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Éducation : éviter l’échec de 8% d’enfants

par Dominique Mercier
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La plupart des jeunes qui seront en échec scolaire et illettrés sont repérables dès l’âge de 2 ans. S’ils sont pris en charge par des ateliers d’éveil, ils atteindront le baccalauréat pour la majorité d’entre eux.

On connait depuis quelques années les résultats calamiteux de l’Éducation nationale, dont un rapport du Haut Conseil de l’éducation[[Rapport de 2009.]] donne un bon aperçu:

« Chaque année, quatre écoliers sur dix, soit environ 300.000 élèves, sortent du CM2 avec de graves lacunes :
près de 200.000 d’entre eux ont des acquis fragiles et insuffisants en lecture, écriture et calcul ;
plus de 100.000 n’ont pas la maîtrise des compétences de base dans ces domaines. »

Le rapport poursuit :

« Comme la fin du CM2 n’est plus la fin de l’école obligatoire, leurs lacunes empêcheront ces élèves de poursuivre une scolarité normale au collège. »

Cet échec cuisant du système étatique peut s’analyser sous plusieurs angles. Il est évident premièrement que les méthodes d’éducation (lecture globale, « l’élève doit découvrir par lui-même », suppression du « par cœur ») tout comme les contenus (enseignement tronqué de l’économie et de l’histoire) devraient être changés. Mais outre ces aspects généraux, il devient de plus en plus évident que beaucoup d’enfants ont des besoins éducatifs spécifiques, en raison, soit de leurs aptitudes, soit de leur milieu social ou de leur style de vie[[primo-arrivants, malades, précoces, bilingues, gens du voyage, handicapés, enfants pratiquant un sport, etc.]]. Parmi ceux-ci, il en est dont l’absence de repérage comporte un gros risque : faute de prise en charge spécifique, ils ne sauront vraisemblablement jamais ni lire ni écrire correctement et continueront à alimenter le bataillon des 150.000 jeunes qui quittent chaque année le système scolaire sans qualification.

En fait, les associations de terrain savent depuis longtemps que l’échec de ces milliers d’enfants n’est pas le fait du hasard, et les enseignants savent prédire les échecs scolaires futurs dès la maternelle. C’est même avant cet âge qu’il faut détecter les enfants et c’est pourquoi la collaboration des PMI (organismes de protection maternelle et infantile) est précieuse. Dans la ville de Boulogne par exemple, les 3 PMI ont fait un travail remarquable pour repérer ces enfants et les orienter vers des associations de terrain.

Qui sont ces enfants et comment une prise en charge peut-elle les sauver ?

Ces enfants sont tous issus de familles peu socialisées, majoritairement immigrées, ne parlant pas ou peu notre langue. Ces familles surprotègent leurs enfants ; de plus, ce sont ces enfants qui sont le plus souvent absents, ce qui laisse donc imaginer le peu de succès de leur parcours futur. Ces enfants représenteraient par exemple de l’ordre de 8% des enfants de la ville de Boulogne-Billancourt, chiffre pas très éloigné des 12% nationaux « qui ne maîtrisent pas les compétences de base » en lecture, écriture et calcul à la fin du primaire.

Ces enfants connaissent donc les caractéristiques suivantes :

– Ils viennent de familles ne parlant pas ou peu le français ;
– Ils sont issus de familles défavorisées sur le plan culturel (qui possèdent très peu de vocabulaire même dans leur langue d’origine) ;
– Ils viennent de familles où règne souvent une certaine violence ;
– Ils sont issus de familles dépendantes des aides sociales ;
– Ils sont issus de familles repliées sur elles-mêmes.

Outre ces défauts, les associations constatent les grandes difficultés des mères à éduquer leurs enfants, du fait notamment du statut de la femme, souvent peu à l’honneur dans ces familles. Les enfants voient leur père taper leur mère et reproduisent les mêmes comportements sur les femmes qu’ils côtoient, y compris en dehors de leur milieu familial, dans la mesure où elles représentent le manque d’autorité dont fait preuve leur mère.

C’est pour l’ensemble de ces raisons qu’ont été créés dans quelques villes de France des « ateliers d’éveil », dispositifs pour les enfants de 2 ou 3 ans issus de ces familles, afin d’une part de les socialiser et de leur apprendre les règles du savoir-vivre, afin d’autre part de stimuler leur intelligence et leur capacité de concentration par un ensemble d’activités ludiques. À l’initiative de Marie-Claire de Trentinian, ancienne élue municipale, l’association de Boulogne-Billancourt est l’une des pionnières en France.

Une directrice de ce type de structure témoigne : « On chante beaucoup de chansons, des rondes… On leur apprend à écouter, à se mettre en rang sans se rouler par terre de colère… On leur apprend à ranger leurs jouets. C’est d’ailleurs amusant de voir tout de suite le petit leader qui dit d’un air sévère : « T’as pas rangé ! » à un autre enfant… ». Si ces enfants sont pris en charge dès leur jeune âge, ils obtiennent ensuite dans la plupart des cas leur baccalauréat.

Une étude américaine a d’ailleurs vérifié scientifiquement ce qui a été constaté empiriquement par ces associations. Chercheur et psychologue, Elliot Tucker-Drop explique ainsi que les enfants provenant d’un milieu défavorisé qui sont allés à la prématernelle réussissent deux fois mieux en mathématiques et trois fois mieux en lecture à l’école que ceux du même milieu qui n’y sont pas allés[[Voir : http://naitreetgrandir.com/fr/nouvelles/fiche.aspx?doc=20120302-prematernelle-ecole et http://pss.sagepub.com/content/early/2012/02/21/0956797611426728.abstract?rss=1]]. Les enfants de milieux favorisés n’en tirent par contre que peu ou pas d’avantage, recevant déjà dans leur famille une stimulation suffisante des « gènes de l’intelligence ».

Malheureusement, des initiatives de ce type sont encore trop peu courantes en France. Il faudrait étendre considérablement ces ateliers d’éveil en favorisant les initiatives privées.

 

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