La lecture de statistiques produites par REXECODE indique que le coût horaire du travail dans l’industrie manufacturière (4T 2019) ressort à 34,3 € en moyenne pour l’ensemble de la zone euro (+2,3% annuel). Pour la France, chiffre est de 38,6€. Au-dessus de la moyenne… mais il y a 5 pays dans l’UE qui ont un coût horaire (industries manufacturières) supérieur à celui de la France.
Par contre, oh surprise, tous ces pays, sauf l’Autriche, ont des excédents commerciaux alors que la France ressort avec le déficit commercial le plus important de l’Union Européenne. (comparaison avec le mois de juillet 2021, dernière statistique de Eurostat)
Coût horaire du travail en € | Balance commerciale en milliards € | |
Belgique | 43,9 | 3,30 |
Allemagne | 41,8 | 16,00 |
Suède | 40,3 | 0,30 |
Autriche | 40,2 | -0,90 |
Pays Bas | 39,4 | 7,50 |
France | 38,6 | -7,70 |
source : | Rexecode, 2019 (4T) | Eurostat, au 01/07/2021 (mensuel) |
Ces pays ont donc une industrie manufacturière plus compétitive que celle de la France. La compétitivité repose sur deux pieds : le prix du bien produit mais surtout la qualité et l’innovation, en un mot le rapport qualité innovation / prix
Si on ne regardait que le coût de production, la France devrait exporter plus que ces 5 voisins ! (et la Suisse n’est pas dans le tableau UE…). On en déduit donc que le problème n’est pas le coût du travail mais la qualité et l’innovation (ou « compétitivité Hors Prix »)
Quelles solutions ? Deux pistes, une à court /moyen terme et une à plus long terme
A court et moyen terme, la baisse des impôts de production peut contenir l’hémorragie, en permettant une baisse des prix mais surtout une reconstitution des marges et permettre une hausse substantielle de l’investissement productif.
A plus long terme, une refonte de la formation et de la recherche. La France manque de compétence et de recherche et développement : manque d’ouvrier qualifié, manque de techniciens supérieurs, manque de chercheurs/développeurs branchés sur l’innovation.
Deux domaines où, en France, l’Etat est dominant et ne fait pas le « job ».
Il est urgent que les politiques et les industriels s’attaquent ensemble à ces secteurs. L’Etat doit admettre qu’il n’est pas le mieux armé pour former les futurs acteurs de la chaine industrielle et donc qu’une réforme en profondeur de l’Education Nationale, de la formation professionnelle et de l’apprentissage, et de la recherche est indispensable, en y associant les industriels et admettant d’y réduire le rôle de l’Etat.
Les exemples étrangers proches, en Europe, abondent et doivent nous montrer la voie
Et les entreprises ne doivent pas tout attendre de l’Etat ! Elles doivent motiver et attirer les talents en offrant autre chose que des salaires médiocres aux ouvriers et techniciens. Et l’Etat doit cesser de favoriser les bas salaires !
EPLF / IRDEME comptent explorer plus avant ces solutions.
Note : Sur ce même sujet ces graphiques extraits de l’excellent article de Marc Touati.
4 commentaires
La performance industrielle dépend-elle vraiment du cout du travail ?
Votre coût pour la France à 38,6 euros m’a rappelé subitement notre taux horaire d’entreprise qui avait été fixé par notre petit comptable, un autodidacte chèrement payé mais tristement incompétent. Ce coût constant était de 38,11 euros, stabilisé vers 2002, il a été remis en cause par notre administrateur judiciaire lorsque nous avons été mis sous procédure de sauvegarde, car jugé comme étant beaucoup trop élevé, vis à vis de nos salaires qui étaient très voisins du smic, à l’époque ! Après nous avoir longtemps démontré que ce coût n’était pas compressible en raison de nos frais de structure, des charges sociales, etc… le comptable en second nous a confirmé que l’ordinateur avait validé cette valeur et que tout devis devait continuer à être calculé avec cette valeur horaire. Or, nous ne passions plus, plus aucun marché mondialisé ne nous passait de commande pour les produits nouveaux, juste les pièces de rechange, plus de « première monte », nous étions devenus trop chers ! Juste avant que nous ne passions sous administration judiciaire, j’ai découvert l’origine exacte, mais bien dissimulée de ce coût horaire : Depuis 1983, l’entreprise avait appliqué la rigueur, le bloquage des salaires et des prix, par le PHT (prix de l’heure travaillée, un concept attardé que nous surnommions la « Paix achetée », tellement ce coût était devenu rédhibitoire pour nos clients potentiels, ce PHT étant fixé arbitrairement par le petit comptable à 250 Francs de l’heure. Et 250 Francs, c’est 38 euros 11, très exactement ! Aucun calcul n’avait donc été effectué, et, malgré les énormes efforts sur la cadence horaire, nous avons tout perdu ! Question: la France a t elle bien calculé , à 38 euros 60 / heure , ou bien ce chiffre est il, lui aussi erroné… ???! Je rappellerais simplement qu’un tourneur CN fait travailler au moins 3 tours à la fois, en « temps masqué »(pendant que 2 machines tournent, il recharge la troisième !), cela suffit à démontrer l’inutilité de la « paix achetée »…
La performance industrielle dépend-elle vraiment du cout du travail ?
Pour commentaire, mon article : Réindustrialiser l’économie Française
La performance industrielle dépend-elle vraiment du cout du travail ?
Le coût est un élément certes mais pas forcément le principal en tous les cas pas l’unique. Sinon comment LVMH, Hermès, Évian, L’Oréal, Dassault etc. vendraient-t-il À l’export, bien souvent plus qu’en France ? Notre pays est aussi capable de vendre parfois de la qualité : développons ces axes.
La performance industrielle dépend-elle vraiment du cout du travail ?
Entièrement d’accord, en tant qu’ancien responsable qualité, Didier Le Roy a largement montré à Toyota Valenciennes que le management par la qualité assurait le succès : à 9999 euros la Yaris avait démontré, dès la fin du dernier millénaire, que l’on pouvait avoir une voiture 100 % française fiable en qualité sur le long terme, pendant que les « voitures à vivre » mondialisées des trois Carlos surnagent à 30 000 euros minimum pour gagner de l’argent ! … On peut s’en sortir, ce n’est qu’une question de volonté stratégique, avec une nouvelle génération de dirigeants, bien sûr !