Environ 600.000 entreprises, pour 98% de moins de 50 salariés, se sont fait consentir pour 121,7 milliards d’euros à fin novembre de prêts garantis par l’Etat. La faculté est ouverte jusqu’au 30 juin 2021. Les banques ont une grande latitude pour accorder ces prêts, l’Etat ayant spécifié qu’il ne refuserait pas sa garantie pour des prêts accordés à des entreprises en difficulté. Et donc plus grands seront les risques pris par le prêteur. Les entreprises ont jusqu’à 6 ans pour amortir le prêt, aucun remboursement n’étant dû la première année, ni la seconde si l’entreprise le demande. Les taux vont de 1 à 1,5% jusqu’à 2023, et 2 à 2,5% au-delà.
Ce sont des chiffres évidemment considérables. Selon les propos du Conseil d’Analyse Economique rapportés par Les Echos du 15 décembre, « Il faut prévoir des mesures de réduction de la dette dès l’an prochain parce que les entreprises très endettées deviennent avec le temps de moins en moins productives. Elles n’ont pas les capacités financières pour investir et innover, explique Philippe Martin. Une des difficultés de la politique économique des prochains trimestres va être de sauver les entreprises qui sont viables sans la Covid, quitte à les aider en restructurant leur dette, et laisser tomber les entreprises peu productives, qui, sans la pandémie, auraient fait faillite de toute façon. » On se demande comment cela va se passer.
L’impossible tri
« Laisser tomber les entreprises peu productives », autrement dit les zombies, on frissonne en entendant prononcer ces termes. Cela a un relent de Jugement Dernier, avec la désignation souveraine des appelés à rôtir chez Belzébuth, distingués de ceux appelés à la vie éternelle, ce, selon des critères divins. Le problème tient évidemment à la difficulté, voire l’impossibilité de cette distinction. Comment savoir si telle entreprise « aurait fait faillite de toute façon » ? Et comment demander aux banques de prêter très largement et dans des conditions où elles ne l’auraient pas admis sans être garanties par l’Etat, pour « laisser tomber » ensuite leurs clients au prétexte qu’ils étaient des zombies, donc des entreprises auxquelles on n’aurait pas dû prêter ?
Des notions à revoir ou à creuser ?
Mais il y a plus. Essayons de voir la suite. Tout d’abord, si l’entreprise « tombe en faillite » avant la première échéance de remboursement non respectée (jusqu’à la troisième année), ce ne sera par définition pas parce qu’elle n’aura pas remboursé le prêt (on ne tombe pas en faillite faute d’avoir payé une dette non échue). Lui accorder une réduction ou une restructuration de sa dette ne changera donc rien à sa situation. Il en sera probablement de même quelle que soit la date de la faillite, que la banque prêteuse retarderait le plus possible par rapport à ses co-créanciers si le remboursement était menacé.
L’Etat sera pris, comme la banque, dans une procédure collective ordinaire où ils n’auront tous deux pas grand-chose à dire, lui comme garant d’un débiteur dont la dette deviendra échue du fait de la faillite, elle comme créancier impayé. Mais tout se décidera au tribunal en fonction du vote de l’assemblée des créanciers, des décisions du tribunal et des propositions de continuation ou de reprise éventuelle. Remettre la dette du PGE (prêt garanti par l’Etat) ou la restructurer ne devrait à ce stade pas avoir d’effet. Ce sera finalement aux créanciers et au juge de déterminer qui est zombie et qui ne l’est pas.
Certes, à l’expiration du PGE, la restructuration aura un intérêt, mais le terme est loin… Si l’entreprise tient plusieurs années, il sera difficile de la qualifier de zombie, et de toute façon, zombie ou pas, l’Etat devra exécuter sa garantie sur appel de la banque, sauf bien entendu à restructurer. Il y en a vraiment pour longtemps. Quant à mobiliser BPI France, il ne devrait pas être possible d’y compter. Ce n’est pas la vocation de cette banque, surtout pour des entreprises de moins de 50 salariés après six ans au moins d’existence, et pour jusqu’à 600.000 d’entre elles.
Conclusion
De toute façon, pour les entreprises qui défaillent, l’Etat devra exécuter sa garantie, zombies ou pas zombies, sauf à consentir des conditions avantageuses pour le remboursement, voire à s’engager encore davantage, et sans entraîner de pertes pour les banques prêteuses. C’est un très lourd fardeau s’agissant de risques pris à hauteur de 121 milliards plus tous les prêts qui seront accordés jusqu’à la fin du semestre suivant. Rappelons que la valeur totale des participations de l’Etat n’était que de 85 milliards au 30 juin 2020.
Ces chiffres sont à additionner au coût déjà faramineux à tout propos de la pandémie pour un pays qui, à l’image du monde faut-il reconnaître, se refuse à voir la plus petite ride se former sur ses statistiques de décès …
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FTPE
Cher Bertrand , l’ opération Zombie est un lobby qui refuse les prêts participatifs demander par les TPE et conseiller par le président de la BDF Mr Villeroy de Galhau
1 er article le 24 avril contre le Zombie ** !!!
Aujourd’hui ca recommence ( même article dans le Figaro ) et toujours pas de preste participatifs…. !!!
Merci de dévoiler le pot au rose les économistes de Bercy sont effrayé de la capitalisation nécessaire pour renforcer le fonds propres des TPE PME ce qui a éte fait en Allemagne face a cette crise et préfèrent ne pas soutenir ces catégories de TPE PME et indépendants et accorder les financements aux grands groupes ou de renflouer le Zombie SNCF !!!!
je reste a votre disposition
bien cordialement Guy Giquello président honoraire FTPE