Le Sénat vient de voter cette semaine l’application de la nouvelle loi concernant les congés parentaux de paternité. Nous avons déjà évoqué ce sujet, je le résume : le congé paternel passe de 14 à 28 jours dont sept obligatoires.
Je vous ferai grâce de la totalité des attendus qui sont un véritable salmigondis de toutes les tendances « in » du moment. On peut tout de même en reprendre quelques-unes en détail car particulièrement savoureuses :
En fait, un jour de congé supplémentaire par an toute votre vie (ou 2 ou 3)
A titre purement informatif et arithmétique, 15 jours supplémentaires de « congé » de paternité, cela représente, si vous calculez bien et si vous faites trois enfants, 45 jours sur une carrière moyenne d’environ 45 ans, donc un jour de congé supplémentaire par an. Personne n’a pensé qu’un homme « avide » pourrait se laisser aller à faire six enfants à sa femme pour gagner deux jours, voire 9 (avec deux femmes différentes peut-être) pour en gagner 3).
Les restaurateurs et les libraires vont particulièrement apprécier « l’obligation » de congé
Pour la première fois, une prise de congé pour les hommes devient obligatoire. On peut penser que cela va intéresser les restaurateurs ou les libraires qui sont en confinement depuis presque six mois cumulés. Messieurs ce n’est pas le moment d’avoir un enfant : vous devez rester à la maison. Il n’est pas dit si une amende est prévue.
Répartition des tâches ou répartition des responsabilités ?
Ceci devrait améliorer le partage des tâches familiales encore « gérées » à 64 % par les femmes. Le terme est bien choisi car si les femmes voulaient bien que les hommes assument leur part des tâches dites ménagères – et pourquoi pas ? – elles n’ont pas l’intention d’en abandonner la gestion. Pas question de passer l’aspirateur comme vous le souhaitez : votre femme va vous montrer comment faire et le cas échéant contrôlera.
L’Etat (et les minorités agissantes) doivent-ils définir la vie de chacun ?
Ceci devrait logiquement permettre de faire évoluer les rôles dans la famille. Nous n’en sommes pas encore à la détermination légale de ces rôles par l’État ou la collectivité, mais cela vient. Plus question d’organiser sa vie familiale comme on le souhaite : le fantôme de Jules Ferry plane. À ce propos la tendance actuelle est à retourner vivre à la campagne avec un vélo en cultivant son jardin potager : à quand une loi (et des primes et incitations fiscales afférentes) rendant ce schéma obligatoire ? Dans ce cas, il faudrait mettre les écologistes dans le circuit de lobbying, mais cela ne colle pas tout à fait avec l’installation de la campagne dans les villes de Madame Hidalgo. Je n’évoque même pas à ce sujet le problème de désindustrialisation de la France : je n’ai pas vraiment trouvé la cohérence dans cette tendance, mais on va sûrement me l’expliquer.[[(Par choix personnel et opportunité, j’ai passé personnellement 25 ans de ma carrière à la campagne et le reste en région parisienne : je suis toujours vivant, mais mes amis, ayant fait le même ou un autre choix, aussi).]]
Et si l’on parlait impact financier ?
Le plus extraordinaire dans cette loi est que l’on se soit bien assuré qu’elle serait financée : trois jours par les entreprises et le reste par le « système social ». Comme il faut bien en définitive financer le système social, cela retombera en pluie fine sur les cotisations et impôts des Français et au bout du bout, sur les entreprises. Nous sommes en plein allégement des impôts dits « de production » lesquels – on vient enfin de s’en apercevoir – détériorent solidement la compétitivité de la France. Qu’à cela ne tienne, on continue jour après jour, loi après loi, à charger la barque. On s’aperçoit ensuite que la France n’a plus qu’un record du monde : celui des prélèvements sociaux. Comme de bien entendu tous les jours de congés seront considérés comme travaillés dans les calculs de retraite, d’intéressement, participation, de droits à congés (!). On cherche toujours le travail effectif correspondant à l’ouverture de ces fameux droits. Une évaluation rapide du coût de cette mesure est assez simple : un salarié ne travaille plus maintenant que 200 jours environ par an. 1 jour de congé supplémentaire égale donc 0,5 % de la masse salariale des hommes au travail, une paille ! Nous avons 80 Milliards d’écart d’impôts de production avec l’Allemagne : nous allons dans la bonne direction.
Un gouvernement peut-il instaurer et suivre des priorités ?
Tout ceci à un moment où le président de la République lui-même a annoncé urbi et orbi qu’il n’y aurait aucune limite aux dépenses engagées pour lutter contre la Covid 19, politique qui peut se comprendre, même si on ne la partage pas toujours, mais qui aurait au moins pu expliquer et justifier une certaine priorisation dans les dépenses. Il est vrai que comme les taux d’intérêt sont à zéro, il n’y aurait pas d’urgence à prendre des précautions.
L’égalité inaccessible
En termes d’égalité, le problème est encore plus complexe : les hommes vont se rapprocher des femmes, donc vive l’égalité. Mais les femmes vont perdre une partie de l’avantage qu’elles avaient sur les hommes : donc inégalités dans le mouvement… comme il n’est pas envisageable, même dans la meilleure des GPA, que les hommes portent les enfants, j’abandonne cette question, elle est trop compliquée.
Après 30 jours ce sera 45 !
On vient de créer une fois de plus un précédent (voir article EPLF du 27 septembre 2017 sur les cliquets), ce qui veut dire, premièrement que l’on ne reviendra pas en arrière, deuxièmement que ce n’est qu’un pas vers des lendemains qui (dé)chantent et que donc avec le temps cela ne pourra que se consolider et se développer. (Pour ceux qui ne seraient pas convaincus, Monsieur Mitterrand a baissé l’âge de la retraite de 65 à 60 ans précisément au moment où l’espérance de vie augmentait d’une dizaine d’années et tous les autres pays faisaient l’inverse. On n’en est pas encore sorti !)
Conclusion
Si vous voulez faire passer une mesure pour le moins contestable, mais de manière efficace, appuyez-vous sur des lobbys : pour le moment les plus puissants sont les féministes, les écologistes, les Bobos, les députés LREM, et depuis la semaine dernière : le Sénat. Il avait jusqu’à maintenant plutôt joué un rôle de modérateur raisonnable. Lors de son vote, il semble que personne ne se soit soucié du coût final de cette mesure, ou alors, en cachette.
Autres cartouches potentielles disponibles : les misérabilistes, les égalitaristes, les antiracistes, les antinucléaires, etc. Autres alliés traditionnels possibles : les syndicats, les motards, les camionneurs, les gilets jaunes, voire les aiguilleurs du ciel et enfin, les casseurs. Pas trace du MEDEF !
2 commentaires
erreur
est votée . . .
et l’intérêt des enfants ?
La seule justification dans cet allongement du congé paternel pourrait être l’intérêt de l’enfant nouveau né. On n’est n’a jamais entendu parler au parlement ! Evidement cela reviendrait à accepter qu’un enfant a besoin de son père !