La pensée économique française est l’une des plus déstructurée du monde car la France est l’un des rares pays à avoir confié non seulement la collecte des informations statistiques mais leur traitement à des organismes publics, en tête l’INSEE. Et que ceux-ci ne livrent pas les informations essentielles qui permettraient de comprendre la réalité de notre situation. Mais aussi souffre d’un ministère des Finances, Bercy, dont les sureffectifs expliquent peut-être le laxisme.
Trois informations cruciales que ne publie pas l’INSEE
I. La première information est que nous créons chaque année depuis des dizaines d’années deux fois moins d’entreprises avec salariés que les Anglais ou les Allemands et environ 3 fois moins d’emplois.
II. La seconde est que nos entreprises existantes les plus dynamiques, celles dites « High Growth Firms » par l’OCDE sont 2 fois moins nombreuses qu’au Royaume-Uni, et entre 2005 et 2008 elles ont produit 600.000 emplois de plus alors que les Anglaises en ont produit 1.350.000.
III. La troisième est que non seulement nous créons très peu d’entreprises avec salariés mais que celles qui sont créées sont atteintes de nanisme
Le manque de financement d’amorçage
Les raisons du manque de création d’entreprises employeuses sont d’abord financières: 95% des entreprises employeuses qui se créent ont besoin d’un financement initial entre 100.000 euros au minimum, jusqu’à 1 million (plus encore s’il s’agit d’une entreprise dans le secteur bio-médical) de façon à faire face aux dépenses des deux premières années avant de parvenir au point mort, où le chiffre d’affaires couvre les dépenses. Le capital-risque ne va pas dans cette zone d’investissements, trop petits pour sa rentabilité; et quand l’État s’en mêle, non seulement pourquoi serait-il plus efficace, mais de plus, ses interventions sont en fait très marginales (voir CDC Entreprises).
Il manque en France la première couche de financement que seuls des individus peuvent apporter parce qu’ils sont les seuls à pouvoir financer ces créations en étant rentables [[entre 20 et 25% d’après des études sur les Business Angels américains et anglais.]]: les Business Angels indépendants [[ceux qui mettent individuellement plus de 100.000 euros par projet et qu’il faut distinguer des Réseaux de BA qui se regroupent pour investir individuellement beaucoup moins mais représentent moins de 2% de l’investissement des Business Angels en UK et USA.]].
Les responsables: législation fiscale et laxisme à Bercy
Cette absence d’une couche de BA provient de la législation fiscale française: outre le fait qu’on a encouragé les particuliers à investir dans les œuvres d’art ou les collections (détaxées d’ISF) ou l’immobilier, la Direction de la Législation Fiscale de Bercy s’est toujours opposée à ce que les avantages fiscaux accordés aux investissements dans les créations d’entreprises (Avantage Madelin, ISF-TEPA) dépassent des montants supérieurs à 100.000 euros par peur que des montages fiscaux fassent des trous importants dans le budget, plafond trop faible pour inciter un individu à investir en direct et à s’intéresser à l’entreprise où il investit et le conduisant à profiter de l’avantage fiscal à travers des fonds communs… qui n’investissent pas, comme on l’a vu, dans les créations.
Les Anglais ont depuis longtemps résolu ce problème et n’ont pas hésité à porter le plafond d’une déduction sous l’EIS, l’équivalent du Madelin, à 2 millions de £ par an pour un ménage mais les entreprises bénéficiares doivent en fait recevoir un rescrit, une approbation du Trésor qui évite la plupart de ces montages fiscaux. Et ils l’accordent en moyenne en 1 mois. Alors qu’il n’y a rien de tel en France et que jusqu’en 2010, il etait encore possible de faire financer des caves à vin ou du solaire, déjà payé à 100% par l’État, par l’Avantage Madelin ou l’ISF-TEPA: le laxisme de Bercy… malgré des effectifs triples de ceux du Trésor britannique.