L’un des objets d’indignation de ceux qui payent des impôts sur le revenu est de savoir ou d’apprendre qu’au moins la moitié des Français n’en payent pas.
Le pendant de ce mythe est de voir le gouvernement détaxer les plus bas revenus de quelques dizaines ou centaines d’euros et de clamer qu’il ne fait payer que les riches.
Dans les deux cas, il s’agit d’une énorme fumisterie car les plus pauvres payent des impôts mais des impôts qu’ils ne voient pas.
Le premier est bien sûr la TVA (148 milliards en 2014) dont on sait depuis longtemps qu’elle touche moins les hauts revenus car en pourcentage de ces revenus, leur part du produit consommé soumis à cette taxe est plus faible et la part de leurs investissements plus importante.
Le second impôt est la CSG–CRDS (94 milliards) dont le produit a largement dépassé celui de l’impôt sur le revenu (70 milliards) et qui est payé sur tous les salaires. La grande différence est que la CSG est retenue à la source alors que l’impôt sur le revenu est déclaré par les contribuables et payé par eux, et donc fortement ressenti alors que l’autre est ignoré. Comme la TVA que l’on paye sans s’en rendre compte, en mangeant, en buvant, en dormant, en naissant, et même en mourant.
Cet impôt indolore est ce qui a permis au gouvernement français dont Valéry Giscard d’Estaing était le ministre des finances, de presque doubler le nombre de fonctionnaires entre 1960 et 1980 en donnant à chaque fois un tour de vis supplémentaire lorsque le budget public débouchait sur un déficit.
C’est ce danger qu’ont voulu éviter les Américains en s’abstenant de créer une TVA et de continuer à alimenter le budget fédéral et les budgets locaux par un impôt sur le revenu payé et donc ressenti par les contribuables. Le résultat est que l’impôt payé par les contribuables américains est resté stable autour de 20% du PIB (ceci ne comprend pas les prélèvements sociaux comme la retenue de 12,5% sur les salaires pour financer les retraites) alors qu’il s’est envolé en France.
Il est donc assez surprenant de voir le gouvernement s’engager sur un prélèvement à la source de l’IR et fusion avec la CSG car cela va faire disparaître le mythe de la détaxation des plus pauvres.
Il est vrai que, suivant les recommandations de Thomas Piketty, le gouvernement rendra l’impôt résultant beaucoup plus progressif alors que la CSG était théoriquement un impôt à taux fixe, si l’on oublie le taux majoré pour les revenus financiers.
En imposition comme en finances publiques, l’important est la communication, pas la réalité, jusqu’au jour très proche où celle-ci va finir par exploser.