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Coalition : comment ça marche ! (même pour les nuls)

par Gérard Dosogne
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Il est d’usage en France de critiquer le concept même de coalition pour gouverner : c’est parait-il contraire à « l’esprit » de la Vème République et une coalition ne permettrait pas de gouverner dans la durée. Mais dans la plupart des pays, et plus précisément dans les pays du Nord de l’Europe, la coalition entre deux ou plusieurs partis est la règle et ça ne marche pas si mal. Leurs performances sont plutôt meilleures que celles de la France, que ce soit au niveau de la richesse nationale, de l’emploi, du commerce extérieur, du niveau des prélèvements divers et variés, de l’éducation ou de la santé.

En France, nous ne connaissons bien que deux systèmes : le premier – le plus courant – où le Président a une majorité parlementaire du même bord que lui, et où, en principe tout se passe bien ; et le deuxième, la cohabitation, où le Président et une majorité opposée « cohabitent » et où, dit-on, tout est bloqué.
Il existe en fait un autre système : la coalition.

Les systèmes électoraux des pays du Nord donnent en effet rarement la possibilité à un seul parti, qui serait majoritaire, de gouverner seul et il est donc normal, après les élections, de constituer un gouvernement et donc de négocier un programme de gouvernement. Et cela peut prendre du temps. Mais cela n’a pas que des désavantages.

En Allemagne, aux Pays-Bas, en Suède, en Belgique, au Danemark, en Espagne et dans les autres pays similaires avec suffrage à la proportionnelle, comment gouverne-t-on ? Comment cela marche ?

Je vais prendre l’exemple de la Belgique, que je connais bien en tant que citoyen belge. Les députés « fédéraux » sont élus à la proportionnelle. La chambre se compose de 150 députés, dont 62 francophones et 88 néerlandophones.

Lors des dernières élections de mai 2014, 13 partis sont représentés et le parti le plus important fut le NVA (parti de droite flamand) avec 33 députés, suivi du PS (gauche francophone) avec 23 députés, du MR (libéral francophone) avec 20 députés, de l’Open VLD (libéral flamand) avec 20 députés, etc. (voir composition ci-dessous).

Il apparait très clairement que seul un gouvernement de coalition peut gouverner le pays !

Au lendemain des élections, le Roi nomme donc un « informateur », généralement le chef du parti arrivé en tête, pour faire un premier tour de piste et déterminer qui et sur quelle base pourrait faire partie de cette coalition. En 2014, cette mission confiée au NVA a duré 4 semaines. Ensuite, un nouvel informateur a été désigné par le Roi, le chef du parti libéral francophone Charles Michel, et ce dernier a vu en juillet sa mission transformée en celle de formateur, c’est-à-dire celui qui forme le gouvernement. Commence alors une négociation ardue entre différents membres de la future coalition pour définir le programme gouvernemental sur lequel tous les partis de la coalition vont se mettre d’accord. C’est le moment clé et le plus important et difficile de la législature, car une fois ce programme défini et approuvé par les partis de la coalition, le gouvernement n’aura plus qu’à « dérouler » ce programme et toutes les dispositions de ce programme seront votées par le Parlement.

L’accord de gouvernement (entre 4 partis : droite flamande du NVA, libéraux francophones et flamands et parti Chrétien Démocrate flamand, soit 91 député sur 150) a été signé le 11 octobre 2014, cinq mois après les élections. Il est disponible sur internet et contient 230 pages pour 11 chapitres bien lisibles, compréhensibles et détaillés :

1. Emploi et Compétitivité (26 pages) ;
2. Réforme des Pensions (retraites) (18 pages) ;
3. Progrès social et soins de santé (35 pages) ;
4. Finances (y incluse réforme fiscale) 16 pages ;
5. Energie, Environnement Recherche (14 pages) ;
6. Justice et sécurité (42 pages) ;
7. Asile et Migration (12 pages) ;
8. Fonction publique et Entreprises publiques (19 pages) ;
9. Politique Internationale (20 pages) ;
10. Mobilité (10 pages) ;
11. Thèmes transversaux (9 pages).

Composition de la Chambre des représentants de Belgique

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Le 11 octobre 2014, Charles Michel a été nommé Premier ministre par le Roi et a constitué son gouvernement qui s’est présenté devant la Chambre des députés pour approbation. Ce qui signifie que les députés de la coalition majoritaire approuvent le programme de gouvernement

Et voilà ! En cinq mois, une coalition a pu voir le jour, un programme détaillé de gouvernement a été établi et approuvé par les députés de la nouvelle majorité. Ce programme très complet est disponible sur internet et chaque citoyen y a accès. Le gouvernement a maintenant jusqu’en mai 2018 pour l’implémenter.

Mutatis mutandis, pourquoi la France ne pourrait-elle pas s’inspirer de ce type d’approche pour permettre à une coalition de gouverner ? Les Allemands suivent une procédure similaire : il a fallu trois mois à Angela Merkel pour négocier son programme de gouvernement avec le SPD. En Espagne où la situation était plus complexe, il leur a fallu un an. L’avantage c’est que durant cette période, pendant laquelle le gouvernement sortant expédie les affaires courantes… aucune nouvelle dépense ne peut être engagée : un sacré bol d’air pour les finances publiques.

Il faudrait chez nous suivre au moins l’exemple de la rédaction claire et précise d’un programme de gouvernement avant chaque législature. Bien entendu, si un parti a la majorité absolue, cela semble moins nécessaire… sauf que cela aurait peut-être permis à François Hollande de gouverner sans être entravé en permanence par les « frondeurs » …

 

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