout ailleurs il s’agit plutôt du coefficient 2,5.
Puissent donc ces informations situer le caractère totalement irréaliste des mesures envisagées par le parti de la NUPES dont on peut se demander à quelles sources s’abreuvent les économistes sur lesquels se fonde monsieur Mélanchon pour préparer ses reforme économiques.