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Les incohérences de Rousseau

par Yves Buchsenschutz
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Rousseau prétendait que l’homme est naturellement bon et que c’est la société qui le corrompt, du fait de l’invention de la propriété privée et du travail organisé. Ces inventions en particulier, ont permis l’exploitation de certaines personnes par d’autres. Il s’oppose à la pensée libérale de Locke ainsi qu’à Voltaire et au mouvement des lumières plutôt orienté vers la raison et la liberté.

Il est clair aujourd’hui que tout une partie de nos O.N.G. mais aussi des mouvements écologistes, verts, bio, antinucléaires, voire tous les défenseurs de la cause animale ainsi que du localo-local, encore mieux artisanal et ancestral sont dans la lignée de Rousseau. S’indignant régulièrement de la trop petite place qui leur est faite, ils ont pourtant réussi à gagner à leur cause une grande partie des médias et des classes dirigeantes en dépit des « lobbys » qu’ils dénoncent chaque jour.

Première incohérence : la définition d’un lobby est d’abord d’être un mouvement qui tente d’influencer des décisions ce qui dans le cas précis est le souhait … des deux adversaires. Il est évident que les pétroliers par exemple défendent leur activité, mais les marcheurs également ! Les individus, ayant pour une fois compris que l’union fait la force, se regroupent et tentent d’orienter au profit de leur thèse la majorité des citoyens, ce qui n’est pour finir que le jeu très normal de la démocratie. Il ne devrait pas y avoir de jugement moral dans ces attitudes. De ce point de vue, les anglo-saxons sont beaucoup plus objectifs que nous en favorisant les lobbys, mais tous les lobbys. Il serait intéressant au demeurant de voire combien de fois par exemple les pétroliers ont eu la parole sur disons les chaînes de télévision publique comparé au matraquage permanent y compris scolaire en faveur de « Rousseau »[[Rousseau Jean-Jacques, le philosophe, pas Sandrine]].

La deuxième incohérence tourne autour de la corrida. Les amis des animaux et autres WWF semblent avoir oublié que dans la nature, justement, les espèces prédatrices sont, non seulement légions, mais probablement largement majoritaires. Il y a très longtemps que l’homme a décrété que les animaux n’avaient pas d’âme pour pouvoir les manger sans ressentir de culpabilité particulière. Il en est d’ailleurs tout à fait de même du lion qui mange une antilope ou de l’aigle qui se nourrit d’une marmotte ou d’un lapin. Au passage on pourrait se poser la question – et d’ailleurs déjà certains se la posent – de savoir si les végétaux ne sont pas dans la même situation. On parle beaucoup aujourd’hui du dialogue des arbres entre eux et avec les champignons. Si l’on interdit à l’homme de manger de la viande peut-être faut-il aussi interdire aux vaches de brouter ! La chaîne de vie n’a pas été construite par l’homme. À vouloir (trop) l’aménager, il risque de sérieuses déconvenues. D’aucuns nous prédisent pour l’avenir des protéines à base d’insectes : le raisonnement qui s’applique au taureau, au dauphin, voire au chien, sera-t-il encore valable pour le moustique, les puces de lit ou les larves, festin des tribus de la forêt amazonienne ? On rétorquera que la corrida est différente car l’animal souffre inutilement. C’est certainement en partie vrai, mais il est vrai aussi que c’est parfois le toréador qui est vaincu. Que l’on ne généralise pas cette coutume – réellement ancestrale pour une fois – serait certainement compréhensible, mais qu’elle soit maintenue pour les amateurs qui le souhaitent dans un cadre limité et défini seraient peut-être une solution plus équilibrée. Les valeurs sur lesquelles s’appuient les anti corridas ne sont pas universelles. Chaque société a pu développer les siennes et ce n’est que justice de les respecter toutes même si nous souhaiterions les voir évoluer. Prenons un autre exemple : les chiens domestiques. Il y en aurait près de 7 millions en France actuellement et affûtons notre regard : qui dit chien dit laisse, ne serait-ce que pour des raisons de sécurité. Qui dit laisse dit lien, souple certes mais lien tout de même entre un maître et un … esclave. Combien de défenseurs de dauphin ou de taureau ont-ils un chien, (dont ils affirment en plaisantant qu’ils sont les esclaves ! satanée balade pipi !) mais qui tiennent néanmoins la laisse (ou la chaîne) du bon côté ? À quand les manifestations des membres du WWF pour la libération générale et immédiate des chiens esclaves ? des serins et canaris encagés ? des hamsters et autres écureuils ? De mémoire, au Vietnam, on mange les chiens ! Admettons que le cas des carpes se prélassant dans les douves des châteaux est plus discutable. Mais il y a probablement sur terre plusieurs milliards d’animaux esclaves, les chanceux (!? ) dits de compagnie, les autres destinés directement au service ou à l’assiette de l’homme mais tous à la merci de leur « maître ». Dans tous les cas ce ne sont pas des individus libres. Beau combat en perspective.

Une troisième incohérence vient de surgir au niveau de l’Europe. Ne voilà-t-il pas que cette organisation, sous la pression amicale d’ONG vertueuses (des lobbys !) vient de faire voter une nouvelle réglementation qui interdira(it) l’utilisation de matières premières ayant été obtenues à la suite de « déforestations » dans les pays d’origine. Le nombre de questions que pose ce genre de décision est quasi infini : la déforestation est-elle un vrai problème ? (Au passage notons qu’il y a les bons arbres et des mauvais : le palmier à huile par exemple !) Est-ce que la photosynthèse travaille différemment selon les espèces ? Où en est réellement la déforestation de la terre ? La France par exemple n’a pas moins d’arbres aujourd’hui qu’il y a quelques siècles, malgré une croissance importante de la population (multiplication par trois environ depuis Louis XIV ou Napoléon). L’humanité a inventé la médecine, et tous, y compris les écologistes veulent en profiter en : la conséquence a été la croissance de la population mondiale qu’il faut tout de même bien nourrir, ce qui d’une manière ou d’une autre finit par occuper des surfaces : doit-on euthanasier les bébés pour sauver les arbres ? La machine économique mondiale vient de subir un triple choc (COVID, démondialisation sauvage, crise de l’énergie amplifiée par la guerre en Ukraine) à laquelle nous ajoutons délibérément de nouvelles contraintes dues à la transition écologique : est-ce le bon moment pour rajouter du sable dans les rouages des échanges mondiaux tant politiques, qu’économiques ? De quel droit, au demeurant, l’Europe se permet-elle d’intervenir quasi directement dans le fonctionnement démocratique de pays réputés libres et indépendants comme le Brésil ou l’Indonésie ? Chaque pays, paraît-il, doit pouvoir librement disposer de son sort. Si tant est par ailleurs que cette analyse soit « juste », est-ce que la solution de la « loi » est la meilleure, ou tout simplement la bonne. La seule conséquence certaine est des charges supplémentaires pour les entreprises et des contrôles qui entraîneront l’embauche de surveillants fonctionnaires ! Beau résultat.

Une quatrième incohérence vient de voir le jour récemment en Angleterre : les bonnets à poil des Royal Foot Guards britanniques sont de toute éternité fabriqués à partir de fourrure d’ours canadiens. Suite aux pressions des défenseurs des animaux Il serait sérieusement question de remplacer cette matière naturelle par du synthétique. Si les défenseurs de la nature deviennent des promoteurs du plastique, nous vivons réellement un virage sociétal !

Cinquième incohérence : il se trouve qu’au moins en France, mais également dans de nombreux autres pays, les défenseurs de la nature, voir les écologistes se rangent généralement à gauche de l’échiquier politique. Leur deuxième mantra, presque aussi importante que la nature, est l’égalité pour ne pas dire l’égalitarisme. Dans leur tête manifestement il n’existe qu’une manière d’égaliser qui est d’aligner la société vers le haut : tout le monde doit être riche. Le problème est que la richesse a quelque part pour origine une exploitation intelligente et efficace de la nature par l’homme. Il est fort probable que si l’on bloque brutalement cette activité pour des raisons de « naturalité » les populations, non seulement n’atteignent pas la richesse pour tout le monde mais plutôt la pauvreté généralisée. L’expérience cubaine par exemple, laquelle est malheureusement loin d’être unique, devrait faire réfléchir les adeptes de ces sectes.

Sixième incohérence : dans la même veine que la troisième, les associations « naturelles » engagent des procès contre des sociétés ou des états pour maltraitance de la nature ! À l’heure actuelle, les français ont un tiers de leur parc nucléaire de production d’électricité hors service ce qui entraîne des risques d’approvisionnement importants, un coût financier qui se chiffre en milliards d’€, l’utilisation de courant étranger importé et fortement carboné … tout ceci pour satisfaire le lobby minoritaire des défenseurs incohérents de la planète : est-il également et légalement possible de les attaquer pour irresponsabilité manifeste et mise en danger du peuple français ? ou tout autre motif similaire pertinent ? Car ce sont eux, de facto, qui ont entraîné par exemple la fermeture de Fessenheim.

Je n’irai pas plus loin dans la recherche des incohérences tellement elles sont nombreuses et vous pouvez certainement en ajouter d’autres … (N’hésitez pas à les communiquer)

Conclusion : Est-ce à dire que leur combat est totalement inutile ? Je ne le pense pas mais la voie absolue et brutale, voire souvent violente que ces partisans choisissent au prétexte de l’efficacité ne me paraît pas pertinente. (Est-il équitable qu’à Notre-Dame des Landes des ex squatters-manifestants vivent désormais dans des propriétés de citoyens expropriés ?) Elle débouche de facto sur des comportements quasi terroristes « mais pour la bonne cause » qui se révèle comme par hasard toujours être la leur. La théorie des minorités agissantes, qu’on le veuille ou non, n’est que la justification d’abus de pouvoir et débouche le plus souvent sur des dictatures avec en prime la pauvreté. Curieusement, les sociétés comptant le moins de pauvres sont celles où il y a le plus de riches ! (Un pauvre suisse a un revenu double de celui d’un pauvre français) Oui nos sociétés « consomment » de la planète, oui elle n’est pas infinie et il faut réfléchir, corriger, améliorer, être attentif à ce bien commun mais pas n’importe comment et dans un océan d’incohérences. De ce point de vue, la gestion du trou d’ozone par les communautés internationales, scientifiques, climatiques et économiques me parait une réponse beaucoup plus raisonnable et surtout plus efficace.[[Un trou dans la couche d’ozone qui protège la terre en altitude découvert il y a une cinquantaine d’années a été aujourd’hui quasiment résorbé grâce à une collaboration mondiale organisée et volontaire.]]
Je reprendrai volontiers à ce stade le titre un peu aménagé d’un livre phare de Michel Crozier[[Incontournable sociologue des organisations]] « On ne gouverne pas les sociétés par décret, pas plus que par la violence »

 

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3 commentaires

philippe Odouard décembre 13, 2022 - 2:19 am

Les incohérences de Rousseau
Excellent article. je suis tout a fait d’accord. Cette loi sur l’interdiction d’importer des produits de la déforestation est complètement absurde, invérifiable et comme vous le dites, ne change rien au recyclage du CO2. Les palmiers a huile sont la façon la plus productive a l’hectare de produire de l’huile bon marche pour la consommation humaine. Ce sont des arbres absorbant le CO2 comme d’autres, en particulier plantes majoritairement pour remplacer les hévéas. La conséquence est que plus de terres agricoles seront utilisées pour faire pousser des oléagineux plus chers et donc de ce fait en appauvrissent les plus pauvres, comme vous le faites justement remarquer.

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moulin décembre 13, 2022 - 11:57 am

principe de responsabilité
principe de responsabilité : s’il est normal en société de s’exprimer et d’exprimer ses points de vue, y compris en groupe, il serait logique que, ceux qui font une proposition en subissent les conséquences et en payent le prix mais ne l’imposent pas aux autres. Vous ne voulez pas de soja cultivé sur les anciennes forêts ? Vous ne voulez pas d’huile de palme ? OK, étiquetons de quoi différencier les produits et laissons les citoyens consommateurs faire leurs choix. Voire permettre de savoir (via la bientôt e-Facturette) quels produits nous avons achetés avec nos courses pour ajuster nos choix suivants L’inclinaison dictatoriale des discours Rousseauistes me semble être la partie la plus incohérente en démocraties.

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Peyo décembre 14, 2022 - 10:57 am

Les incohérences de Rousseau
Evidemment « … c’est la faute à Rousseau… ».

Cette fois encore je crains que vous ne commettiez une petite erreur. Sa pensée était un peu plus complexe. Ce qu’il défendait c’était l’égalité en droits de tous les êtres humains. Il faut espérer que vous n’y êtes pas opposé. Il n’empêche qu’il n’était pas d’un optimisme béat sur la possibilité d’un avenir idéal et égalitaire. Comme il l’écrivait dans Du contrat social de 1762 pour cela « il faudrait que les hommes fussent avant les lois ce qu’ils doivent devenir par elles ».
Nous sommes confrontés au dilemme liberté / égalité. Trop de liberté conduit aux affres d’une société inégalitaire. Trop d’égalité imposée mène aux horreurs totalitaires. Ce qui inquiète aujourd’hui c’est l’existence dans nos sociétés contemporaines d’inégalités insupportables, pas seulement d’un point de vue éthique, mais aussi économique (baisse de la propension à consommer).
Nous nous enorgueillissons des progrès techniques et économiques de nos sociétés occidentales, alors que l’on voit se développer ces « soupes populaires » comme il n’y a pas loin d’un siècle. Cet échec de notre système alimentaire ne doit tout de même pas vous laisser indifférent.

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