Les chiffres de création d’emplois par les entreprises nouvelles, tels que publiés par l’INSEE et repris par Eurostat, mettent la France à parité avec l’Allemagne. La réalité française est que nous créons 2 à 3 fois moins d’entreprises dites employeuses, celles qui peuvent grossir, devenir « gazelles » et exporter, que les Allemands et les Anglais et, de ce fait, 200.000 emplois de moins par an.
Comment fait notre Institut national pour occulter ce désastre?
La réalité française est que nous créons 2 à 3 fois moins d’entreprises dites employeuses, naissant avec au moins un salarié, celles qui peuvent grossir et devenir exportatrices, que les Allemands et les Anglais et, de ce fait, 200.000 emplois de moins par an, 105.000 emplois là où les Allemands en ont créé annuellement 315.000.
Comment fait notre Institut national pour occulter ce désastre?
En comptant comme emplois des entreprises sans salariés et des emplois d’entreprises déjà nées les années précédentes.
Analyse d’une désinformation
Si un économiste consulte les statistiques d’Eurostat, comparant les différents pays européens, il trouvera par exemple pour 2007 que les entreprises nouvelles ont créé 407.051 emplois en Allemagne, 395.053 en France. Pas de quoi s’alarmer, d’autant que les Allemands sont un peu plus nombreux que nous avec 80 millions d’habitants contre juste au-dessus de 60 pour nous.
La réalité est cependant que les entreprises employeuses françaises créent seulement 105.000 emplois salariés par an, les Allemandes 315.000, une différence annuelle de plus de 200.000
Pour mesurer la création d’emplois, le Census Bureau américain, équivalent de l’INSEE, ne retient que les effectifs des entreprises employeuses, celles naissant avec au moins 1 salarié. Et l’Europe devrait suivre. Car évaluer les effectifs réellement au travail des entreprises sans salariés tient de la gageure.
Comment l’INSEE fait-il pour passer de 105.000 à 395.000 ?
Nous avons reconstitué l’origine d’un tel écart sur l’année 2002 dont le nombre d’emplois créés est sensiblement le même, voisin de 400.000, mais où existent des ventilations détaillées.
-l’INSEE a compté d’abord comme emplois créés les créations d’entreprises sans salariés, même lorsque l’entreprise est une enveloppe vide ; suivant l’exemple américain qui est dans les cartons d’Eurostat pour les années qui viennent, nous n’avons compté que les emplois créés dans des entreprises naissant avec au moins 1 salarié ;
-Ensuite, dans le chiffre INSEE et à notre grande surprise, les emplois dans des entreprises déjà nées des années précédentes mais qui ont été reprises et / ou réactivées, ont été comptés comme créations.
En 2002 | Emplois totaux | Emplois non salariés | Emplois salariés | Emplois dans les entreprises réactivées | Emplois créés dans les entreprises ex-nihilo |
Nb d’employés à la création | 394 000 | 214 000 | 180 000 | 83 500 | 96 500 |
Ces chiffres publiés par l’INSEE pour 2002 sont cohérents avec les 104.500 emplois créés en moyenne sur la période plus récente 2004 – 2008 publiés par l’APCE à partir des chiffres INSEE et repris par l’IRDEME.
Les exagérations des chiffres INSEE avaient déjà été mises en avant par l’OCDE en 2006 : « La proportion des start-ups qui ne sont pas des créations pures varie selon les sources, [..]. En Europe cette proportion se trouve généralement autour de 20%, alors que les données nationales françaises suggèrent une proportion entre 30 et 40%. »
Il est certain que le chiffre de l’IRDEME sous-estime le nombre d’emplois réels créés car, pour ne pas embaucher, ou parce que les charges sociales payées par un indépendant sont moins élevées que pour un salarié, beaucoup d’entreprises, comptées avec zéro salarié, cachent en fait des emplois, et ne sont pas « vides ».
Mais, même si le nombre réel d’emplois créés est un peu plus élevé que les 105.000 publiés, et qu’une partie des emplois se dissimule dans les entreprises naissant avec zéro salarié, la conclusion à laquelle nous invitions nos lecteurs n’a pas changé : dès que l’on considère les entreprises de 2 salariés ou plus, nous fabriquons deux à trois fois moins d’emplois que les Allemands et les Anglais.(voir graphique ci-dessous)
Et pour fabriquer des Google, des Intel ou des Federal Express, il est peu vraisemblable que ces entreprises naissent sans salarié : un vrai projet se voit à ce que le créateur est capable d’embaucher du monde dès le premeir jour de façon à donner à son innovation la plus grande ampleur possible, rapidement, avant les concurrents.
Si l’on compare les entreprises françaises et allemandes naissant avec 2 salariés ou plus, le fossé est apparent :
Nb de salariés | 1 | 2-4 | 5-9 | 10+ | Total | |||||
Pays | Fr. | All. | Fr. | All. | Fr. | All. | Fr. | All. | Fr. | All. |
Firmes créées | 23 125 | 25 903 | 10 800 | 28 444 | 4 029 | 8 444 | 3 271 | 6 253 | 41 225 | 69 044 |
Salariés créés | 23 125 | 25 903 | 28 200 | 72 844 | 26 661 | 53 408 | 36 962 | 151 395 | 114 948 | 303 550 |
Source : INSEE (France) et Destatis (Allemagne), données pour 2008.
Conclusion
Le fait pour l’INSEE de publier des chiffres de créations d’emplois par les entreprises nouvelles en y incorporant les entreprises naissant sans salariés et en y intégrant des entreprises déjà créées les années précédentes, respecte peut-être les règles d’Eurostat. Mais considérée comme une donnée essentielle de la situation française, c’est de la désinformation.
Le rôle de l’INSEE est-il seulement de fournir des chiffres ou d’alerter notre pays sur les dangers économiques qui menacent sa survie ?